Plus de deux semaines après l'ablation de la vésicule biliaire et le retrait d'un polype du duodénum dans un hôpital allemand, l'état de santé du président Hosni Moubarak préoccupe toujours les Egyptiens et ils ne sont pas les seuls. La télévision publique diffuse en boucle des images du chef de l'Etat : une séquence où il apparaît en robe de chambre, amaigri. Les Egyptiens, après s'être remis de la découverte de la maladie de leur président, se posent la question de savoir qui, après lui, dirigera l'Egypte. Le sujet alimente toutes les rumeurs au Caire, bien que la Bourse de la capitale ait repris des couleurs après la chute de la semaine dernière lorsque se propagea la rumeur du décès de Moubarak. Le temps est aux incertitudes au Caire. En fait, imaginer le pays après Moubarak ne va pas de soi pour nombre de ses compatriotes, celui-ci est au pouvoir depuis trente ans. Dans le pays, la moitié de la population n'a connu que Moubarak ! Un habitant sur trois n'a pas encore 15 ans, l'âge médian est de 24 ans. La succession de l'octogénaire, dont le mandat actuel expire en 2011, reste une question sensible. Son fils cadet, Gamal, 46 ans, apparaît comme le successeur désigné. L'influence croissante de ce dernier au sein du Parti national démocrate (PND) au pouvoir, il en est le secrétaire général et dans le gouvernement, dont le Premier ministre et plusieurs membres de son cabinet, avaient été choisis par Gamal en personne, en est un signe parmi d'autres. Mais les observateurs estiment paradoxal que l'Egypte renoue avec un système de dynastie héréditaire auquel la révolution nasserienne, en 1952 a précisément mis un terme. Sait-on jamais ? Il reste qu'au Caire et dans les autres capitales, on spécule sur d'autres candidatures. Le chef des renseignements, Omar Souleimane, serait le mieux placé, quitte à attirer à ses côtés Gamal, dans un poste de vice-président. Parmi les outsiders figurent aussi Amr Moussa, patron de la Ligue arabe, et Mohammed El-Baradei, nouveau venu dans la compétition, qui dirigeait il y a peu l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), à Vienne, et qui n'hésite pas à critiquer ouvertement les Moubarak. Les Frères musulmans ont eux jeté l'éponge, leur nouveau chef s'intéresse à la daâwa. Une grande épine de moins aux Moubarak car les islamistes représentent tout compte fait le seul grand danger à la succession de Moubarak par son fils. Le mouvement islamiste des Frères musulmans est persuadé que son heure viendra lorsque les Egyptiens auront tous basculé dans leur camp. Ce qui ne saurait tarder à en croire les bruissements de la société. Le Caire est entrée dans la zone de turbulences.