Il n'y est pas allé par quatre chemins pour dénoncer le tandem Boussouf-Boumediene qui a entrepris, dès l'Indépendance, de déconstruire la légende vivante du chef de la Wilaya III. Grande mobilisation à l'université de Tizi Ouzou mardi dernier. Motif ? Le comité estudiantin a invité Saïd Sadi à animer une conférence sur son livre Amirouche : une vie, deux morts, un testament. Le vaste auditorium avait du mal à contenir autant de personnes venues en masse à l'occasion : moudjahidine, élus, enseignants, étudiants. Les organisateurs ont dû installer une sonorisation à l'extérieur pour permettre aux étudiants qui n'étaient pas rentrés de suivre la conférence programmée dans le cadre des activités commémoratives du 30e anniversaire du Printemps berbère. Preuve s'il en est que la génération d'aujourd'hui a repris le flambeau de ses aînés qui, hier en 1980, avaient fait de la région le bastion du combat démocratique que l'université de Tizi Ouzou a de tout temps relayé. Devant une assistance avide de vérités historiques, le président du RCD s'est voulu pédagogue. D'emblée, Saïd Sadi a tenu à rappeler, pour l'histoire, les combats nés dans cette enceinte universitaire pour donner, dans la difficulté il est vrai, quelques repères politiques et moraux au pays. Le propos toujours aussi direct, le conférencier n'y est pas allé par quatre chemins pour dénoncer le tandem Boussouf-Boumediene qui a entrepris, dès l'Indépendance, de déconstruire la légende vivante du chef de la Wilaya III. Cette falsification est le symbole même du détournement de l'Histoire, aux yeux du conférencier. “L'Histoire est la graine qui féconde la nation, c'est pourquoi son écriture doit se faire sans maquillage ni dégradation”, dira le Dr Sadi, retraçant au passage la vie et les hauts faits d'armes de cet “homme d'exception” qu'était le colonel Amirouche. L'orateur a remis en cause les propos de Ali Kafi sur certaines vérités historiques. “Ali Kafi a menti”, dénonce-t-il preuves à l'appui. Exemple : l'ancien président du HCE n'était pas congressiste aux assises de la Révolution en 1956 à la Soummam. C'est Amirouche, alors capitaine chargé de l'organisation et de la sécurité du Congrès, qui avait refusé à Kafi de participer à la rencontre parce qu'il ne figurait pas sur la liste des participants. Sadi a rétabli une autre vérité historique au sujet de l'affaire Mellouza. “À l'époque, soit la fin mai de 1957, Amirouche n'était pas en Algérie ; il n'est rentré de Tunis que vers la fin du mois de juillet pour remplacer le colonel Si Nacer à la tête de la Wilaya III”, explique l'intervenant qui rappelle que le nouveau chef promu colonel était chargé par le CCE de diligenter une enquête sur l'affaire Mellouza. La réunion des colonels de l'Intérieur en décembre 1958 a été convoquée par Amirouche suite à l'abandon des maquis et un différend avec la délégation installée à Tunis. C'est d'ailleurs ce qui avait poussé Amirouche à se rendre à Tunis le 6 mars 1959, même s'il n'avait aucune chance de passer au vu du déploiement de l'armée française. “Le MALG a capté un message de l'armée française faisant état du déplacement du colonel Amirouche à Tunis. Ainsi informé, Boussouf n'avait pas informé à son tour le GPRA”, a souligné le conférencier avant de préciser que le colonel Amirouche, en allant sur Tunis, avait sur lui une pile de documents et autres rapports dans lesquels il accusait les responsables des transmissions, entre autres, de “régionalisme”, en ce sens que la Wilaya III n'avait que deux postes radio au moment où des régions ou des zones moins fournies en hommes dans les autres Wilayas en avaient plusieurs. Même les étudiants envoyés par Amirouche à Tunis pour une formation sont dirigés par Boussouf vers les transmissions, ce qui avait contrarié le chef de la Wilaya, lui qui avait le souci de former les cadres de demain. “Amirouche allait dissoudre le MALG et l'Armée des frontières”, révèle le leader du RCD avant de conclure sous un tonnerre d'applaudissements : “Si Amirouche n'était pas mort, l'Algérie ne serait pas le désert sanglant qu'elle est devenue aujourd'hui.”