Liberté : Dans quelques jours, une rencontre médicale sera consacrée aux HPV. Si on prend en considération que les infections par ce virus sont fréquentes, aussi bien chez l'homme que chez la femme, en quoi est-ce si important de sensibiliser, aujourd'hui, sur ce problème ? Pr. Zahra Sadi : Aujourd'hui, il est bien reconnu que le cancer du col de l'utérus est dû à un virus : le Papilloma Virus Humain ou HPV. Si la science est arrivée à reconnaître la cause principale de ce cancer, la médecine propose aujourd'hui des solutions pour sa prévention. En effet, on sait que ce cancer est précédé de lésions facilement accessibles au traitement (lésions précancéreuses). Ces lésions doivent être dépistées car elles ne se manifestent par aucun signe. C'est le dépistage par le fameux frottis cervical. Le dépistage des lésions précancéreuses par frottis a amené à la diminution notable de l'incidence du cancer du col dans tous les pays qui l'ont prôné. Toutefois, cette méthode a montré ses limites. Actuellement, on propose d'améliorer le dépistage des lésions précancéreuses du col de l'utérus en associant la recherche du virus responsable : le HPV à haut risque (ou oncogène). La première solution proposée pour la prévention du cancer du col utérin est donc le dépistage et le traitement des lésions précancéreuses. La deuxième solution proposée actuellement est la vaccination contre l'agent causal de ce cancer : le HPV à haut risque. Quels sont les modes de transmission ? La voie de transmission des HPV la plus reconnue est celle qui se fait par les rapports sexuels. En effet, l'infection aux HPV est exceptionnelle chez les femmes vierges et très fréquentes chez les femmes en période d'activité sexuelle. C'est la plus fréquente des infections sexuellement transmissibles. En effet, 8 femmes sexuellement actives sur 10 seront infectées par un HPV au cours de leur vie. Cependant, 80% des femmes infectées élimineront spontanément l'infection en 18 mois. En effet, cette infection, très fréquente chez les jeunes gens, est dans l'immense majorité des cas asymptomatique et transitoire, n'aboutissant à aucune maladie. Seules les infections persistantes, chroniques, pourront ouvrir la porte à des anomalies cellulaires et à une éventuelle cancérisation. Pouvez-vous expliquer les HPV à caractère bénin et ceux oncogènes ? On peut distinguer deux groupes principaux de Human Papilloma Virus (HPV) ayant un tropisme anogénital, qui infectent l'appareil génital féminin et masculin et l'anus. Les HPV dits à bas risque, notamment les génotypes HPV 6 et 11 responsables des verrues génitales (condylomes acuminés ou végétations vénériennes). Les condylomes acuminés sont des lésions bénignes, qui n'évoluent pas vers un cancer, mais qui ont pour conséquence un impact psychologique sur le couple. Les HPV à haut risque ou oncogènes, sont notamment les HPV 16 et 18 responsables de lésions précancéreuses et de cancer du col utérin principalement, et plus rarement la vulve, le vagin, le pénis, l'anus. Quelle est la fréquence des cancers provoqués par les HPV. Si celui du col de l'utérus est le plus connu, qu'en est-il des autres formes (cancer de la vulve, du vagin, du pénis…) ? Le cancer du col utérin est l'un des cancers les plus fréquents en Algérie après le cancer du sein. Le cancer de la vulve est rare : 3% des cancers gynécologiques selon la littérature (20 fois moins fréquent que le cancer du col). Selon le registre des cancers de la wilaya d'Alger, le cancer de la vulve représente 2,5% des cancers génitaux de la femme. On voit un cancer de la vulve pour 23 cancers du col. Les autres cancers, du vagin, du pénis, de l'anus, sont plus rares. Les spécialistes plaident pour le dépistage précoce du cancer du col de l'utérus. Comment envisagez-vous l'opération dans notre pays ? Il s'agit, en fait, comme nous l'avons vu, du dépistage des lésions précancéreuses du col utérin. Ces lésions peuvent évoluer pendant 20 ou 30 ans avant de devenir un cancer, mais elles peuvent également régresser et disparaître. L'idéal est évidemment de les dépister et les traiter avant leur éventuelle transformation en cancer. On doit commencer le dépistage quelques années après le début des relations sexuelles et le programme national fixe l'âge de début du dépistage et les modalités, l'idéal étant de réaliser un dépistage couplé frottis cervical et recherche d'HPV (test HPV). Si la vaccination est adoptée, le dépistage sera modulé mais gardera sa place. Comment se traite le cancer utérin, et quel est le taux de guérison ? Le cancer du col de l'utérus se traite par la radiothérapie et la chirurgie. Les protocoles de traitement et taux de guérison sont fonction du stade auquel le cancer a été diagnostiqué. Mais le meilleur traitement reste la prévention : dépistage et traitement des lésions précancéreuses et vaccination anti HPV.