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“Les étudiants n'échappent pas à la léthargie politique”
Abdelhamid Mehri à Liberté
Publié dans Liberté le 19 - 05 - 2010

Né en avril 1926, Abdelhamid Mehri est un homme politique algérien et un des membres fondateurs de l'Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema). Lors de cet entretien, notre interlocuteur a tenu à préciser que son propos est un témoignage indirect ; lors des faits, il se trouvait à l'extérieur du pays.
Liberté : Comment a été décidé et organisé le mouvement de 1956 ?
A. Mehri : La décision a été prise en concertation entre les dirigeants de l'Ugema et la direction de la Révolution qui était représentée par Abane Ramdane et Benyoucef Benkhada. En plus, les climats politiques et sociaux étaient très lourds. À ce moment-là, les étudiants faisaient face à une répression qui n'épargnait personne, chose qui a poussé à l'intensification de la lutte armée menée à la fois par l'Armée de libération nationale (ALN) dans les montagnes et dans les villes par des actions directes.
Les éléments les plus conscients des étudiants étaient organisés dans les mouvements nationaux algériens et plus précisément dans le Parti du peuple algérien (PPA), donc préparés pour renouveler leur engagement dans le nouveau contexte créé par le passage à la lutte armée du 1er Novembre 1954.
Les étudiants étaient également préparés à participer à la lutte de Libération par leurs idées en créant l'Union générale des étudiants nord-africains.
Quel a été le statut de l'intellectuel dans la Révolution ?
Quand nous parlons d'intellectuels à l'époque, ils étaient très peu nombreux dans le contexte colonial. De plus, leur engagement de manière générale semble avoir pris du retard par rapport aux classes populaires les plus larges.
Le problème des intellectuels dans la Révolution n'a pas fait l'objet d'une réflexion particulière. Mais ils étaient interpellés en permanence et plus précisément depuis le 1er Novembre pour marquer leur engagement solennel à la lutte du peuple algérien.
Leur position, et notamment depuis le 19 mai 1956, a eu une grande répercussion à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Cette date a marqué en fait une solennité beaucoup plus que le début de l'engagement. De plus, beaucoup d'étudiants n'ont pas attendu le 19 mai pour s'engager. Cela est surtout plus valable pour les étudiants de la Zitouna et certains éléments des universités arabes.
Il est peut-être significatif à cet effet que la première victime fut un étudiant, le chahid Djamel Belgacem, arrêté dès les premiers jours du déclenchement du 1er Novembre. Ce jeune étudiant a été torturé à mort. Son corps avait été jeté en mer et retrouvé sur une plage.
Vous avez dit que l'engagement des étudiants est venu en retard ; à quoi cela est-il dû ?
Les mouvements nationalistes sont toujours nés dans les milieux ouvriers, essentiellement modestes.
Quelle réflexion vous inspire l'état du mouvement étudiant actuel, si mouvement il y a ?
Il est difficile de cerner cette question. Car la vie politique en Algérie semble, dans son ensemble, somnoler et être marquée par un manque terrible de débat sur les problèmes de la société et l'évolution générale du pays après l'Indépendance. Les étudiants n'ont pas échappé et n'échappent pas à cette léthargie politique regrettable.
Quel est votre point de vue sur la polémique suscitée par le livre de Saïd Sadi sur le colonel Amirouche ?
Je n'ai pas encore lu le livre de Saïd Sadi. Mais ce que je peux dire c'est que la “Bleuite” a fait des centaines de victimes innocentes et j'inscris à leur tête Amirouche lui-même et ceux qui l'ont aidé. S'il y a une réelle conscience, les Algériens devraient en vouloir aux auteurs et non aux victimes.


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