La suppression de l'article 190 et l'attribution du marché du siège des Affaires étrangères soulèvent des interrogations. Le conseil des ministres, tenu dimanche dernier, a adopté le projet d'ordonnance relative à la monnaie et au crédit. Le communiqué officiel, rendu public, à l'issue de la réunion ne mentionne pas si le parlement va examiner et approuver prochainement le texte. Il se contente de rappeler les principaux objectifs du projet de loi. Premier objectif : permettre à la Banque d'Algérie de mieux exercer ses prérogatives à travers la séparation, au sein de la Banque d'Algérie, entre le conseil d'administration et le conseil de la monnaie et du crédit, l'élargissement des prérogatives du Conseil de la monnaie et du crédit, auquel sont conférées des prérogatives en matière de politique monétaire, de réglementation et de supervision, l'établissement d'un censorat pour suivre notamment le fonctionnement de la centrale des risques, de la centrale des impayés et celui du marché monétaire. Le ministre des Finances, l'auteur du projet, ne fait que rectifier le tir. En effet, la révision de la loi monnaie et crédit de 1990, en 2001, a été approuvée, en dépit d'une levée de boucliers contre le texte. On a reproché à la nouvelle loi de dépouiller et le gouverneur et le conseil de la monnaie et du crédit de leurs prérogatives. Elle remettait en cause l'indépendance de la Banque centrale par rapport à l'Exécutif. Second objectif rappelé par le communiqué : renforcer la concertation entre la Banque d'Algérie et le gouvernement en matière financière, à travers notamment la création d'un comité mixte Banque d'Algérie-ministère des Finances pour la gestion des avoirs extérieurs et de la dette extérieure. Troisième objectif : permettre une meilleure protection des banques et de l'épargne du public, en durcissant les conditions et les critères d'agrément des banques et de leurs gestionnaires, ainsi que celles relatives à leur solvabilité, en aggravant les pénalités encourues par les contrevenants, en interdisant le financement des activités des entreprises appartenant aux fondateurs et aux dirigeants de la banque… Dans son intervention, le chef de l'Etat a souligné que ce texte tend à consolider le système bancaire national et la crédibilité financière du pays. Il a insisté sur la mise en place rapide de systèmes comptables, d'information et de paiement adaptés aux exigences d'un système bancaire et financier moderne, efficient et à l'abri de toute suspicion. Le président de la république n'a soufflé mot de la disparition dans le nouveau texte de l'article 192 de la loi de 90. Cette disposition oblige les entreprises des secteurs de l'énergie et des mines à avoir un compte auprès de la Banque centrale. Ce qui permet de contrôler leurs transferts vers l'étranger. Avec la disparition de l'article, la voie est ouverte au détournement des richesses nationales. Le Conseil des ministres a également approuvé le projet d'ordonnance relative à l'obligation d'assurance des catastrophes naturelles et à l'indemnisation des victimes. Parmi les mesures envisagées, citons l'obligation d'assurance contre les effets des catastrophes naturelles pour tous les biens bâtis et les installations industrielles ou commerciales, la tarification de la garantie contre les catastrophes naturelles par voie réglementaire, l'octroi de la garantie de l'Etat pour les opérations de réassurance pour garantir la solvabilité et la sécurité du régime d'indemnisation des victimes, l'obligation de placement en valeurs d'état des fonds générés par l'assurance des catastrophes naturelles. Les victimes, du reste, seront dédommagées dans les trois mois à compter de la détermination par voie d'expertise du montant des dommages subis. Les personnes non assurées ne seront pas indemnisées. Par ailleurs, l'Exécutif prévoit un programme spécial de développement pour les wilayas de Tizi Ouzou, Béjaïa et Bouira, pour combler les retards dus aux événements de Kabylie. Enfin, le Conseil a entendu une communication sur la réalisation du siège des Affaires étrangères. Le marché sera cédé par le recours au gré à gré. Ce qui soulève des interrogations. Le communiqué ne fait nullement état de façon précise des résultats des appels d'offres. Ce qui trangresse le principe de transparence. N. R. Le conseil de la concurrence Un gendarme économique En vue de l'application des règles anticoncurrentielles, il sera créé un conseil de la concurrence auprès du chef du gouvernement, jouissant de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. Cette structure est dotée de plus larges prérogatives par rapport au texte de 1995. Les membres du conseil, au nombre de 9, sont tous nommés par décret par le chef de l'état, pour une durée de cinq ans renouvelable. La structure est composée de deux membres exerçant ou ayant exercé au conseil d'état, à la cour suprême ou à la cour des comptes en qualité de magistrat ou de conseiller, et de sept membres choisis parmi les personnalités connues pour leurs compétences juridiques, économiques ou en matière de concurrence, de distribution et de consommation, dont un choisi sur proposition du ministre de l'intérieur. Le conseil de la concurrence a compétence de décision, de proposition et d'avis qu'il exerce de son initiative ou à la demande, sur toute question ou mesure de nature à assurer le bon fonctionnement de la concurrence… L'article 44 énonce que cette structure peut être saisie par le ministre du commerce. Il peut se saisir d'office ou être saisi par toute entreprise ou, pour toute affaire. Il fait des injonctions visant à mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles. Il peut prononcer des sanctions pécuniaires. Les pratiques anticoncurrentielles telles que visées, notamment par l'article 6, sont sanctionnées par une amende ne dépassant pas 7% du montant du chiffre d'affaires, hors taxes, réalisé en Algérie au cours du dernier exercice clos. Si le contrevenant est une personne physique ou morale ou une organisation professionnelle n'ayant pas de chiffre d'affaires propre, le maximum de l'amende est de 3 millions de dinars. Toute personne physique qui aura pris part personnellement et frauduleusement à l'organisation et la mise en œuvre de pratiques anticoncurrentielles telles que définies dans le présent texte est punie d'une amende de deux millions de dinars (article 57). Il faudra une certaine technicité pour démontrer l'existence de pratiques anticoncurrentielles. Son efficacité, repose, à l'évidence, sur la composante humaine. Il faudra vérifier aussi si le conseil exercera son travail en toute indépendance. N. R.