Tôt dans la matinée, ils étaient nombreux les citoyens à se défaire de leur train-train quotidien et à s'empresser de liquider les emplettes les plus urgentes pour regagner leur domicile afin de ne pas rater le rendez-vous tant attendu, alors que les écoles et les administrations publiques avaient carrément fermé les portes dans la plupart des cas. Dans certaines banques, l'on a même prié les usagers à quitter les lieux peu avant midi pour assister au match tant attendu, le tout fait en toute amabilité même si la grogne était quand même perceptible chez certaines personnes âgées que la fébrilité du foot effleurait à peine. Vers 12h30, à l'heure du coup d'envoi, la ville de Tizi Ouzou était quasiment déserte au point qu'un tel décor ressemblait étrangement au rituel moment de rupture du jeûne. “On se croyait au mois du Ramadhan à l'heure du Maghreb !” lançait un policier de service qui donnait l'impression de vivre une grosse frustration à l'idée de ne pas pouvoir s'attabler devant le petit écran comme des millions d'Algériens. Dans une véritable “ville morte”, les immeubles auront vibré de clameurs indescriptibles, notamment en première mi-temps où Belhadj (3'), Halliche (36') et Matmour (39') ont failli offrir bien du bonheur à des millions d'Algériens. Puis vint cette seconde mi-temps plutôt stérile en dépit d'une domination aveugle, mais désordonnée et le coup de poignard de ce diable de Robert Koren en fin de match aura eu l'effet d'un véritable coup de grisou dans toute la région. Bien avant la fin du match, de nombreux citoyens avaient quitté leur foyer par dépit et déception et les critiques les plus acerbes d'après-match ont inévitablement eu place aux mille et une promesses d'avant-match. Alors que les administrations publiques et de nombreux lieux de commerce n'ont même pas rouvert leurs portes, les supputations les plus amères et les commentaires les plus fous envahissaient la rue, les places publiques et les cafés maures. Le schéma tactique et le coaching de Saâdane sont alors passés à la moulinette, l'expulsion stupide de Ghezzal et la bévue monumentale ont été revues plus d'une fois avec un gros sentiment de colère et de révolte car les supporters du “Club Algérie”, qui étaient sur un gros nuage, venaient de redescendre sur terre pour réaliser que la Coupe du monde n'est pas une mince affaire. À Tizi Ouzou, Draâ-Ben-Khedda, Azazga, Aïn El-Hammam, Larbaâ Nath-Irathen et dans les contrées les plus reculées du Djurdjura, la tristesse était de mise et le pessimisme des uns et des autres contrastait paradoxalement avec l'optimisme des ultras qui considèrent qu'il reste encore deux matches à jouer et que tout est encore possible, mais voilà que les deux prochains adversaires ont pour nom l'Angleterre et les USA. autrement dit, deux grosses cylindrées beaucoup plus robustes que ces modestes slovènes.