L'arrivée du général-major Hamel à la tête de la DGSN a coïncidé avec une démonstration de force de la police sur le terrain. L'ancien responsable de la Garde républicaine semble vouloir donner un style plus autoritaire à la police, mais attention aux excès ! Alger a vécu une semaine particulière, marquée par le retour des interpellations dans la rue – certains parlent de rafles –, de contrôles aléatoires des automobilistes et une présence policière au mètre carré à faire pâlir la Tunisie. Ce retour à une police omniprésente et visible s'est accompagné d'un comportement policier envers les citoyens assez limite. Les “bleues” sont déployées sur un terrain sécuritaire et social assez fragile, ce qui ne manque pas d'inquiéter les observateurs. Le général-major Hamel, nommé après 5 mois de vacance de poste après l'assassinat d'Ali Tounsi, sait qu'il a peu de temps pour s'imposer. Sa nomination s'est faite au détriment d'un enfant de la boîte, en l'occurrence le jeune Abdelaziz Affani, favori de Yazid Zerhouni, et d'autres hauts gradés de l'armée ou d'anciens des services secrets qui avaient davantage le profil. Son intronisation ne s'est pas faite en douceur puisqu'il aura fallu toute l'intransigeance du président Bouteflika pour adouber ce gendarme de carrière qui aura le “désavantage” d'être originaire de Tlemcen et l'inconvénient majeur de n'être pas un ancien flic ; si l'on se réfère aux critiques des cadres de la police qui ont accueilli sa désignation. Ainsi, le général-major Hamel, qui avait laissé de bons souvenirs à Oran quand il commandait le groupement régional de la Gendarmerie nationale, semble avoir entamé une course contre la montre pour s'affirmer, intra-muros, et pour donner une nouvelle feuille de route pour la police nationale qui vivait un malaise insoutenable. Statut du policier en jachère, revendications salariales, formation nombreuse mais inefficiente ou encore affaires de corruption et de trafic d'influence qui ont miné un corps au bord de l'implosion avec l'affaire Tounsi qui en fut le paroxysme le plus dramatique. Pour convaincre, le général-major Hamel se devait de frapper les esprits. La DGSN bruit de rumeurs concernant son nouveau cabinet confié à d'anciens militaires de carrière et la volonté de Hamel d'imposer sa griffe a, paradoxalement, arrangé les affaires des cadres de la police qui voyaient dans le style de Tounsi une perte d'autorité de la police dans la société algérienne. Car la seconde mort d'Ali Tounsi est là. Si feu “El Ghaouti” avait fait de la formation, notamment sur les droits de l'homme, de la sanction exemplaire, de la discipline et du respect cardinal du citoyen, ses axes d'effort, cela ne s'est pas fait sans heurts en interne. Nombreux sont les cadres de la police qui voyaient dans cette approche une perte de crédibilité du policier qui était rentré dans les rangs au point d'être assimilé à un fonctionnaire. La réactivation de l'IGS et les radiation et suspension à tour de bras ont fini par démobiliser les policiers qui se plaignaient aussi bien du procureur qui relâchait facilement un délinquant arrêté ou des citoyens qui outrepassaient leurs droits au point de se défouler sur la police en toute circonstance. La reprise en main actuelle est-elle pour autant un bon moyen de redorer le blason de la DGSN ? Rien n'est moins sûr, surtout que les consignes de fermeté peuvent être mises à profit par des revanchards. Si l'incivisme des citoyens, notamment les automobilistes, la montée en puissance du banditisme, les risques d'attentats kamikazes, la délinquance endémique et la prolifération des réseaux de drogue sont autant de chantiers que la police se fait fort de contenir, ou de traiter, la manière ne semble pas trop présente. Dans un climat social toujours en ébullition à cette période de l'année, marquée par une campagne sensible de relogement et l'arrivée d'un Ramadhan par de fortes chaleurs, les policiers doivent mettre des gants pas seulement pour verbaliser un automobiliste en infraction. Car l'attitude de la police nationale a toujours été le baromètre le plus visible des intentions de l'Etat et est souvent porteuse de messages à la société. Sur ce plan, le message de fermeté, avec un zèle inégalé, n'est pas propice à apaiser les tensions sociales.