Une offre en forme de provocation aux Occidentaux pour lesquels elle confirme que le président iranien n'a pas tellement changé de ligne. Ahmadinejad défie Obama dans un duel télévisé. En réalité, la proposition pas si incongrue que cela prône une certaine ouverture. “Je dois me rendre à New York en septembre pour participer à l'Assemblée générale des Nations unies. Je suis prêt à m'asseoir avec M. Obama pour un dialogue de haut niveau, pour parler librement des questions mondiales et voir la solution qui est la meilleure”, a-t-il lancé dans le cadre d'un congrès destiné aux Iraniens résidant à l'étranger. Il a ensuite ajouté : “Le gouvernement américain a déclaré qu'il était prêt à dialoguer à un niveau plus élevé. Très bien. Nous sommes aussi en faveur du dialogue sur la base du respect mutuel et de la dignité.” Pour mémoire, l'Iran et les Etats-Unis ont rompu toute relation diplomatique depuis trente ans. Ahmadinejad renouvelle son offre alors que Washington continue de faire pression sur ses partenaires du groupe des Six (France, Royaume-Uni, Russie, Chine, Allemagne) afin que soient appliquées intégralement les nouvelles sanctions internationales à l'encontre de l'Iran. Celles du Conseil de sécurité approuvées par Moscou et Pékin et les additifs adoptés par les Etats-Unis et l'Union européenne, et pour lesquelles la Russie et la Chine ont dit niet. Une situation qu'a bien voulu commenter le chef d'Etat iranien, un peu taquin : “Si vous croyez que vous allez brandir un bâton et dire que nous devons accepter tout ce que vous dites, cela ne se produira pas. Les Occidentaux ne comprennent pas que les données dans le monde ont changé.” Fidèle à ses habitudes, Ahmadinejad a dénoncé le lien entre Obama et Netanyahu : “Vous soutenez un pays qui a des centaines de bombes atomiques et vous dites que vous voulez stopper l'Iran qui pourrait éventuellement avoir la bombe un jour (…avant d'enfoncer, catégorique…). M. Obama donne trop d'importance aux sionistes, en fin de compte, le sionisme n'est qu'un parti politique, qui contrôle les médias et l'argent. Il n'est pas important, ce sont les nations qui sont importantes dans le monde, n'en déplaise à Paul le poulpe (qui a prédit les vainqueurs de la Coupe du monde de foot).” Derrière ses rhétoriques, le président iranien souhaite désormais engager des pourparlers directs avec les Etats-Unis, y compris par le biais d'une interview avec son homologue. Son souhait, c'est de faire, en septembre devant l'assemblée générale de l'ONU, coup double : parler avec Obama, dirigeant de la première puissance mondiale, s'exprimer à l'ONU, seule et unique organisation internationale digne de ce nom, à ses yeux. Un bon moyen, peut-être, de mettre à plat les relations tumultueuses entre les deux pays. G. W. Bush, le prédécesseur d'Obama, avait déjà refusé une entrevue de ce type, et il n'est pas certain qu'Obama ne fasse la même chose, puisque une condition sine qua non d'une reprise des relations entre les deux pays semble être l'arrêt du programme nucléaire iranien. Ahmadinejad nie farouchement cela, préférant parler de sanctions “destinées à empêcher l'Iran de devenir un pôle industriel”. Il reste que voilà un Ahmadinejad prêt à discuter. Ce qui marque, aux yeux des analystes, un fléchissement dans le bon sens, lesquels estiment que son offre n'est pas pleine de mauvaises intentions. Après tout, vouloir discuter avec l'ennemi semble plus opportun que l'attitude inverse, occidentale, qui consiste depuis pas mal de temps à décider de sanctions sans aucun effet sur la politique d'Ahmadinejad. En tout cas, l'annonce de ce débat voulu par l'Iran est un casse-tête pour Obama. À vrai dire, il sortira perdant à tous les coups : s'il dit oui, les lobbys juifs vont le lyncher pour avoir discuté avec un président souhaitant la disparition d'Israël. En cas de refus, sa popularité déjà en baisse prendra un nouveau coup sur la scène arabe et musulmane, car il se sera déjugé, lui qui s'est présenté comme ouvert à la discussion avec les cultures islamiques.