La plupart des grands projets de développement infrastructurel, lancés depuis 2004, ont connu des surcoûts et des dépassements de délais générant un gaspillage des deniers publics. Plus de 31 grands chantiers, tous secteurs confondus, sont en souffrance, avaient déjà constaté, en janvier dernier, les cadres de la Caisse nationale d'équipement pour le développement. Les projets en question représentent une enveloppe globale de 3 000 milliards de dinars sur un total de 4 000 milliards de dinars, soit 75% du programme national des grands projets d'équipements publics inscrits à la nomenclature des investissements. 25 visites sur le terrain et 30 rapports contenant des constats de dépassement décelés dans la réalisation des projets. Parmi les chantiers en souffrance, figure en tête de liste le projet de l'autoroute est-ouest, “le projet du siècle”, ne cesse-t-on de le décrire, mais qui semble devenir au fil des mois un casse-tête chinois. La construction de la deuxième rocade d'Alger sur 65 km connaît aussi des retards considérables. Le projet confié, en 2006, au groupement espagnol OHL pour 450 millions d'euros devait être livré en 2009. Dans le transport urbain, le projet de la première ligne du tramway d'Alger, sur 23 km, n'est pas du reste. L'entreprise du métro d'Alger (EMA) a saisi Alstom Transport, chef de file du groupement chargé de la réalisation du tramway d'Alger, sur l'important retard des travaux. La livraison de cette ligne, prévue fin 2009, est repoussée à 2012, selon certaines sources. Mais le plus emblématique reste incontestablement le métro d'Alger, qui risque de ne pas voir le bout du tunnel de sitôt. Même scénario concernant le projet de un million de logements, alors que des logements sous la formule AADL, lancés en 2001, ne sont pas encore réceptionnés. Le manque de maturation des projets, additionné à une très faible maîtrise des coûts par les pouvoirs publics et aux dégâts causés par la corruption, a, pour ainsi dire, transformé certains chantiers en véritables gouffres financiers. Le Conseil des ministres a récemment dégagé 9 700 milliards de dinars (équivalent à 130 milliards de dollars) pour le parachèvement des grands projets déjà entamés notamment dans les secteurs du rail, des routes et de l'eau. La revue des dépenses publiques, réalisée en 2007 par la Banque mondiale, avait établi avec précision la réalité et les raisons du surcoût de l'investissement public en Algérie. “La préparation technique du personnel d'exécution et la qualité des projets sont généralement faibles. De nombreuses faiblesses trouvent leur origine dans l'urgence qui accompagne la préparation des projets”, relève la Banque mondiale. Mais, semble-t-il, les enseignements n'ont pas été tirés. Et c'est tout le drame de notre pays. Pourtant, le gouvernement ne cesse de répéter que l'efficacité de la dépense publique et la rigueur dans la gestion des deniers publics sont devenues un objectif érigé au rang de priorité nationale. C'est dans cette préoccupation que la Cned a été créée en 2005, en tant qu'instrument d'évaluation des coûts des grands projets. Certes, des mesures ont été récemment prises pour mieux encadrer les dépenses d'équipement. En outre, la subordination de toute inscription de projets ou programmes à la réalisation préalable des études de maturation des projets proposés dans le plan pluriannuel. Il y a aussi l'exigence de l'arbitrage du Conseil des ministres pour toute réévaluation de coût supérieure à 15% du coût initial, pour les grands projets mobilisant des moyens financiers publics importants. Cependant, ces mesures ne semblent pas suffire. Un guide de management des grands projets d'infrastructures économiques et sociales a été élaboré, au début de l'année, par la Caisse nationale d'équipement pour le développement (Cned).