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La Alawwiya : dhikr, écologie, modernité
Le nouvel élan des zaouaïas (2e partie)
Publié dans Liberté le 30 - 08 - 2010

Les spécialistes du soufisme et les écrits se rapportant à ce sujet reconnaissent que la zaouïa est intervenue au 11e siècle (5e siècle de l'Hégire) pour tenter de sauvegarder ce qui restait de la décadence de l'Islam après la chute de Grenade qui a mis les musulmans en difficulté ainsi que la “reconquista” qui chassa d'Espagne les maures espagnols. Jusqu'à nos jours, la zaouïa se donne pour mission d'étudier et d'appliquer les enseignements de la religion musulmane selon le rite malékite et la doctrine ash'arite. L'arrivée des premiers Soufis au Maghreb daterait du 12e au 13e siècles, après leur dispersion dans l'espace musulman, dans le monde arabe, au Maghreb, en Afrique, en Indonésie, en Malaisie, en Iran et le reste du continent asiatique (Chine en particulier). À Mostaganem, ville balnéaire et grand port commercial de l'ouest du pays, les Alawis semblent tournés complètement vers l'avenir et la modernité.
Après Laghouat et Aïn Madhi, changement radical de décor à Mostaganem. Le ciel est gris en ce début d'été, et une pluie fine arrose tranquillement la ville tentaculaire qu'est devenue Mosta, la ville de la musique bédouine et des Cheikhs Hamada et Aïn Tedeles, des célèbres vignobles et de sa côte azurée qui accueille chaque année des milliers d'estivants.
Notre venue se fait dans un cadre fleuri chez les Alawis, où Hadj Mourad, l'un des descendants de Ahmed el-Alawi, fondateur de la tarîqa Alawwiya, nous emmène aussitôt voir la merveille écologique des Alawis : un immense jardin appelé Djenate el-Arif en référence à Djenate el-Arif qu'un maître soufi avait créé à Grenade à l'époque de l'apogée des Maures andalous. Non loin du centre de la ville, ce jardin renferme une variété multiple de plantes, mais le clou du spectacle, pour ainsi dire, est bien la culture de l'arganier en grande quantité, une pépinière d'arbustes très agréable à voir surtout une espèce rarissime qui produit de l'huile d'argan (fruit de l'arganier, incomestible, en forme de minuscule citron), précieuse source de nombreux traitements bio et naturels de santé, de beauté de luxe et de diététique. Il n'y aurait pas d'autres semblables en Algérie de ce type d'arbres, mis à part les endroits gérés par l'Association du développement durable et de l'écologie dépendant de la tarîqa alaouia, à Batna et Oran. Un centre de formation moderne avec tous les accompagnements (hébergement, restauration, salle de conférences) a été construit à proximité du jardin. Plus loin, la zaouïa où est enterré Cheikh Ahmed el-Alaoui domine superbement la mer. “Notre Cheikh éduquait beaucoup sur l'amour de la patrie à son époque déjà, en même temps que la religion bien sûr”, tiendra à nous répéter Hadj Mourad. Le Cheikh avait émigré en 1908 pour s'installer en Turquie, un régime d'Islam, et avait choisi comme lieu d'implantation la ville d'Istanbul. C'était le temps de la décadence de l'empire Ottoman. Déçu par l'affaiblissement manifeste de la religion musulmane, le Cheikh rebroussait chemin. En 1909, il fonda sa confrérie “ouverte aux autres religions”.
Dans sa zaouïa, un ensemble de maisons et jardins, on croisait déjà des hommes de lettres et de culture venus de différents horizons. L'administration coloniale finit par se méfier de cet homme charismatique. Elle musela son journal où il appela un jour “le peuple algérien à prendre conscience de son identité et de sa culture”. À sa mort, en 1934, le grand-père, puis le père de Khaled Bentounes, actuel dirigeant de la Tarîqa, assument à leur tour le rôle de chef spirituel de la confrérie Alawwiya.
Dans ses mémoires, le défunt Messali Hadj, pionnier de la lutte anticoloniale et fondateur de l'Etoile nord-africaine, parti porte-parole de la revendication d'indépendance, raconte qu'après avoir tenté d'inciter des Algériens à quitter le pays à cause d'un système étranger à l'Islam, Cheikh Ahmed el-Alawi était revenu en effet pour les persuader de ne plus partir car ce système n'avait plus qu'une durée de vie limitée. Ce serait à partir de là qu'il fut taxé d'être pro-Français, à cause d'une mauvaise interprétation de sa position. Par extrapolation, l'on peut sans doute souligner que la participation du mouvement soufi à la lutte de libération nationale est devenue aujourd'hui la pierre angulaire par laquelle ce mouvement revendique aussi son existence au même niveau que toutes ses autres activités (éducation religieuse, etc.). Le double leitmotiv est patent à chaque zaouïa où l'on va : “Nous avons pris fait et cause pour le pays pendant la Révolution”, “tout ce qui touche le pays nous interpelle”.
La tarÎqa Alawwiya…
shadilia, darqawia
Les Alawis, c'est aujourd'hui le cheikh Khaled Bentounes qui est l'axe essentiel, guide spirituel et dont le livre Soufisme, l'héritage commun, a suscité en été 2009 en Algérie, on s'en souvient, de violentes réactions des milieux islamistes en Algérie et une vaste polémique parce qu'il était porteur d'images attribuées par l'auteur au Prophète Mohammed. Il est notoire à ce sujet, que le prétexte était tout trouvé pour tirer à boulets rouges sur celui qui a pour devise : un Islam libre et responsable, entre autres griefs qu'on garde sous la main.
Car Khaled Bentounes veut incarner, lui, le renouveau. Vivant aujourd'hui souvent en dehors du pays, il a été intronisé à la place de son père à la tête de la zaouïa Alaouia très tôt à l'âge de 26 ans, alors qu'il travaillait dans l'import de vêtements à Paris. Il ne s'y attendait certainement pas, mais le rapprochement au point de vue du charisme et de l'ouverture est manifeste avec Ahmed al-Alawi, son arrière-grand-père paternel, né en 1869, un cordonnier indigent de Mostaganem, fondateur en 1909 de la confrérie. Un autre atout pour Khaled : il aimait les discussions passionnées avec ses amis étudiants. Il demeurera par conséquent fermement attaché au principe d'Ahmed al-Alawi dont l'un des objectifs essentiels fut de s'ouvrir aux autres religions.
C'est la fin de l'après-midi, et comme chaque jour, dans un quartier de Mosta, les fidèles psalmodient le Coran à la zawiya Alawwiya. Les versets s'entendent de la rue, jusqu'au coucher du soleil. Moment de sérénité. Ici, l'on réfute d'emblée le mot confrérie qui, d'après la plupart des adeptes, ne coïncide pas avec tarîqa et beaucoup plus avec la religion chrétienne. Pour la tarîqa soufie (la voie soufie), il est vrai qu'il s'agit d'un cheminement (théocratique) : d'un côté un maître et de l'autre un disciple, le maître ayant acquis son enseignement à travers une “chaîne initiatique”, de Cheikh en Cheikh. Il faudra aussi que ce maître ait vécu l'enseignement avec son cheikh de nombreuses années avant d'obtenir l'autorisation de prendre la suite. Cette chaîne aboutirait de l'un à l'autre jusqu'au Prophète Mohammed au point de vue du spirituel à travers les grands noms du soufisme, depuis El-Halladj et Ibn Arabi. Mais il faudrait surtout citer aussi le plus marquant d'entre eux : Sidi Abdelkader al-Jilani, fondateur à Bagdad de la tarîqa Qadiria au 11e siècle. La Qadiria est sans doute la toute première tarîqa, dont se revendiquent la plupart des tarîqate, dont la tarîqa Alawwiya de Mostaganem qui provient elle-même de trois paliers successifs : qadiria, puis shadilia, puis darqawia.
Le nombre des voies soufies à l'heure actuelle répertoriées par les spécialistes en Algérie s'élève à pas moins de 35, mais la très grande majorité d'entre elles sont le résultat d'un fractionnement qui atteint les trois paliers, comme pour la tarîqa Alawwiya de Mostaganem. La grande majorité découle de la shadilya. La Tidjania et la Rahmania par exemple n'y sont pas incluses, elles.
Une démarche personnelle et indépendante
Quelle différence entre la tarîqa alaouia de Mostaganem, à l'heure actuelle la plus populaire, et les autres ? “Nous avons été éduqués pour ne pas faire de différence, tout en prônant le respect pour chacune des voies, car elles mènent toutes au même but”, tient-on à certifier à la zaouïa de Mosta.
Quel but, au fait ? C'est tout un processus, que l'on pourrait situer d'une part entre le postulat premier pour les Soufis de se considérer comme faisant partie de “ahl edhikr oua Sunna” (la famille de l'évocation répétée plusieurs fois du nom de Dieu, et celle de la sunna du Prophète Mohammed), d'autre part le vécu d'une spiritualité qui va au-delà des besoins matériels et autres ambitions terrestres, associée en somme à “la quête de l'Eternel”. Et la tarîqa se définit précisément comme étant “une démarche personnelle, indépendante des structures sociales”, le Soufi étant en permanence orienté vers la dévotion par une “voie” qui révèle cette volonté.
Pourquoi entend-on parfois traiter
les Soufis de genres un peu spéciaux
qui vivent hors de leur société, voire en marge de la religion ? La réponse est la même partout, seul le ton change d'une zaouïa à l'autre, tantôt mesuré et paisible, tantôt orgueilleux et hautain, voire suffisant. La question est balayée d'un trait. Le Soufi serait celui qui cherche à vivre sa religion profondément et qui passe par des stades de réflexion sur toutes les étapes de la pratique religieuse.
Pour Hadj Mourad, un fin lettré, frère de Khaled Bentounes, le guide spirituel de la tarîqa Alawwiya, “la voie alawwiya a revivifié le message de l'Islam”, nous dit-il. Explication : “Nous avons été éduqués pour ne pas faire de différences, tout en prônant le respect pour chacune des voies, car elles conduisent toutes au même but”. Les Soufis ? Définition : pour notre interlocuteur, le Soufi est celui qui cherche à vivre sa religion profondément, et qui passe par des périodes de réflexion sur toutes les étapes de la pratique religieuse. En résumé, y a-t-il une différence dans la pratique religieuse entre un Soufi et un autre musulman ? Non, sauf que le premier a une vie spirituelle plus intense et veut aller toujours au-delà des moyens prescrits, que ce soit pour la prière, la zakat ou le hadj. “Ce sont des moyens certes, pour arriver au but, mais nous leur donnons leur sens exact et non une symbolique”, conclut Hadj. Pas facile.
Z. F.
(À suivre : Ribat, khalwatiya et Sidi M'hamed bou Qobrine)


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