Saïd Djab El Khir, chercheur et théologien historique, est remonté jusqu'aux premiers siècles de l'hégire pour restituer au mouvement ascétique soufi toute sa dimension historique et son enracinement dans la société islamique. Dans sa communication intitulée : « Le rôle du soufisme dans l'Algérie post-Almohades », il s'est employé à démontrer l'existence de deux axes de l'Islam. Le courant officiel dit (fakih), qui est l'émanation du pouvoir, a sauvagement réprimé et combattu les adeptes soufis. « C'est à partir de fetwas et autres exégèses que de nombreux soufis ont été exécutés ou persécutés au Machraq entre le 5e et le 8e siècle de l'hégire, tels El Halladj, Souhra Wardi et El Nassimi, qui a été dépecé vivant », a indiqué Djab El Khir. « En Algérie, poursuit-il, c'est aussi une véritable chasse aux sorcières qui est lancée contre cet ordre de religieux ascétiques entre le 8e et le 9e siècle, dont Sidi El Haloui (crucifié), Sidi Lakhdar Benkhelouf, accusé d'hérésie, ainsi que beaucoup d'autres figures emblématiques du soufisme agressées et mutilées ». Quant à l'Islam populaire maraboutique, c'est celui qui a prospéré et s'est développé dans les zones rurales et est représenté par les saints, les walis et les zaouïas. Ces dernières étaient vers 1880 au nombre de 3 600. Un mouvement mystique d'une dimension sociale exceptionnelle qui tend vers la purification de l'âme (tassaouf), la restriction (zohd) et la stimulation de la conscience patriotique chez les initiés. Se déclinant donc comme un courant ascétique purement religieux, la philosophie des Aïssaoua s'appuie sur l'évocation (dikr), générateur de la force spirituelle en Islam, pour se rapprocher du Tout-puissant, de sorte que les adeptes du style soufi se sentent en communion avec le Créateur. « Si pour les foukafa et les ouléma, le dikr se limite à la récitation littérale des textes rapportés par la Sunna, chez les soufis, il (dikr) est une méthode de contemplation ésotérique », a commenté l'orateur.