Perpétuant la tradition, l'APC de Sidi M'hamed (Alger) a décerné, mardi soir, le Burnous d'or à l'un de ses enfants qui n'est autre que le chantre de la chanson bédouie-sahraouie, Khelifi Ahmed. La cinquième édition de cette manifestation culturelle aura la particularité de réunir un grand nombre d'artistes, amis et compagnons de route du maître Khelifi Ahmed. Farida Saboundji, Mohamed Adjaïmi, Amar Laskri, Saïd Hilmi, Abdennour Chellouche, Kaci Tizi Ouzou, Fawzi Saïchi, Rachid Souki, Aïda, pour ne citer que ceux-là, ont marqué de leur présence la magnifique soirée dédiée au cheikh que la maladie a empêché d'être parmi son monde, ses amis et son milieu. Cependant, les organisateurs de cette rencontre souvenir n'ont rien laissé au hasard pour retracer, encore une fois, la vie artistique de celui qui a bercé plusieurs générations de sa voix de ténor dont lui seul avait la maîtrise. La salle de réunion du siège de l'APC est pleine comme un œuf. Une occasion pour tous de savourer la poésie populaire du melhoun. Qui n'a pas fredonné Galbi ettfakar ourbane rahala, écrite par Aïssa Ben Allal et superbement interprétée par cet artiste à la voix exceptionnelle. Soirée poétique avec des extraits des chansons du maître lus à l'assistance répondant par de longues ovations. Pour sa part, l'association Lumière, présidée par le réalisateur Amar Laskri, a immortalisé le chantre par un court métrage de haute facture. Dans l'interview, le cheikh s'exprime avec une modestie à faire pâlir certains prétentieux. “J'étais un petit fellah qui s'adonnait avec amour aux travaux des champs”, dit l'artiste dont la carrière de plus de cinquante ans a fait vibrer des millions de fans à travers l'Algérie, le monde arabe et même l'Europe et ailleurs où il a pu s'introduire. Les témoignages repris dans le documentaire, ponctué par Gamr Ellil, Bent Essahra ou encore La taqnet ya khatri (ô mon cœur, ne perds pas espoir), s'accordent à qualifier Khelifi Ahmed de “patrimoine national”, pour reprendre Mohamed Adjaïmi. Pour Zoheir Abdellatif, l'artiste incarne plusieurs générations. Noubli Fadel, compositeur, le qualifie d'école. Son fils, Mohamed Amine Khelifi, a qui le Burnous d'or a été remis, dit que son père a toujours vécu dans la modestie qu'il a “puisée dans le grand parcours artistique qui lui a fait côtoyer les grands de ce monde”. Il est resté égal à lui-même, un sage. Le P/APC, Mokhtar Bourouina, dit simplement : “Khelifi Ahmed était un grand, il restera un grand. Alité, il nous a reçus chez lui et nous a accordé une petite causette pendant plus d'une demi-heure.” Khelifi Ahmed, de son vrai nom Ahmed Abbas, est né en 1921 dans l'aârch Ouled Khelifa, commune de Sidi Khaled, dans la wilaya de Biskra. Une commune réputée pour ses poètes du melhoun et qui renferme la tombe de la légendaire Hiziya dont le long poème de Ben Guitoun a été chanté par Abdelhamid Ababsa et Rabah Driassa. Âgé aujourd'hui de 89 ans, l'artiste, alité, ne sort pratiquement plus de chez lui. En quittant sa région natale vers la capitale, c'est à Sidi M'hamed qu'il s'installe et tout particulièrement au niveau de la mosquée du cimetière où il exerçait comme mounchid, art qu'il a appris de son père, lui-même meddah. Et c'est dans ce contexte que la commune de Sidi M'hamed l'a honoré à l'instar d'autres artistes.