Le diplomate français estime que “les trois derniers mois, il y a eu un certain nombre d'étapes importantes” qui font qu'aujourd'hui, l'on peut “espérer qu'il y ait un nouveau rythme dans les relations algéro-françaises”. Les relations entre l'Algérie et la France pourraient connaître une nouvelle impulsion après plus de deux années de crispation. C'est du moins ce qu'a laissé entendre, hier, l'ambassadeur de France à Alger, M. Xavier Driencourt, lors d'un petit-déjeuner avec quelques journalistes. La visite du secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, reçu par le premier ministre, puis par le président de la république, la visite du chef de l'Etat à Nice, le non-lieu dans l'affaire du diplomate Mohamed-Ziane Hasseni et récemment la désignation de l'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin pour coordonner les questions économiques semblent avoir apaisé les tensions entre les deux pays. “Aujourd'hui, ont peut dire, on peut souhaiter, on peut espérer qu'il y ait une nouvelle étape dans les relations algéro-françaises”, a indiqué l'ambassadeur. Le diplomate français estime que “les trois derniers mois, il y a eu un certain nombre d'étapes importantes” qui font qu'aujourd'hui, l'on “peut espérer qu'il y ait un nouveau développement, un nouveau rythme dans les relations algéro-françaises”. Dans cette dynamique de détente, M. Xavier Driencourt annonce la visite de la secrétaire d'Etat français chargée du Commerce extérieur, mme Anne-Marie Idrac, dès la fin de la semaine. Mme Anne-Marie Idrac, qui sera accompagnée d'une délégation d'hommes d'affaires, viendra aussi préparer la venue, avant la fin de l'année, en Algérie, de Jean-Pierre Raffarin. L'ambassadeur de France a évoqué, aussi, la visite, la semaine prochaine, de Jean-Pierre Chevènement, “un ami de l'Algérie”. M. Chevènement animera deux conférences autour du thème “République, laïcité et religions”, à Oran et à Alger. “Il faut retrouver un nouveau rythme dans nos relations bilatérales”, a souhaité l'ambassadeur de France. Le non-lieu de Hasseni est un élément important de ce nouveau rythme. Précisons sur la mission de M. Jean-Pierre Raffarin. M. Jean-Pierre Raffarin n'est pas “monsieur Algérie” ; sa mission est de “coordonner les relations économiques franco-algériennes ainsi que le développement des investissements français en Algérie et algériens en France”, a précisé l'ambassadeur de France à Alger. M. Xavier Driencourt a indiqué que, lors de la rencontre entre le premier ministre, Ahmed Ouyahia, et le secrétaire général de l'Elysée, “a eu l'idée de dire que peut-être ce serait bien si du côté français, et peut-être du côté algérien, on pouvait nommer une personnalité chargée de coordonner les différents projets économiques de part et d'autre”. L'ambassadeur a indiqué que la rencontre entre Ouyahia et Claude Guéant a “beaucoup porté sur les questions économiques”. “Je pense que c'est une priorité du premier ministre. Ils ont parlé de projets de développement français en Algérie, de la loi de finances…”, a relevé M. Xavier Driencourt. Ils se sont accordés sur l'opportunité de confier de part et d'autre le suivi de ces relations à une personnalité de haut niveau, dont le rôle serait notamment de coordonner la coopération économique franco-algérienne ainsi que le développement des investissements français en Algérie et algériens en France. “C'est une mission à caractère économique. La presse a dit que M. Raffarin va être chargée de relancer les relations franco-algériennes, d'être Monsieur Algérie. Ce n'est pas cela qui est dans l'esprit français et dans l'esprit des algériens”, a souligné l'ambassadeur. “Pour relancer les relations algéro-françaises, vous avez un ambassadeur à Paris et on a un ambassadeur ici. On fait notre travail au quotidien”, a-t-il ajouté. Plus explicite, M. Xavier Driencourt explique que les entreprises françaises n'ont pas toujours accès “au ministre algérien”, M. Raffarin va être un facilitateur, en quelque sorte. Dans cet esprit, l'Algérie aura donc à désigner une personnalité qui serait le vis-à-vis de M. Raffarin. L'ambassadeur de France indique qu'un certain nombre de projets français en Algérie dans l'industrie pharmaceutique, l'automobile, le ciment, les banques, les assurances, qui datent de plusieurs années, ne se sont pas réalisés en raison de difficultés et d'obstacles. M. Xavier Driencourt souligne que les entreprises françaises sont en Algérie sur la durée. Elles savent que le marché algérien est un marché important. “35 000 emplois directs et 100 000 emplois indirects ont été créés par les entreprises françaises”, a-t-il affirmé. Evoquant le mesure de la loi de finances complémentaire 2010 qui oblige les investisseurs étrangers qui décrochent des marchés de prendre un partenaire algérien, l'ambassadeur de France relève la difficulté de sa mise œuvre. “Le tissu industriel n'est pas très dense. Le nombre d'entreprises dynamiques qui ont des capitaux à même d'investir avec des partenaires étrangers n'est pas considérable”, a-t-noté. Interrogé sur le report de la visite d'Etat que devait effectuer le président de la république, M. Xavier Driencourt indique que les deux pays ont traversé deux années difficiles, marquées notamment par le dossier Mohamed-Ziane Hasseni. “Je crois que dans l'esprit des algériens ce dossier constituait un obstacle pour une visite d'Etat”, a estimé l'ambassadeur. Mais au-delà du dossier Mohamed-Ziane Hasseni, une question très sensible pour les algériens, l'ambassadeur évoque des divergences sur la mémoire, le dossier du Sahara occidental, une sensibilité différente sur l'Union pour la Méditerranée. Il y a aussi d'autres affaires judiciaires en cours qui ont heurté les Algériens. Concernant la proposition de loi relative à la “criminalisation de la colonisation”, l'ambassadeur, indique que “si ce texte était voté, cela ne faciliterait pas les relations bilatérales”. “Nous respectons la souveraineté du parlement algérien de voter tel ou tel texte, mais nous restons attentifs à cela”, a-t-il ajouté, estimant que “ce n'est pas le meilleur moyen de mettre de l'huile dans les rouages”. sur les visas, le diplomate indique que le consulat d'Alger a délivré 47 700 visas durant les sept premiers mois de l'année, sur 66 224 visas demandés. L'ambassadeur a relevé une baisse de 10% de demandes de visa. “Nous n'avons pas payé de rançon” Evoquant la situation sécuritaire au Sahel, le diplomate indique que le développement d'une zone de non-droit, qui irait de la Mauritanie jusqu'à la Somalie, en englobant le Sahel, est une source de préoccupation importante pour les autorités françaises. M. Xavier Driencourt affirme que son pays reconnaît le rôle de leadership que doit jouer l'Algérie dans cette région. “Nous avons pris note des différents efforts faits par l'Algérie”, a ajouté l'ambassadeur, citant la réunion de Tamanrasset l'année dernière et une autre réunion prévue à Alger qui regroupera les Etats de la région. Interrogé sur le paiement de rançon – un moyen pour renflouer les caisses des terroristes–, M. Xavier Driencourt affirme que son pays n'a pas payé de rançon. “Nous n'avons pas payé de rançon”, a-t-il insisté, indiquant que l'Algérie, préoccupée par ce phénomène, a déposé un projet de loi criminalisant le versement des rançons aux terroristes, à l'ONU. Questionné si la France soutient l'initiative algérienne, le diplomate français a répondu que son pays “est intéressé par le principe, mais on n'est pas d'accord sur toutes les modalités”.