Des enquêtes sont en cours pour situer les responsabilités. Les agences, qui ont failli à leur mission et violé les clauses du cahier des charges, ne seront plus autorisées à prendre part à l'opération omra. Celles qui ont commis de graves dépassements seront traduites en justice. Certains pèlerins sont toujours bloqués à Djeddah car les avions n'ont toujours pas eu l'autorisation de décoller. Catastrophique est le moins que l'on puisse dire du bilan de la omra 2010. Normal, diront certains, puisque c'est l'éternelle rengaine. Depuis de longues années déjà, la saison du hadj et de la omra est devenue synonyme d'innombrables problèmes, lacunes et insuffisances, voire de scandales. Mais cette fois, le cauchemar de nombreux pèlerins est en passe d'être épargné aux futurs candidats aux Lieux saints. La raison ? Le premier responsable de l'Office national du hadj et de la omra est décidé à assainir l'opération et à la débarrasser à jamais des “parasites” qui en font leur fonds de commerce. En effet, en écoutant Cheikh Berbera révéler avec amertume et regret toutes les failles et autres escroqueries qui ont entaché la dernière saison de la omra, on se rend compte qu'il existe une véritable mafia du pèlerinage. Il y a même une famille qui pratique “ce commerce” de père en fils depuis près d'une vingtaine d'années en se cachant derrière des agences de voyages qui les aident à parvenir à leurs fins. Résultat : des pèlerins sont à ce jour bloqués à Djeddah en attendant que les autorités saoudiennes daignent délivrer les autorisations de décollage. Il faut savoir à ce propos que la politique du deux poids, deux mesures, appliquée par ces mêmes autorités, est pour beaucoup dans cette situation. Quinze agences sur 117 pointées du doigt Avec plus de 180 000 pèlerins depuis la fête de la naissance du Prophète jusqu'au mois de Ramadhan, l'Algérie s'est classée en tête de liste. Plus de 55 000 personnes ont accompli le rite de la omra pendant le mois de Ramadhan. C'est ce qu'a indiqué le directeur général de l'office lors du point de presse, organisé jeudi dernier, par l'Office national du hadj et de la omra. Et d'ajouter que pas moins de 117 agences de voyages ont été agréées et autorisées à prendre part à l'opération dont 53 au centre du pays, 36 à l'Ouest, 21 à l'Est et 7 au Sud. Répondre aux clauses d'un cahier des charges est la condition sine qua non pour la délivrance de l'agrément tant convoité. Or, il se trouve que même si certaines agences répondent à la lettre aux cahiers des charges et s'engagent à respecter ses dispositions sur le terrain, c'est loin d'être le cas. D'innombrables lacunes et insuffisances sont relevées par l'office. Entre les engagements écrits noir sur blanc en Algérie et les conditions de séjour en Arabie Saoudite, un grand fossé se creuse dont les victimes sont souvent des personnes âgées. En effet, selon le directeur général de l'office, qui a suivi sur le terrain en compagnie du consul général d'Algérie en Arabie Saoudite, le rite de la omra 2010, le bilan pas du tout reluisant du séjour ne s'applique pas à toutes les agences. “Pour être juste, je dirai que certaines agences ont accompli leur mission convenablement. Elles ont fait du bon boulot et sont allées jusqu'à financer de leur propre budget des prestations de leurs clients. Je ne sais pas si c'est du professionnalisme ou la crainte de Dieu. Ces agences doivent être encouragées et soutenues.” D'autres ont réussi “à 50 ou 60%”. Mais certaines ont largement failli à leur mission. “Et c'est ce que j'ai constaté de visu”, note M. Cheikh. Que leur reproche-t-on ? La liste des griefs semble très longue mais le conférencier n'en citera que quelques-uns en précisant : “Là-bas, c'est un autre monde.” Selon lui, le pèlerin est, selon toute vraisemblance, “une marchandise et un simple fonds de commerce. Son sort leur importe peu ou pas du tout. La seule chose qui les intéresse est le gain. Un gain facile”. En témoigne le sort qu'ils réservent à leurs clients dès qu'ils foulent le sol de l'aéroport de Djeddah. Des pèlerins égarés sans hébergement et sans billet de retour “Cette année, nous avons enregistré un nombre important de personnes qui se sont égarées car livrées à elles-mêmes. Nous avons battu tous les records”, regrette le conférencier. Certains pèlerins avaient fait le voyage via une agence par l'intermédiaire d'un rabatteur qui a touché 5 000 DA pour chacun, outre le pourcentage payé par l'agence. Ils se sont retrouvés seuls et livrés à eux-mêmes sans le badge portant leurs renseignements. Il faut savoir que des personnes qui n'ont ni agence ni aucune relation avec les voyages se cachent derrière des agences pour se faire de l'argent en arnaquant de pauvres candidats à la omra. D'autres part, certaines agences n'ont même pas pris la peine de louer des sites d'hébergement et de prendre des billets de retour. D'autres ont opté pour le départ via d'autres pays tels le Maroc, la Tunisie et l'Egypte. Pis encore, des agences n'ont pas trouvé mieux que de prendre la route vers les Lieux saints, alors que c'est strictement interdit. “Dans quel état arrive une personne âgée qui fait le voyage Khenchela-Arabie Saoudite par route ?” s'interroge le conférencier. Certains candidats à la omra sont arnaqués par des agences qui leur font payer les yeux de la tête en Algérie, et une fois là-bas ils n'ont pas droit aux prestations qu'ils ont pourtant payées rubis sur l'ongle. C'est le cas notamment pour l'hébergement. Et à propos d'hébergement, certaines agences n'ont “offert” à leurs clients que des baraques situées à deux kilomètres des Lieux saints et ils n'ont même pas eu l'occasion d'accomplir les rites de la omra. Selon le directeur général de l'office, des enquêtes et autres investigations ont été lancées. Sur les 117 agences agréées cette année plus d'une quinzaine sont pointées du doigts. “Certaines seront poursuivies en justice et d'autres n'auront plus d'agrément pour l'opération omra.” La fausse promesse de “deux en un” des agences Certaines agences, dont le gain facile est le seul souci, vont jusqu'à promettre aux pèlerins, qui en paient le prix évidemment, de leur donner la possibilité de rester sur les Lieux saints après l'accomplissement du rite de la omra jusqu'au hadj. Ce qui est loin d'être possible puisque, une fois la omra achevée, les autorités saoudiennes vont jusqu'à poursuivre en justice les Algériens qui ne rentrent pas sous prétexte qu'ils ont payé pour accomplir le rite du hadj. De même que les agences responsables. Le ministre du Tourisme saisi “Il faut que toutes ces pratiques cessent à jamais. Je m'engage tant que je suis à ce poste d'y veiller personnellement et libre à ceux qui veulent me critiquer”, fulmine Cheikh Berbara. Et de révéler que le département du Tourisme a été saisi dans ce sens pour “mettre fin à ces parasites”. Une réunion devait avoir lieu entre le ministre du Tourisme et le directeur général de l'office.