Ce n'est pas demain que l'Algérie verra le bout du tunnel. Malheureusement, c'est la première leçon qui ressort de la première journée des 4es assises de l'intelligence économique et de la veille stratégique, ouvertes hier matin à l'hôtel Sofitel d'Alger. Sur les 200 participants attendus pour assister à ce rendez-vous, il n'y avait sur place qu'une quarantaine de personnes. Pourtant, le sujet et la qualité des conférenciers devaient logiquement susciter beaucoup plus d'attention et surtout de respect. Parmi les invités à donner des conférences, l'on peut citer, par exemple, Jean-Marie Leclerc, directeur général du Centre des technologies de l'information (CTI) de Genève, ou encore le docteur Pierre Rossel, de l'EPFL (Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne). Pourquoi donc autant de places vides dans la salle ? La réponse est l'image même de l'inintelligence managériale. Certains représentants du nouveau ministère de l'Industrie, de la Petite et Moyenne entreprise et de la Promotion de l'investissement, ainsi que des SGP (sociétés de gestion des participations de l'Etat), présents sur place, affirment qu'ils n'ont eu connaissance de ces assises que quelques jours avec les fêtes de l'Aïd. Du côté des organisateurs, en l'occurrence Vip Groupe, “ce rendez-vous a été annoncé depuis déjà trois mois”. À qui la faute ? Il est également important de noter qu'il n'y avait ni ministre ni autre officiel parmi les invités pour voir les “autres” accourir. D'où l'absence de l'ENTV évidemment. Mais faut-il préciser que l'intelligence économique (IE) est loin d'être un sujet farfelu ? N'importe quel Etat qui se respecte aurait dû mettre le “paquet” pour profiter des conférences données hier et celles qui sont programmées pour aujourd'hui. L'Algérie encore plus que les autres. Les “déconvenues” enregistrées ces dernières années sont là pour le rappeler à tous ceux qui en doutent. L'accord d'association avec l'Union européenne, l'OMC, la vente de Lafarge, les scandales de Sonatrach, de l'autoroute Est-Ouest, ou encore l'affaire “Stratégica”, en sont l'illustration. La meilleure preuve reste ce qui s'est passé avec Djezzy. Voilà une entreprise de droit algérien qui a été vendue à des Russes sur le dos de l'Etat qui s'est retrouvé contraint de courir derrière une transaction ficelée et conclue sans qu'il n'ait pu avoir le moindre droit de regard ! C'est dans ces situations que les “bienfaits” de l'intelligence économique deviennent plus perceptibles. Mieux encore, les interventions de quelques responsables du MIPI ont particulièrement démontré que le futur, proche et lointain, ne sera pas différent d'hier et d'aujourd'hui. Qu'ont appris les présents sur les travaux et les projets du ministère pour l'IE à laquelle tout un département est consacré ? Juste qu'il y aura “nous espérons, avant le début de l'année 2011, les premiers états généraux de l'intelligence économique et de la veille stratégique”, et qu'au moins 50 entreprises auront des cellules de veille “avant la fin 2010”. À cela, il faut ajouter que toutes les phrases qu'ils ont prononcées étaient conjuguées au futur : “Nous allons faire”, “nous préparons”, etc. Devant ces “inactions” made in DZ, il y avait heureusement des compétences et pas seulement étrangères. Des Algériens capables d'apporter un plus étaient là, malgré tout. On peut en citer au moins deux qui ont donné des conférences hier. Le premier est le Dr Faouzi Bensebaa, professeur des Universités de Reims avec deux interventions, “Les enjeux de l'IE : une question de plus en plus d'actualité pour l'Algérie ?” et “Le système d'innovation et la politique technologique japonaise”. L'autre était le jeune Anys Boukli, directeur Sword Suisse sur le thème “intelligence économique : approche stratégique et prospective d'utilisation et technologie de l'information au service de la connaissance structurée”. Vraissemblablement, il faut craindre que pour beaucoup de décideurs de chez nous, l'IE ne soit encore qu'une priorité… de seconde zone.