“Il n'y a aucun problème aujourd'hui pour éradiquer l'informel pour peu qu'il y ait un débat national sur comment y procéder”, a indiqué jeudi le patron du groupe Cevital en marge d'une rencontre sur la performance de la distribution et du service après-vente, organisée par le cabinet Ernst &Young, à l'hôtel Hilton d'Alger. Selon Issad Rebrab, les grossistes et les distributeurs sont prêts à sortir de l'informel et intégrer le marché formel, “mais il faut leur donner une marge qui leur permet de payer leurs impôts, de vivre et de déclarer leurs employés”. “Comment voulez-vous que quelqu'un sorte de l'informel si vous lui donnez une marge de 1% ou 1,5% et vous lui demandez de payer la TAP de 2% ?” s'interroge le patron de Cevital. “Il est certain qu'ils resteront dans l'informel”, a-t-il estimé, en rappelant que certains de ses confrères lui ont reproché de baisser les prix pour donner plus de marge aux réseaux de distribution pour qu'ils rentrent dans le formel. “Ils ont proposé de donner 10 DA le kilo de sucre à toute la chaîne de distribution, grossistes, demi-grossistes et détaillants. J'ai dit qu'il était impossible de faire fonctionner le circuit commercial avec une telle marge. Ils ne pourront même pas payer leurs impôts. Donc on pousse les gens à aller dans l'informel. Il faut donner des marges correctes aux gens pour qu'ils puissent travailler normalement”, a indiqué M. Issad Rebrab. Le président du conseil d'administration du groupe Cevital estime qu'il est certain, aujourd'hui, que le poids des impôts pèse sur les entreprises et les sociétés qui déclarent la totalité de leur chiffre d'affaires et leurs résultats. Les grandes distributions sont transparentes, elles payent leurs impôts, elles sont dans le formel. “C'est certain que si on développe la grande distribution on va éliminer une bonne partie de l'informel, mais faut-il trouver des terrains”, souligne le patron de Cevital, révélant que les pouvoirs publics veulent plafonner les marges bénéficiaires des producteurs à 7%. “Ils m'ont posé la question. J'ai dit comme mes confrères décident, il n'y a aucun problème, mais ne permettez pas de “plafonner”. Parce que nous, aujourd'hui, au prix où on a acheté la matière première il y a quelque temps, nous avons une marge de 15%, mais nos confrères perdent de l'argent. Alors si on m'oblige à appliquer 7%, ils ne pourront jamais vendre. Ils risquent de disparaître. Il faut plutôt donner une marge minimale de 7% à mes confrères. Mais moi, si je suis plus efficace à gagner plus tout en respectant la concurrence et les prix, pourquoi nous reprocher d'être efficaces ?” explique Issad Rebrab, insistant sur le fait que son groupe ne détient aucun monopole. “Nous n'avons aucun monopole”, a-t-il insisté, précisant qu'un monopole se définit comme une entreprise qui détient l'exclusivité soit de produire quelque chose, soit le distribuer légalement. Ce qui n'est pas le cas de Cevital. “Il est vrai que nous avons une position dominante. Et on en est fiers”, indique M. Rebrab, précisant que ce n'est pas seulement en Algérie que des entreprises ont des positions dominantes. Il cite l'exemple, de l'ONA, Lesieur Cristal au Maroc qui contrôle 65 % du marché. “Ils ne lui ont pas dit pourquoi vous avez le monopole”. En Grande-Bretagne, il n'y a que Titan Line dans le sucre. En Europe, il existe trois grands producteurs. En Algérie, il y a un leader et trois petits producteurs. Pour le patron de Cevital, seules les grandes entreprises, de taille internationale sont à même de défendre le marché local et tirer l'économie nationale vers le haut. “Soit qu'il y ait des entreprises algériennes qui défendent le marché et l'économie algérienne. Sinon les multinationales vont venir et prendre le marché. Que veut-on ? On veut laisser les multinationales et les étrangers prendre ce marché, ou bien encourager les champions nationaux qui peuvent non seulement défendre le marché national, créer des emplois mais aussi se bagarrer sur le marché international”, souligne le patron de Cevital, précisant que “sans la taille critique, un management adéquat, les choix technologiques du projet et la formation, vous ne pouvez pas vous battre sur le marché international”. “Et si vous n'avez pas la capacité de vous battre sur le marché international on viendra prendre votre marché. Aujourd'hui, au niveau de l'économie mondiale il n'y a plus de place pour les plus faibles”, a ajouté le patron de Cevital. Du coup, les pouvoirs publics devraient plutôt encourager les grandes entreprises algériennes qui vont défendre l'économie nationale, plutôt que de donner des primes aux importateurs. Issad Rebrab indique que Cevital “produit du sucre de qualité supérieure à des prix compétitifs sur le plan international”. C'est pour cela que le groupe est compétitif dans 28 pays. “Nous avons exporté l'an dernier pour 300 millions de dollars et cette année nous comptons doubler la mise. Nous tablons sur 600 ou 800 millions de dollars d'exportations”. Interrogé si le groupe est à jour sur ses obligations fiscales, le patron de Cevital a indiqué que “si vous comptez tout, c'est-à-dire les droits de douane, la TVA, la TAP, l'impôt sur les bénéfices, l'IRG…nous avons un minimum, aujourd'hui, de plus de 40 milliards de dinars. Plus de 400 millions d'euros. Je pense qu'on doit être entre 40 et 50 milliards de dinars”.