Dans le tumulte des opinions arabes, aucun gouvernement occidental n'a osé poser la question de savoir pourquoi cette contagion “démocra-tique” s'arrête aux portes des monarchies. Est-ce à dire que les Arabes ne sont gouvernables que par les dynasties familiales ? À qui le tour ? Alors que l'Egypte de Moubarak négocie un virage décisif, rares sont les prévisionnistes politiques occidentaux qui s'aventurent à critiquer les monarchies arabes. Comme si la démocratie était soluble dans un trône. Pas un mot sur les rois du golfe persique, dont les violations des droits de l'Homme et la puissance despotique écrasent leurs sujets comme des punaises. Pas une syllabe sur “Notre Ami le Roi” d'un Maroc qui gronde. Pas un murmure sur la monarchie-cathodique du Qatar qui souffle sur la braise à travers Al Jazeera. Pour l'Occident, il semblerait que la démocratie à la carte est une politique qui doit épargner les monarchies, fidèles alliées des Etats-Unis. Et pourtant, ces monarchies remplissent, au-delà du raisonnable, les critères d'une dictature théologique. Dans ces monarchies, contester ou protester équivaut à mettre en doute la sacralité des rois et des princes. L'opposition est une chimère. Les femmes n'ont pas droit de cité. Le parlement est un joujou aux mains du Palais. Quant à la presse, elle est juste bonne pour louer les œuvres caritatives des familles royales. Mais, dans le tumulte des opinions arabes, aucun gouvernement occidental n'a osé poser la question de savoir pourquoi cette contagion “démocratique” s'arrête aux portes des monarchies. Est-ce à dire que les Arabes ne sont gouvernables que par les dynasties familiales ? On empêche le fils Moubarak de prendre le pouvoir. Ce qui est une excellente chose. Mais on reçoit les princes saoudiens à Washington ou à Paris par le seul fait qu'ils seront un jour les successeurs et les futurs interlocuteurs. N'abordons pas le registre délicat des fortunes royales arabes qui dorment dans les banques américaines et européennes et le train de vie indécent des princes et des princesses du golfe persique ou du Maroc. L'influence de la reine du Qatar, Sheikha Mozah, ferait pâlir d'envie les coiffeuses tunisiennes et l'obsession maladive d'Al Jazeera de déloger Moubarak dissimule mal les ambitions de Doha de devenir le pivot de la politique américaine et israélienne au Moyen-Orient. Quant à nous, il faudra certainement revoir notre copie. Une chercheuse du CNRS avait osé dire : “pour les monarchies arabes, c'est différent. Elles sont légitimes !” Alors, pourquoi s'obstiner dans le suffrage universel, la démocratie parlementaire ou le pluralisme. Faisons appel aux descendants des deys d'Alger ou, encore mieux, aux arrière-petits-fils de l'émir Abdelkader.