Les spécialistes de l'environnement et de la biodiversité tirent la sonnette d'alarme sur les conséquences désastreuses que subissent les zones humides en Algérie, d'où la nécessité d'une refondation de l'état et de la gestion durable des écosystèmes humides. Pour preuve, les spécialistes en la matière, qui se sont réunis hier à Oran au Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc), ont fait part de leurs préoccupations. “Il y a lieu de prendre des décisions drastiques allant jusqu'à l'emprisonnement à l'encontre des réfractaires si nous voulons sauver notre écosystème de la déperdition”, a averti Saci Balgat, de l'université de Mostaganem. Ce dernier ne manquera pas de souligner la perdition de 140 000 hectares de terres arables de la Mitidja. Un chiffre qui donne le tournis avec, en prime, une autre catastrophe sur le tissu végétal de la plaine qui verra la disparition de 50 000 autres hectares à l'horizon 2025. Selon l'intervenant, les répercussions néfastes sur les zones humides sont liées à la prolifération des décharges sauvages, au déversement des eaux usées directement dans les écosystèmes humides, au pompage effréné des eaux d'irrigation ainsi qu'à l'extension du tissu humide au profit de l'urbanisation anarchique. Seule une stratégie nationale contenue dans le Plan national pour le développement rural intégré (Ppdri) à la lumière d'un affermissement des textes de loi déjà existants pourrait ralentir la catastrophe écologique. C'est l'absence d'une politique réfléchie qui a fait perdre à l'Algérie plus de 21% des terres agricoles qui sont actuellement affectées. L'Algérie dispose d'un potentiel en zones humides substantielles où il est dénombré 254 zones humides naturelles, dont 60 sont d'importance internationale. Ces zones humides qui couvrent un peu plus de trois millions d'hectares comptent plus de 800 espèces végétales limniques, 34 espèces de poissons et 50 espèces d'oiseaux. En dépit des assurances données par les pouvoirs publics, il n'empêche que la mauvaise gouvernance écologique, ajoutée à une politique pour la protection du littoral, fait redouter le pire. “La salinisation des chotts occasionne une perte annuelle de l'ordre de 1,3% du PIB, alors que le recul des rivages a enregistré 0,3 mètre en 1959 contre 1,4 mètres en 1997”, a indiqué le conférencier. Il rappelle que sur 42 zones humides, seule El-Kala est classée réserve biosphère (UNESCO) dotée d'outils de gestion et de développement durables, mais qui a été malheureusement réduite à sa portion congrue.