Comme il fallait s'y attendre, Israël ne pouvait laisser son allié, Hosni Moubarak, seul dans la tourmente. Des proches de Benyamin Netanyahu, le Premier ministre israélien, ont violemment critiqué la position de Washington, qu'ils assimilent à un véritable “lâchage” du raïs égyptien. Le soutien apporté par les Etats-Unis à la contestation populaire contre le président égyptien Hosni Moubarak semble irriter au plus haut point les dirigeants de l'Etat hébreu, qui n'hésitent pas à accuser l'administration de “lâchage” de ce “fidèle allié”. En effet, l'attitude des Américains vis-à-vis du raïs est sévèrement jugée en Israël, où le gouvernement de Benjamin Netanyahu, qui s'était abstenu de fustiger publiquement la position américaine, pour ne pas envenimer les relations avec Barack Obama, a fini par excéder les responsables israéliens. L'un d'entre eux dit, sous le couvert de l'anonymat : “On a l'impression que Washington était très pressé de balancer par-dessus bord le président égyptien Hosni Moubarak dès qu'il est devenu un allié encombrant.” Il ajoute : “S'il est vrai qu'au cours des derniers jours, la position américaine est devenue plus nuancée, elle n'en revient pas moins à un lâchage. Ce qui est très inquiétant.” Poursuivant dans le même ordre d'idées, il souligne que “la fidélité est une valeur inestimable, particulièrement au Proche-Orient”, en faisant allusion au comportement de Hosni Moubarak durant ses trois décennies au pouvoir, au cours desquelles il n'aura guère posé de problèmes à l'Etat hébreu. Il justifie l'inquiétude israélienne en estimant qu'au-delà des critiques “à l'égard du régime autocratique” de M. Moubarak, son prompt abandon par Washington risquait de miner la crédibilité de la politique étrangère américaine. Le responsable israélien relève “la confusion et l'incohérence des positions américaines” en référence aux déclarations de soutien à Moubarak de l'émissaire du président américain en Egypte, Frank Wisner, avec lequel l'administration américaine a aussitôt pris ses distances. Ces déclarations traduisent la crainte d'Israël de l'émergence d'un pouvoir islamiste au Caire qui menace le traité de paix avec son voisin et bouleverse la donne stratégique régionale. Par ailleurs, Dori Gold, ancien ambassadeur d'Israël à l'ONU et proche du Premier ministre, a reproché dans la presse au président Obama de commettre la même “erreur” que Jimmy Carter en 1979 face à la Révolution iranienne, en refusant de soutenir un régime en place au nom de la démocratie. Plus sévère, Eytan Gilboa, professeur de sciences politiques à l'université Bar Ilan, près de Tel-Aviv, dit que Washington a “planté un couteau dans le dos de son allié” égyptien alors qu'il “pouvait le critiquer de façon plus discrète”. Le quotidien à grand tirage Yediot Aharonot verse dans le même sens en affirmant : “Tout un chacun comprend que Moubarak doit partir. Mais nous pouvions nous attendre à ce que Washington n'abandonne pas un homme qui depuis des décennies était son meilleur appui, un véritable barrage contre l'islamisme.” Il s'interroge sur les conclusions que tireront les autres alliés des Etats-Unis dans la région en voyant les Américains se conduire “de la sorte vis-à-vis du régime égyptien”. Ainsi, le maintien du statu quo en Egypte apparaît à une majorité d'Israéliens comme le meilleur moyen de préserver le traité de paix signé en 1979 par le prédécesseur de Moubarak, Anouar El-Sadate, qui devait le payer de sa vie, victime deux ans plus tard d'un attentat islamiste. Cela étant, 59% des Israéliens sont persuadés qu'un “régime islamiste” va succéder au président Moubarak, contre 21% qui s'attendent à un “régime laïc démocratique”. Deux Israéliens sur trois estiment qu'une chute du régime Moubarak aura des conséquences négatives pour Israël.