Neuf familles du quartier Galoul, dans la commune de Bordj El-Bahri, sont, depuis avant-hier, à la rue. Les habitations de fortune qui leur servaient de toit ont été rasées par l'APC, pour le motif qu'il s'agit de constructions illicites érigées sur un terrain devant servir d'assiette à un projet de 300 logements de l'entreprise Batigec, promotion immobilière. Hier, le terrain boueux présentait encore les stigmates de l'opération de démolition. Un petit groupe d'anciens occupants des lieux saisit l'occasion de notre présence pour nous raconter le cauchemar vécu la veille, lorsque des élus accompagnés des forces de l'ordre étaient venus pour exécuter l'opération. “Ce n'est pas humain de nous jeter à la rue par un temps pareil. Nous ne sommes pas des envahisseurs venus d'ailleurs. Cela fait des générations que nous habitons cette commune. Nous avons même des décisions d'attribution de terrains datant des années 90, et nos demandes de logements sociaux sont depuis des décennies restées sans réponse. Aucun élu ne s'est inquiété de nos conditions de vie déplorables. Les policiers ne sont pas allés avec le dos de la cuillère avec nous. Ils ont même utilisé des pistolets à décharge électrique (Taser)”, déplore Farid, l'un des blessés lors de l'accrochage avec les forces de l'ordre. Pour en savoir plus, nous nous dirigeons vers le siège de l'APC où un rassemblement de protestataires grossissait de plus en plus. En déclinant notre profession, les langues se délient pour accuser l'APC d'être responsable de tous les maux. Ils sont issus de plusieurs quartiers ayant fait l'objet de démolitions. Il faut savoir que l'opération a touché trois endroits de la commune. Le logement est le leitmotiv de ces citoyens dont certains confient avoir attendu des dizaines d'années avant de se jeter à l'eau. “Où sont passées mes demandes de logement”, crie l'un d'eux, marié et avec deux enfants. “Même le LSP ne nous est pas permis. Pourtant je peux payer la première tranche. Un projet de 1 000 logements est implanté dans la commune, mais c'est pour les autres”, soulève son voisin. Nous demandons à voir le maire qui accepte de nous recevoir en présence des représentants du mouvement de protestation. L'élu lève les équivoques quant aux déclarations des citoyens en rappelant que les familles qui sont venues s'installer sur les lieux ont été averties de ne pas tenter l'aventure dans la mesure où le terrain ciblé a été affecté à un projet de construction de logements. “Le phénomène de squat de terrain a commencé avec la manifestation populaire de janvier dernier. Certains citoyens ont bravé la réglementation pour construire des habitations sur un projet d'utilité publique. Ils savaient bien qu'un jour ils finiraient par y être délogés par la force de la loi”, dira l'élu. Aux représentants des familles concernées, il expliquera que “la question du logement sera discutée avec le wali délégué lors d'un rendez-vous demandé et auquel seront conviés deux représentants de chaque quartier”. Le P/APC revient sur le volet habitat dans la commune déclarant que “la municipalité est pauvre et que son budget ne lui permet même pas d'assurer les salaires de ses employés”. En matière de logement, il a affirmé que depuis l'indépendance, la commune n'a bénéficié que de 100 logements sociaux attribués entre 2002 et 2004, ce qui est insignifiant. Concernant la formule LSP, un quota de 300 logements a été attribué en 2007, soit avant l'arrivée de l'actuelle assemblée. Au chapitre du foncier, les choses ne sont guère reluisantes puisque le maire a clairement dit qu'il n'y a plus d'assiette de terrain. La commune ne dispose même pas de lieu de sépulture. Le P/APC, qui dresse un tableau noir sur la situation économique de la commune, termine par une note d'espoir en faisant savoir que le wali d'Alger et le wali délégué de Dar El-Beïda réservent à partir des projets d'habitat, un quota important à la commune. “Depuis une année, nous avons réussi à arracher 500 logements de type LSP”, conclut-il.