En appelant à de nouvelles manifestations pour le 20 mars prochain, les jeunes Marocains, qui se sont rassemblés dimanche à Rabat, Casablanca, Tanger, Fès, Marrakech, El Jadida, Agadir et Tétouan montrent qu'ils ne baissent pas les bras et comptent demander plus de démocratie et de dignité. Guère satisfaits des réponses du roi Mohammed VI et de son gouvernement, les jeunes Marocains, qui étaient à l'origine des marches du 20 février dernier dans la majorité des villes du royaume suite à leurs appels sur le réseau Facebook, reviennent à la charge comme l'indiquent leurs rassemblements ce dimanche. Les manifestants répondaient à un appel lancé via Facebook, soutenu par des militants de défense des droits de l'homme. En effet, de nombreux rassemblements se sont tenus dans plusieurs villes marocaines pour exiger des réformes politiques de fond et maintenir la mobilisation autour des revendications lancées par les jeunes du mouvement du “20 Février”. Ils interviennent à deux semaines des marches prévues le 20 mars dans l'ensemble du pays pour exiger une nouvelle constitution, la démission du gouvernement et la dissolution du Parlement et une vie dans la dignité. Rabat, Casablanca, Tanger, Fès, Marrakech, El Jadida, Agadir et Tétouan ont donc vu des centaines de jeunes se rassembler pacifiquement. Dans la capitale du royaume, elles étaient 500 personnes à se réunir au centre-ville, en utilisant le chant, la danse, la poésie, les applaudissements et les youyous de femmes afin d'attirer le plus grand nombre de Marocains dans leur mouvement. Les participants scandaient “La véritable alternative c'est une Constitution populaire et démocratique”, “Le peuple veut une nouvelle Constitution”, “Nous refusons tous la Constitution du Makhzen”, “Gouvernement dégage”. La police est intervenue pour agresser l'un des animateurs du mouvement, Oussama El-Khlifi et également pour interdire l'utilisation de la sonorisation, introduite à la fin de ce sit-in qui s'est tenu près du Parlement. Dans une déclaration à l'APS, un des militants, Mohamed el Moussayer, a indiqué que des arrestations ont eu lieu à Tanger, Agadir et Tétouan sans indiquer le nombre. Il a souligné qu'à l'exception de Casablanca, où pas moins de 1 500 personnes se sont rassemblées pacifiquement à la place Mohammed V pour réitérer les slogans en faveur de réformes politiques et à caractère socioéconomiques, et El Jadida les autres rassemblements ont été dispersés par les forces de l'ordre. Dans la capitale économique du Maroc, les manifestants portaient des pancartes avec les mots “Dignité”, “Justice sociale”, “Non au cumul du pouvoir et de la fortune”. Dans la foule se trouvaient de nombreux membres de l'important mouvement islamiste Justice et Bienfaisance, une organisation non reconnue mais tolérée, qui a récemment appelé à un “changement démocratique urgent” au Maroc. Ceci étant, le même mouvement a appelé à une nouvelle journée nationale de manifestations le 20 mars pour réclamer “plus de démocratie” et une nouvelle Constitution qui limite les pouvoirs du roi. Après les manifestations du 20 février, le pouvoir marocain avait affirmé avoir “saisi le message”, à l'instar du roi Mohammed VI, qui avait assuré lors d'une rencontre la semaine dernière avec des délégués syndicaux, que des réformes seraient mises en œuvre. Mais ni le contenu ni le calendrier de ces réformes n'ont été annoncés. Ainsi, portés par les révoltes qui secouent le monde arabe, et soutenus par des hommes d'affaires et des défenseurs des droits de l'homme, les jeunes Marocains à l'origine des manifestations de février espèrent mobiliser à nouveau le 20 mars pour réclamer plus de démocratie. Après un sit-in de dimanche à Rabat, le prochain rendez-vous national est fixé au 20 mars par la coordination qui revendique plus de 30 000 sympathisants sur le réseau social. “Maintenant, les gens savent qui nous sommes. On peut dire qu'il y a un avant et un après 20 février”, assure Oussama El Khlifi, un chômeur de 23 ans qui a lancé le mouvement avec une poignée d'autres jeunes. “Je veux être un citoyen, pas un sujet. Nous voulons une nouvelle Constitution qui nous assure la dignité”, ajoute-t-il. Le message vise en premier lieu le Makhzen, le puissant appareil d'Etat, et réclame une limitation des pouvoirs très étendus du roi, mais sans remettre en cause la légitimité de la monarchie qui reste très populaire au Maroc. Les revendications, multiformes, portent aussi sur l'indépendance de la justice, la corruption, les droits de l'homme, l'emploi, le social. Elles font écho aux inégalités toujours profondes au Maroc en dépit des réformes promises par le roi Mohammed VI après son accession au trône en 1999. Des hommes d'affaires, pour certains proches de la monarchie, des intellectuels, des défenseurs des droits de l'homme soutiennent le mouvement, de même qu'un important parti de la coalition gouvernementale, l'Union socialiste des forces populaires (USFP). Le puissant mouvement islamiste Justice et Bienfaisance a réclamé “un changement démocratique urgent” au Maroc. “Le mur de la peur est tombé, la parole est libérée, les gens n'ont plus la même appréhension”, affirme Karim Tazi, un chef d'entreprise de Casablanca rangé du côté des manifestants.