Devant le grand public qui s'est déplacé en masse, la représentation Moustanqaâ Dhiêb (le marais des loups) mise en scène par Fouzi Ben Brahim est une tragicomédie de Frank Dürrenmatt qui n'a pas fait l'unanimité. Si certaines opinions la trouvent “acceptable”, d'autres avis sont plus sévères et jugent qu'elle manque de créativité, elle est sans conviction, sans message et même trop maniérée. La pièce n'a pas réuni les spectateurs et les comédiens. Moustanqaâ Dhiêb raconte l'histoire d'une banque où l'on élimine plus qu'on ne thésaurise. Le tout pour un drame assassin qui verra Frank dégommer tous ses alliés et clients, au fil d'une apologie ironique du profit, que racontent les dix comédiens du Théâtre régional de Batna. Une satire des milieux financiers où règnent burlesque et exagération. Ne pas conclure d'affaires honnêtes et ne jamais rendre d'argent, tels sont les deux principes sur lesquels la Banque Frank base sa réputation ! Dans un arabe châtié, la pièce a perdu la complémentarité du grotesque et du sublime, qui prépare le drame, qui touche à l'humanité. Rappelant que les thèmes dans les pièces du Dürrenmatt sont l'identité, la folie et le crime. Des questions techniques ont fait l'objet de discussions. Quelle fonction le metteur en scène a-t-il attribuée aux costumes lorsque l'on sait que les costumes donnent du sens à l'interprétation ? Sont-ils porteurs de comiques, participent-ils à l'action : travestissements, échange d'identité ? Ont-ils une valeur symbolique ? Si les costumes ont une valeur symbolique (loups) comme a laissé entendre un comédien, alors dans ce cas, il faudrait les refaire. L'essentiel les costumes de la pièce ne permettent même pas la reconnaissance immédiate des personnages les plus représentatifs. Le décor ne donne pas aux spectateurs le référent spatial exact. La scène semble beaucoup plus se dérouler dans une pizzeria que dans une banque. Le metteur en scène ou le scénographe aurait trouvé une autre formule plus intelligente par exemple d'opter pour un espace vide. De même le jeu de certains comédiens devrait être amélioré. Le comédien devrait faire “rire avec” et non “contre lui”. Les grimaces et les gestes imprécis se sont faits remarquer immédiatement et ont fait rire les spectateurs mais aux dépens des comédiens. Le spectacle a parfois basculé dans le surjeu. La spontanéité se construit, l'improvisation s'élabore. Espérons que des rectificatifs... ou carrément des transformations soient apportées pour améliorer le spectacle et lui donner son piment au festival national professionnel de Théâtre d'Alger.