Nassim Lounès est un jeune Algérien dirigeant de la société Med&com (Agence de communication interactive algérienne spécialisée en webmarketing, e-marketing et régie publicitaire sur Internet) et directeur de publication de Ntic Magazine (Magazine des nouvelles technologies Ntic en Algérie, leader de la presse gratuite magazine algérienne). Après un premier cycle dans une grande école algérienne, il est allé compléter sa formation en marketing des services en France où il a pu se confronter à un univers compétitif, où la recherche de l'excellence est la règle. Carrière Algérie : Après des études en France, vous avez décidé de rentrer en Algérie. Pourquoi ? Nassim Lounès : Après une courte expérience dans un grand groupe français, j'ai choisi de rentrer en Algérie en 2006 pour réaliser mon rêve, celui de fonder une entreprise innovante dans mon pays. J'avais un projet et je ne voulais le réaliser nulle part ailleurs que dans mon pays, tout simplement parce que je savais que l'Algérie recelait le potentiel nécessaire pour sa réalisation. Je suis heureux de pouvoir dire aujourd'hui que mon intuition était la bonne. Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez dû faire face pour créer votre entreprise ? Les difficultés rencontrées ont été de deux ordres. Tout d'abord administratif : les démarches sont longues et compliquées, elles durent en moyenne plus de deux mois pour obtenir tous les documents requis. Elles sont également d'ordre financier : il n'existe pas de mécanismes de financement en dehors de l'Ansej qui reste un mécanisme lourd et retarde la concrétisation des projets. Tous nos fonds de départ ont été consacrés à l'avance des loyers, à l'achat du matériel de base, ainsi qu'aux premiers salaires. Pour ma part, je ne me suis versé aucun salaire pendant dix-huit mois, le temps que la société commence à faire quelques bénéfices. Vous êtes l'un des pionniers du marché de l'e-marketing en Algérie. Est-ce un avantage ou un inconvénient ? Arriver en premier sur ce créneau était sans doute un avantage. Cependant, notre réussite s'est surtout construite grâce à la différenciation : alors que la plupart des agences misaient sur la communication publicitaire dans les médias classiques, nous avons eu le flair d'aller vers les nouveaux médias. Notre réussite repose avant tout sur la formation et les ressources humaines. Nous avons cru en une équipe jeune et dynamique, animée et motivée pas seulement par la rémunération, mais également par les challenges relevés quotidiennement par l'entreprise. Actuellement, quelles sont les tendances du marché ? Le e-marketing, en général, et la publicité sur Internet, en particulier, connaissent un boom en Algérie. Ce média fait désormais partie intégrante des stratégies de la communication de la plupart des annonceurs algériens. Cela n'a pas été chose facile parce que nous avons eu à faire un gros travail de vulgarisation de ce média. Nous avons d'abord lancé plusieurs études sur le comportement de l'internaute algérien et de l'usage du média dans notre pays (webdialna). Par la suite, nous avons dû faire adapter les sites algériens aux standards internationaux afin de faciliter l'intégration d'espaces publicitaires et donner aux annonceurs une meilleure visibilité. Il a fallu, enfin, convaincre ces derniers de l'intérêt de la publicité sur Internet, qui présente de nombreux avantages, tels que l'interactivité, la mesurabilité, la capacité de ciblage, ainsi que les tarifs très concurrentiels par rapport aux autres médias. Internet est un élément important de la croissance des pays développés. Qu'en est-il pour l'Algérie ? Internet commence à se démocratiser au niveau des ménages et des entreprises. Cet outil permet un gain de productivité et d'efficacité qui est, bien sûr, incontestable, mais l'économie des TIC (technologies de l'information et de la communication), en général, et d'Internet, en particulier, ne connaissent pas pour le moment le développement escompté. Nous ne pourrons parler d'un apport considérable d'Internet qu'à partir du moment de la généralisation de son utilisation au sein des PME et des ménages, et de la mise en place du e-paiement qui permettra aux entreprises d'utiliser ce nouveau canal de commercialisation de leurs produits et services. Le point positif que nous constatons, cependant, est qu'aujourd'hui, il y a six millions d'internautes en Algérie, alors qu'ils n'étaient que trois millions il y a à peine trois ans. Quels sont les types de profils dont vous avez besoin dans une entreprise comme la vôtre ? Y a-t-il des formations qui préparent à ces métiers ? Les entreprises opérant dans les TIC génèrent de nouveaux métiers qui requièrent deux types de profils : dans les domaines du Web développement et du Web design, d'un côté, et dans le domaine du e-marketing, d'un autre côté. Ces profils sont rares, c'est pourquoi nous privilégions le recrutement de jeunes diplômés que nous formons aux métiers d'Internet et aux procédures de l'entreprise. Med&com recrute deux types de métiers : pour les développeurs, l'université algérienne forme chaque année des centaines d'ingénieurs et de techniciens capables d'intégrer des SSII et des Web agencies. Néanmoins, une mise à niveau des compétences est nécessaire pour être au fait des dernières technologies et des tendances du domaine. Par contre, le webdesign est une activité récente donc les rares profils sont plutôt autodidactes. Concernant les profils e-marketing, il n'y a pas de difficulté à trouver des marketeurs auprès des différents écoles et instituts tels que l'INC, l'ESC et l'Insim, nous les formons ensuite en interne aux métiers de l'Internet. Etant une start-up, avez-vous du mal à attirer de bons profils ? Quelle est votre stratégie RH ? Au début, nous avons eu du mal à attirer de bons profils parce que nous n'étions pas encore très connus, mais par la suite, nous n'avons rencontré aucun problème particulier. Ces problèmes ne sont pas spécifiques aux start-up mais se posent à toute entreprise qui démarre et qui n'a pas encore acquis de notoriété. Notre stratégie RH est fondée sur le recrutement de jeunes diplômés et la formation en interne, ainsi que la fidélisation de ceux-ci par un management participatif. Nous travaillons aussi à développer une culture d'entreprise, basée sur le partage d'une réelle passion pour les nouvelles technologies, de la recherche de l'excellence dans une ambiance décontractée favorisant l'échange et la créativité.