Ouattara, confiné dans un hôtel à Abidjan, dénonce qu'il y ait deux poids, deux mesures dans la mobilisation internationale, souhaitant en Côte d'Ivoire l'usage de la force internationale comme en Libye. Les forces soutenant le président ivoirien reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara ont lancé lundi une grande offensive militaire, de l'ouest à l'est du pays, quatre mois jour pour jour après le début d`une meurtrière crise postélectorale. Après leur progression dans l'ouest frontalier du Liberia depuis fin février, elles sont à Duékoué, la ville stratégique et porte d'entrée de la principale zone de production du cacao dont la Côte d'Ivoire est le premier producteur mondial. Cette contre-offensive intervient au moment où la situation humanitaire ne cesse de se dégrader avec, selon l'ONU, près d'un million de déplacés. Depuis le début de la crise, les violences ont déjà fait 462 morts, essentiellement des civils, selon l'ONU. Mais selon le camp Ouattara, le bilan est beaucoup plus lourd : au moins 832 morts. Le pays est en passe de renouer avec la guerre civile des années 2000. La ligne de front qui coupe depuis 2002 le pays, le nord étant contrôlé par les combattants pro-Ouattara (les Forces républicaines, nouvelle dénomination des forces pro-Ouattara, rassemblant les ex-rebelles des Forces nouvelles) et l'armée régulière soutenant Gbagbo, le président sortant déclaré vaincu par la communauté internationale à la présidentielle de l'automne dernier, est ravivée. Après avoir chassé les miliciens et mercenaires libériens pro-Gbagbo dans l'ouest, les Forces républicaines semblent être passées à la vitesse supérieure, se dirigeant vers la capitale. Aucune localité ne devrait être épargnée cette fois. En resserrant l'étau militaire autour l'ex-chef de l'Etat, Ouattara compte précipiter la désintégration de l'armée régulière dont beaucoup d'éléments ont rejoint les Forces nouvelles. Une issue pacifique paraît plus lointaine que jamais, Ouattara ayant récusé le haut représentant nommé par l'Union africaine, l'ex-ministre cap-verdien des Affaires étrangères José Brito, censé engager des négociations entre les parties. L'UA, comme à l'accoutumée va analyser cette impasse et décider quelle est la meilleure voie à suivre. Parallèlement à l'intensification de la contre-offensive des Forces nouvelles, marquée par un recul de ses forces, Gbagbo semble être revenu de sa position initiale. C'est lui qui s'active aujourd'hui en coulisses pour obtenir l'ouverture de discussions avec son rival reconnu par la communauté internationale, Alassane Ouattara. Les contacts sont pour l'heure informels. Des proches de Gbagbo ont pris langue avec des membres du camp Ouattara, dont le tonitruant Charles Blé Goudé, leader des Jeunes patriotes, qui a appelé le ministre de l'Intérieur de Ouattara, Hamed Bakayoko. Tous les messages de Gbagbo auraient la même teneur : ouverture de discussions directes entre Ivoiriens ! Selon des sources à Abidjan, Gbagbo chercherait à obtenir le soutien de certaines chancelleries à sa démarche. Un lobbying serait notamment en cours auprès de l'ambassade du Vatican. De deux choses l'une : ou Gbagbo est sincère alors pourquoi dans ce cas a-t-il rejeté les médiations de ses pairs africains, que ce soit au sein de l'UA ou dans celui de la Cédéao laquelle l'avait menacé de frappes militaires pour le chasser du pouvoir. Ou, futé qu'il est (il est surnommé le “boulanger” à Abidjan pour enfariner ses opposants et la communauté internationale), Gbagbo cherche à profiter de la conjoncture internationale marquée par le printemps arabe et des atermoiements de l'UA, pour engager Ouattara dans un processus qui traînerait encore en longueur. Si Gbagbo voulait envoyer un signal fort pour attester de sa bonne foi, il lui suffit de faire sienne la dernière décision de l'UA, a déclaré le président confiné dans son hôtel à un jet de pierre de la présidence. Gbagbo a tenu tête à l'UA et à la Cédéao grâce entre autres au soutien de l'Afrique du Sud.