La formation en Algérie a été, hier après-midi, l'objet d'attaques virulentes de plusieurs universitaires. Ces derniers s'étaient réunis au siège du CRSS (centre de recherche stratégique et sécuritaire) à Ben Aknoun, autour de Slimane Medhar. En débutant sa conférence sur une “approche critique du système de formation algérien”, le psychosociologue avait bien averti qu'il allait parler du sujet “en dehors des limites de la langue de bois”. Une précision qui ne pouvait surprendre que ceux qui ne le connaissent pas. Tout au long de son “réquisitoire”, Slimane Medhar s'est attelé à critiquer le système de formation en Algérie, insistant à chaque fois que ses analyses ont été obtenues par “des observations de terrain” et non à partir des bureaux. Il a ainsi exposé les données pour “signaler l'échec du système de formation” en se référant à plusieurs aspects. L'utilisation de la langue arabe et le plagiat des universitaires ont été deux “formes” à travers lesquelles il essayait de démontrer que “rien n'a été fait pour préparer le pays au XXIe siècle”. L'auteur du fameux la violence sociale en Algérie n'a pas hésité à utiliser plusieurs formules que nombreux qualifieront comme “hard”, mais que lui défend avec brio et arguments scientifiques à l'appui. Ainsi, Slimane Medhar affirme que “les Algériens sont passés de l'indigénat à l'indigence intellectuelle”, que “l'Algérien, d'une manière générale, n'est pas intelligent mais rusé”, ou encore qu'“intellectuellement les algériens ne sont pas structurés”. Des exemples, il en donnera beaucoup. Il citera celui du plagiat des universitaires qui “est en train de menacer l'avenir du pays”. Il donnera même le cas d'un enseignant qu'il avait eu dans les années 1960, qui aurait plagié. “on a pu le découvrir et j'avais demandé à ce qu'on le signale, mais personne n'a voulu et là on se retrouve en plus du plagiat avec la complicité du silence.” L'utilisation de la langue arabe en Algérie n'a pas échappé aux foudres du psychosociologue. Des “tares” sociologiques qui sont venues confirmer sa très sévère critique du système de formation algérien. L'auteur de tradition contre développement est revenu sur son “bébé”, qu'est le SST (Système social traditionnel). En analysant que “le mode de vie traditionnel s'accommode à l'analphabétisme”, Slimane Medhar affirmera que ni Ibn Khaldoun (1332-1406), ni Jacques Berque (1910-1995), n'ont fait attention au SST, ce qui est pour lui une grave erreur pour comprendre l'Algérien. Seul Mohamed Arkoun (1928-2010) aurait signalé ce système, “mais c'était en appendice” d'un de ces ouvrages. Ce système social traditionnel “se trouve dans toutes les familles” et à la forme d'“une éducation informelle”. D'ailleurs, il mettra en exergue la confrontation entre la famille et l'école qui aurait été à l'avantage de la première (la famille) au grand dam de “l'aspect humain du développement”. Un état des lieux qui poussera Slimane Medhar à dire : “nous sommes dans une impasse.” Une vision qui semblait être partagée par la majorité des présents. Toutefois, certains parmi eux ont essayé d'“éclaircir” le tableau noir établi par le psychosociologue. Le Dr Mhand Berkouk, président du CRSS, a donné l'exemple de la Malaisie, dont la langue officielle, le bahasa, est un mélange d'arabe, de perse et d'ourdou, “mais cela n'a pas empêché le pays de progresser” et d'avoir un système de formation efficient. De son côté, le colonel à la retraite, Noureddine Amrani, est revenu sur le cas des étudiants algériens qui ont réussi à l'étranger. La réaction de Slimane Medhar ne s'est pas fait attendre : “c'est juste des échappés, des aberrations sociales.” Salim KOUDIL