Les frappes aériennes de la coalition contre l'armée de Kadhafi, depuis le 19 mars dernier, n'ont toujours pas fait pencher la balance en faveur des forces de l'opposition, d'où le peu d'optimisme en Occident de voir le leader libyen renversé. Devant les développements que connaît la crise libyenne, soit un statu quo sur le champ de bataille, où les forces du colonel Kadhafi bloquent toute avancée de l'opposition, le général américain Carter Ham, commandant des forces américaines pour l'Afrique, a jugé peu probable que les rebelles libyens parviennent à lancer un assaut sur Tripoli pour renverser le pouvoir en place. En effet, en réponse aux questions des sénateurs américains, qui l'interrogeaient sur la possibilité que les insurgés puissent se frayer un chemin jusqu'à Tripoli et déloger le colonel Kadhafi, le général a répondu : “Je dirai qu'il y une faible probabilité” que cela se produise. Le général Ham a estimé que les frappes aériennes lancées par la coalition internationale le 19 mars avaient permis de “réduire de manière significative” la capacité du régime à viser les civils, à l'exception de Misrata, ville contrôlée par les rebelles, mais soumise aux assauts des forces loyales au régime. Le général a également indiqué que le colonel Kadhafi avait placé des troupes et des chars dans certaines parties de Misrata, rendant les frappes plus compliquées en raison de la présence de civils. Ce constat confirme l'inquiétude grandissante à Washington et dans les capitales européennes quant au risque d'un enlisement du conflit en raison d'un manque d'organisation des rebelles et du fait que le colonel Kadhafi contrôle la capitale. Quant à un éventuel déploiement de troupes au sol en cas de départ du colonel Kadhafi, le général Ham a affirmé redouter que la présence américaine entraîne de violentes réactions dans la région. “Il est possible qu'une telle éventualité soit envisagée. Mais d'un point de vue personnel, je ne pense pas qu'étant donné les circonstances dans la région, ce soit le meilleur moment de déployer des soldats américains”, a-t-il précisé. Pour rappel, le président Obama avait insisté sur le fait qu'il n'y aurait pas de soldats américains déployés sur le sol libyen au moment où il a donné, le 19 mars, son feu vert aux opérations militaires. Quant à la question d'armer les rebelles libyens, le général a précisé qu'il avait des informations selon lesquelles “des pays arabes avaient déjà commencé” à le faire, tout en jugeant qu'il fallait être prudent sur cette question afin d'éviter que des armes tombent entre les mains d'extrémistes. Par ailleurs, après que des avions de l'OTAN eurent bombardé des chars appartenant aux rebelles libyens dans la ville pétrolière de Brega, tuant deux éléments dans les rangs des rebelles libyens et un ou deux médecins, et fait 14 blessés et six disparus, selon les médias et des sources libyennes, l'OTAN a refusé hier de présenter ses excuses. Sur cette question, le commandent adjoint de l'opération “Protecteur unifié” de l'Otan dans ce pays, Russel Harding, a déclaré : “Il semble que deux de nos frappes hier aient pu provoquer la mort d'un certain nombre d'éléments du CNT qui opéraient avec des chars lourds.” “Mais je ne fais pas d'excuses”, a ajouté ce même responsable militaire de l'Otan. “La situation sur le terrain est, comme je l'ai mentionné, extrêmement mouvante et continue à l'être. Jusqu'à hier, nous n'étions pas informés que les forces du CNT faisaient usage de chars”, s'est-il justifié. Sur le terrain, les rebelles libyens contrôlaient toujours hier matin la ville d'Ajdabiya, au lendemain de la fuite de milliers de civils et rebelles à la suite de rumeurs sur une attaque imminente des troupes de Mouammar Kadhafi. Merzak Tigrine