Des rumeurs, certes, mais il n'y a pas de fumée sans feu. Israël et l'Arabie Saoudite auraient pris langue. Les deux pays sont en face de véritables poudrières qui, d'une façon ou d'une autre, bousculeraient leur équilibre et stabilité respectifs. Les Israéliens, qui ont perdu Moubarak et savent que la nouvelle Egypte ne gobera plus avec les facilités de naguère leurs couleuvres, se sentent menacés comme jamais. Le feu est à leurs portes. Des troubles qui s'étendent en Syrie où le régime d'Al-Assad semble perdre le contrôle. Une situation qui aura, quelle que soit son évolution, des conséquences sur le Liban, l'arrière-cour d'Israël qui préfère encore la routine du régime Al-Assad, d'autant que depuis près de 40 ans, le père puis le fils font respecter leur frontière commune. Plus au sud-est, la Jordanie est également contaminée par le Printemps arabe, mais où les islamistes, majoritaires en cas d'élections libres et transparentes, ne cachent pas leur volonté de dénoncer l'accord de paix avec Israël. Et voilà que le Hamas de Gaza reprend son offensive en ripostant aux agressions israéliennes par des tirs de roquettes. Pour Netanyahu, le grand gagnant de la reconstitution du puzzle dans la région est tout désigné : l'Iran. Et de rappeler au monde la menace d'Ahmadinejad de rayer le sionisme de la carte. Netanyahu ne le cache pas : il préfère des régimes dits forts qui garantissent une certaine stabilité favorable à Israël. Il a même fait un voyage à Moscou pour s'entretenir avec les dirigeants russes de la Syrie. Etrangement, l'Arabie saoudite voit les choses sous un prisme assez identique ! Le virus du Printemps arabe s'est propagé dans le Golfe, voisinage et profondeur stratégique du régime saoudien. Les émeutes qui touchent toute la Syrie concernent l'Arabie Saoudite. La chute ou la déstabilisation du régime de Bachar Al-Assad aurait des répercussions profondes sur Ryad également. L'Arabie Saoudite a toujours compté sur Damas pour contenir l'influence chiite au Liban et en Irak. Voilà pourquoi le régime syrien, contrairement à celui de Ben Ali ou de Moubarak, ne craint pas de faire payer le prix du sang à ses insurgés. La minorité alaouite, qui contrôle le pays, fait donner ses moukhabarate et les forces parachutistes de la garde présidentielle, jusqu'à aujourd'hui suffisamment soudés, pour tuer la contestation populaire. Dans le style de Kadhafi, sauf que pour celui-ci, il s'est trouvé une coalition internationale pour le condamner et le contenir. Ce ne sont ni les Etats-Unis, ni la France, ni la Grande-Bretagne et encore moins Qatar ou les Emirats qui oseraient traiter Al-Assad comme Kadhafi. Hors de sa région, le tyran de Damas peut donc encore compter sur une approbation, même si elle est nourrie d'inquiétude. Obama ne veut pas d'un nouveau casse-tête au Proche-Orient et évite soigneusement de s'appuyer sur les évènements syriens. En cas d'implosion en Syrie, de nombreuses parties interviendront, dont l'Iran, pour qui la Syrie représente un allié stratégique au Levant. L'Iran pourrait trouver dans l'engagement kurde l'alibi recherché pour intervenir, quitte à alimenter, comme au Liban, une guerre civile. Le président de Syrie est étroitement lié à l'Iran qui lui fournit armes et soutien économique. Téhéran a promis récemment à Damas la modernisation du port de Lattaquié pour le transformer, selon la CIA et les services israéliens, en base maritime iranienne en Méditerranée et en port de stockage d'armements contrôlé par les Gardiens de la Révolution. La Syrie est également en très bons termes avec la Russie qui assure son approvisionnement militaire. Comme en Libye, le Kremlin tente de favoriser en Syrie le dialogue entre les dirigeants et la population. Et ce serait, justement, le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, qui a profité de la présence d'une délégation israélienne de haut rang à Moscou pour organiser une réunion secrète avec le ministre saoudien des AE, le prince Saoud Al-Fayçal, et son responsable des renseignements, le prince Muqrin bin Adulaziz.