“Je n'ai absolument rien fait. Ma famille souffre de ma situation. Aidez-moi.” La voie éraillée, mais toujours déterminée, Ahmed Badaoui, ancien secrétaire général du Syndicat des douanes, suspendu de ses fonctions depuis 2005 et sous contrôle judiciaire depuis janvier dernier, pour avoir émis le souhait, via un SMS, de voir la Révolution tunisienne souffler sur l'Algérie, a lancé hier un véritable SOS à l'adresse des médias, des forces démocratiques et de tous les hommes et femmes de bonne volonté pour l'aider “à réintégrer son poste”. “J'ai épuisé tous les recours, j'ai saisi la présidence de la République, la chefferie du gouvernement, le ministre du Travail, la CNCPPDH, mais en vain. On refuse toujours de programmer la réunion d'une commission paritaire. Je ne demande que le respect des lois de la République”, a-t-il déploré, hier, lors d'une conférence de presse organisée au siège de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (aile Zehouane) à Alger, en compagnie du comité Badaoui-Solidarité. Au cœur d'une cabale qui ne dit pas son nom, Ahmed Badaoui, inspecteur des douanes de profession, a été suspendu en 2005 pour avoir été le porte-parole d'une initiative visant à soustraire le syndicat des travailleurs à l'UGTA et lui conférer une autonomie. Pas moins de huit procès seront alors intentés contre lui par l'administration des douanes au motif d'outrage, diffamation, atteinte à corps constitués et trouble grave à l'ordre public. Il sera, également, exclu de l'UGTA au sein de laquelle il était membre du Conseil national. En dépit qu'il soit blanchi par la justice (six relaxes et deux classements purs et simples), l'administration douanière refuse toujours de le réintégrer. Devant ce refus, il engage une procédure judiciaire, mais le tribunal rejette la requête au motif qu'il n'a pas ramené “tous les jugements qui l'innocentent”. “Demanderait-on donc à Ahmed de prouver son innocence alors qu'il appartient plutôt à l'administration des douanes d'apporter les preuves des ses fallacieuses accusations ?”, s'interroge le comité de solidarité Badaoui. “Au plan humain, éthique et politique, la turpitude infligée à Badaoui est d'autant plus criminelle qu'elle vise arbitrairement à attenter à la liberté d'un militant syndicaliste pour le faire taire, mais aussi de le faire mourir de faim, lui et sa famille, en le privant de son traitement et de protection sociale”, soutient dans une déclaration liminaire ce comité. En plus d'être interdit de sortie du territoire, Badaoui est sous contrôle judiciaire depuis janvier dernier après que la police eut intercepté un SMS ou il souhaitait une révolution démocratique en Algérie à l'instar de la Tunisie (une violation du secret de la correspondance). “Ils m'ont pris le micro, le flash disk et la puce”, affirme-t-il. “C'est un déni de justice, c'est de l'arbitraire, de la hogra”, s'est insurgé le député Ali Brahimi, membre du comité. “On veut briser la liberté de l'homme et son engagement politique”, a-t-il estimé. “Il faut que les décisions de justice soient appliquées”, a renchéri pour sa part, Abbas, un représentant des dockers. Représentant de l'Association des assurés sociaux, M. Sid Ali a révélé que la douane vient d'acheter 70 voitures de luxe, pour 11 milliards “alors qu'on ne paye pas les cotisations d'un travailleur”, dit-il. Porte-parole du comité, Si Mohamed Baghdadi a indiqué, de son côté, que le comité n'exclut pas de saisir les instances internationales, si des solutions nationales ne sont pas trouvées. “C'est un problème politique, de droit. S'il n'y a pas de solution nationale, s'il y a échec de toutes les actions, le comité n'exclut pas de saisir l'OIT, la commission des droits de l'Homme de l'ONU et même la FIDH”. Interrogé, par ailleurs, sur son refus de faire les révélations qu'il avait brandies, Badaoui a indiqué que “le syndicat y est hostile”. Une réunion du comité est prévue le 11 mai prochain pour décider des actions afin de rendre justice à un homme, presque brisé, et le réintégrer dans son poste.