Monsieur Abdelaziz Bouteflika Monsieur le Président, écoutez le cri de détresse d'une famille qui endure une injustice vieille de plusieurs décennies. Une injustice dont l'origine se trouve être, singulièrement, un acte patriotique consenti par notre père, dont les héritiers, depuis cette date-là, se battent devant les tribunaux pour recouvrer un droit d'une évidence incontestable. La relation des détails de cette affaire suscitera certainement en Votre Excellence une colère outrée pour ce qu'elle révélera de plus ignominieux et de plus injuste dans les attitudes égoïstes des hommes, quand il s'agit pour eux de spolier autrui pour accaparer les biens de ce monde, mobilisant des volontés zélées et complices, prêtes à agir, à falsifier les faits, à fausser la justice et à.faire pencher sa balance du mauvais côté, en dépit de l'évidence, de toutes les évidences. Même s'il faut se réjouir de bénéficier de ce recours à Votre Excellence en votre qualité de premier magistrat du pays, permettez-moi, Excellence, de m'en affliger, par ailleurs, dans le sens où cela suppose que malgré un dossier et des documents qui témoignent à cent pour cent en notre faveur et qui auraient dû, dès l'abord, nous permettre, d'obtenir gain de cause, nous voilà devant l'ultime instance que vous incarnez, Excellence, pour vous soumettre les faits d'un insupportable déni de droit. Lorsque la cour d'Alger, chambre administrative, rendit son arrêt n°738/2009 du 14/10/2009, nous, héritiers Hamimi frères et sœurs, nous félicitions de cette décision qui marquait pour nous la fin heureuse d'un marathon judiciaire qui a duré plus de vingt-cinq ans, à l'issue duquel nous pensions enfin pouvoir jouir de notre bien : une villa située dans la résidence d'Etat du Sahel (ex-Moretti), w. d'Alger, dont nous sommes propriétaires de plein droit, étant détenteurs d'un acte de propriété enregistré et publié au deuxième bureau des hypothèques d'Alger, dépôt 35, en date du 9 janvier 1963, sous le numéro 28, volume 2181, au nom de feu Hamimi Youcef, ainsi qu'à la conservation foncière de Zéralda, enregistrée et publiée sous le numéro 41-19 le 29 avril 1998 au nom des héritiers Hamimi. C'est en 1965 que tout a commencé, lorsque nous avons dû mettre notre propriété à la disposition de l'Etat pour y loger les invités de l'Algérie à la conférence afro-asiatique qui n'a jamais eu lieu suite aux événements du 19 juin de la même année. L'Etat, représenté par le ministère du Tourisme qui s'était engagé par écrit à nous restituer notre propriété à la fin de cette dite conférence, n'a pas honoré son engagement, bouclant et interdisant l'accès à la zone de l'ex-Moretti et de Club des Pins. Toute réclamation s'était avérée vaine, alors que toute poursuite judiciaire contre une institution publique, à l'époque, était impossible. Un fait qui n'empêcha pas, toutefois, notre famille de relancer et d'interpeller le ministère du Tourisme au sujet de ce déni de droit. Ce n'est qu'en 1998, après de nombreuses démarches administratives et judiciaires, que nous fûmes convoqués par le ministre du Tourisme qui accepta de se pencher sur le dossier afin d'en étudier les tenants et aboutissants. Ce que fit ce commis de l'Etat qui reconnut, enfin, que cette propriété appartient de manière irrévocable à notre famille, saisissant, par voie de courrier officiel (lettres 291 et 292 - DRAJC/MTA/98), la direction des Domaines de la wilaya d'Alger, ainsi que le directeur général de la résidence d'Etat du Sahel, les informant que la villa 53 est la propriété indéniable de la famille Hamimi et instruit que celle-ci soit rétablie dans ses droits, et ce, aux plans constitutionnel, législatif et réglementaire. Non seulement ces deux entités publiques ne donneront aucune suite à cette injonction officielle, mais la direction des Domaines d'Alger s'empressera, dès la réception du courrier, d'établir des conventions de location illégales au profit de deux personnes, un haut fonctionnaire de l'Etat, M. B. H. (actuel directeur des investissements au ministère de I'industrie) qui bénéficie du rez-de-chaussée de la villa, et à M. A. S., richissime industriel qui occupe, lui, le 1er étage de la propriété. Conventions de location signées et datées ultérieurement à l'enregistrement et la publication de nos actes de propriété ainsi qu'au courrier officiel du ministre du Tourisme signifiant la juste restitution du bien à ses propriétaires. Nous considérons que cette décision prise par le directeur des Domaines d'Alger de l'époque a été illégale, partiale, injuste et influencée. Ce même directeur des Domaines s'est acharné à poursuivre en justice notre famille en vue de faire annuler nos actes de propriété. Ce qui, grâce à Dieu et à la justice, n'a pu se faire, la demande ayant été déboutée par le tribunal de Chéraga, la cour de Blida et, en dernier recours, par la Cour suprême (arrêt du 17/06/2010, réf. 571 252). Malgré ces jugements, les Domaines refusent toujours de nous restituer notre bien. La direction des Domaines ainsi que les deux personnes qui occupent sans droit ni loi les deux niveaux de notre propriété nous ont obligés à entreprendre pas moins de quinze actions en justice pour prouver ce qu'atteste, de toutes les façons, chaque document en notre possession. L'effort, tout l'effort de nos contradicteurs était de prouver que notre propriété était un bien vacant en application des dispositions du décret n°63/88 du 18/03/1963 et qu'elle aurait été intégrée dans les biens de l'Etat par application de l'ordonnance n°66/102 du 06/05/1966. Cet argument pas été retenu puisque dans son article 677 alinea 1, le code algérien, promulgué en 1975 qui a succédé au code civil français, dispose d'une manière express que “nul ne peut être privé de sa propriété que dans les cas et conditions prévues par la loi” et dans son alinéa 2, il renvoie en cas d'expropriation à la loi y afférente. - Or, il se trouve que : 1°/ notre villa n'a jamais fait l'objet d'une expropriation que ce soit sous l'empire de l'ancienne loi que de la nouvelle loi. 2°/ notre villa n'a jamais fait l'objet d'une déclaration de vacance en application du décret n°63/88 du 18/03/1963 et sur ce point, nous avons été jusqu'à faire interpeller par huissiers assermentés après autorisation donnée par le président de la cour d'Alger, sur ordonnance sur pied de requête, les services de la wilaya d'Alger et de la direction des Domaines de cette wilaya, pour qu'ils nous produisent l'arrêté de déclaration de vacance ainsi que le Journal officiel dans lequel cet arrêté est censé avoir paru, et ce, en application du décret sus-cité. Ni la wilaya d'Alger ni la direction des Domaines n'ont pu justifier de ces documents pour la raison très simple que l'arrêté en question n'a jamais existé. Par ailleurs, nous tenons à signaler que les dispositions du décret n° 63/88 du 18/03/1963 ont été abrogées par celles du décret n° 80/278 du 29/11/1980 et en conséquence, notre villa ne pouvait en aucun cas, tant sur le plan juridique que pour les magistrats siégeant dans une juridiction de droit commun ou administrative, être déclarée bien vacant. Comme il ne suffit pas d'être propriétaire d'un bien pour réclamer sa restitution, il fallait prouver, devant une juridiction compétente, que les deux conventions de location évoquées plus haut étaient nulles à l'origine, l'administration des Domaines d'Alger n'ayant pas la qualité pour les signer. La loi étant claire là-dessus, il suffisait de saisir la justice pour avoir gain de cause. Les actions judiciaires en vue de l'annulation des deux conventions de location du 1er étage et du rez-de-chaussée de notre propriété furent enrôlée respectivement par devant les deux chambres administratives de la cour d'Alger, l'une siégeant le mercredi 14 octobre 2009, et la deuxième chambre administrative siégeant le Iundi 2 novembre 2009. Mais ce qui se produit surprend au plus haut point en même temps qu'il déconcerte. Les deux actions étant identiques en tous points : le litige, la forme, le fond et tout autre détail des deux actions soulevés par notre avocat étaient identiques, il était inconcevable qu'il y ait une différence de jugement. Ce fut malheureUsement le cas. La 1re chambre, qui a siégé le 14 octobre 2009 et qui a statué sur le cas du riche industriel, a annulé la convention d'occupation du 1er étage, alors que la 2e chambre, qui a siégé le 2 novembre 2009 pour statuer sur le cas du rez-de-chaussée occupé par le haut fonctionnaire de l'Etat, s'est déclarée, à notre très grande surprise, territorialement incompétente. Notre avocat avait pourtant informé par écrit du jugement rendu le 14 octobre 2009 par la 1re chambre annulant la convention d'occupation du 1er étage. Nous voilà en face de deux jugements contradictoires sur une même propriété située dans la wilaya d'Alger et qui concernent des conventions de location signées par la direction des Domaines d'Alger. Mais alors, quelle est l'instance de justice territorialement compétente pour juger une affaire qui implique, directement ou indirectement, un haut fonctionnaire de I'Etat ? Nous avons interjeté appel devant le Conseil d'Etat de cet arrêt du 2 novembre 2009, n°737/2009 qui n'a pas encore statué à ce jour. Veuillez croire, Monsieur le Président, en l'expression de notre très haute considération tout en vous demandant : Monsieur le Président, rendez-nous justice !