L'usine d'aluminium, l'une des plus importantes du pays, reste fermée depuis plus de deux mois, par une poignée de personnes, malgré une décision de justice, un constat d'huissier et des plaintes déposées pour séquestration et agression. Pourtant, une réunion s'est tenue, la semaine dernière, au commissariat de police, en présence des élus locaux et des principaux instigateurs de la fermeture de l'usine, ainsi que du propriétaire de cette dernière. Objet de la réunion : faire redémarrer l'usine. Or, une personne, qui n'est même pas salariée à l'usine, est venue demander, devant tous les responsables locaux, le versement de 300 millions pour une centaine de personnes qui restent à définir (l'usine emploie, pour rappel, 400 personnes), afin de libérer les portes de l'usine. Pour les employés d'Algal+, “ce n'est pas un conflit social, c'est du racket !”. Le propriétaire de l'usine et le partenaire social ont signé un communiqué commun appelant à la réouverture de l'usine. Mais les travailleurs désireux de reprendre le travail sont terrorisés. Ils sont agressés, pourchassés par des gens qui roulent en moto et qui exhibent des barres de fer et des couteaux à travers la ville, dans les cafés que fréquentent les travailleurs et même dans les cités où ils habitent. Des employés ont été agressés dans leur domicile. Le représentant des travailleurs a été agressé et se trouve menacé de mort, ainsi que tous les travailleurs qui désirent reprendre le travail. Pour les employés d'Algal+, les instigateurs veulent que toutes les poursuites judiciaires soient abandonnées et que l'entreprise leur verse une sorte de droit de protection, alors qu'ils ne sont même pas salariés en son sein et que le chiffre de cent travailleurs qu'ils annoncent n'est basé sur aucun fondement. “Des gens qui n'ont pas de relation contractuelle avec Algal+ n'ont pas le droit de demander des compensations”, martèlent-ils. Des gens de M'sila n'arrêtent pas d'appeler le patron de l'usine pour proposer leurs services bien rémunérés, en vue du règlement du conflit. Tous lui demandent de servir d'intermédiaires pour le paiement de la “rançon”, mais dès qu'il s'agit d'établir une liste des personnes devant en bénéficier, c'est du “non, je ne peux pas, ils vont m'égorger”. Qui sont ces “ils” ? Qui se cache derrière eux ? Pour rappel, l'entreprise Algal+ (publique) a été privatisée en 2006. Une année auparavant, le syndicat d'entreprise avait donné son accord. Le CPE avait validé la cession des actifs industriels de l'usine d'aluminium de M'sila en 2007. Lorsque les nouveaux investisseurs sont arrivés, l'entreprise comptait 230 salariés. Elle cumulait un déficit de 2,6 milliards de dinars et était en situation de faillite. Les équipements ont été rénovés, un personnel a été recruté et formé sur site. En 2011, la société compte 400 salariés dont près de 300 nouveaux recrutés. L'entreprise a ouvert de nouveaux marchés à l'export, notamment vers la Grande-Bretagne, la France et la Tunisie. L'usine a été mise à niveau sur le plan environnemental et dispose d'un label international en matière de valorisation des déchets d'aluminium. Les ennuis ont commencé le 8 mai dernier lorsqu'une vingtaine d'employés contractuels a décidé de fermer l'usine. Leur seule revendication : le retour au statut d'entreprise publique et la remise en cause des conditions de cession des actifs de l'entreprise. L'Inspection du travail a signalé l'illégalité de la grève. Le procureur a envoyé un huissier de justice qui a constaté et confirmé les faits. Un jugement de réouverture des portes a été rendu. Malgré la décision exécutoire, l'usine reste toujours fermée.