Le procès, qui s'est ouvert dans l'après-midi d'hier au tribunal criminel de Tizi Ouzou dans un climat de tension, s'est achevé en début de soirée avec un verdict condamnant les deux accusés présumés de l'assassinat du chanteur kabyle à 12 ans de prison ferme. Ainsi, après avoir passé 13 ans en détention préventive, ce qui fait qu'ils ont ainsi purgé la peine prononcée, leur libération pourrait intervenir bientôt ! C'est sous haute tension que s'est déroulé, hier, au tribunal criminel de Tizi Ouzou, le procès des deux accusés dans l'affaire de l'assassinat de Lounès Matoub, le porte-drapeau de la culture et de l'identité amazighes, le 25 juin 1998 à Tala Bounane dans la localité de Béni Douala. Il s'agit de Malik Medjnoune et de Chennoui Abdelhakim. Hassan Hattab, ex-chef du GSPC avait revendiqué l'assassinat de Lounès Matoub en mai 1999 et s'était rendu en octobre 2007 aux autorités qui l'ont placé depuis en “lieu sûr”. Au moment où le président de la cour allait constituer les membres du tribunal pour l'ouverture de l'affaire comme programmée, après avoir appelé les parties présentes, la famille Matoub et les membres de la Fondation qui porte le nom de la victime se sont levés pour crier “pouvoir assassin”, “jugez les assassins”, “ualc smah ulac”, “appelez les 51 témoins”, avant d'annoncer leur retrait du procès comme partie civile. “Le procès ne porte pas le nom de la victime, Matoub Lounès, mais celui des deux présumés assassins. Les vrais assassins et commanditaires de l'assassinat ne sont pas là. Nous avons demandé une vraie enquête, une reconstitution des faits, une étude balistique, mais rien n'est fait…”, déclare Malika Matoub, sœur de la victime, soutenue par les membres de la Fondation, qui exhibaient des photos du défunt, chantre de la cause amazighe. Au même moment, Chenoui Abdelhakim, tout en essayant de sauter au-delà du banc des accusés, crie : “Je n'ai pas tué Matoub Lounès, je suis innocent”, avant d'être maîtrisé par les agents de police et reconduit de force hors de la salle. Conséquence : la séance va être suspendue pour une durée de plus d'une heure et demie. Un scénario qui va se produire encore une seconde fois, notamment après l'annonce du président de la cour selon laquelle l'affaire des deux accusés, en détention préventive depuis 13 années, va être jugée. Ce qui est un droit légitime pour Malik Medjnoune et de Chennoui Abdelhakim. Pour l'avocat de Medjnoune, M. Aït Habib : “ces personnes sont restées 13 ans en prison, sans légitimité. Nous sommes pour la vérité sur l'assassinat de Matoub, mais le procès pénal prend le nom de l'accusé et nom de la victime et il doit avoir lieu”, une chose que la famille Matoub n'a pas vue du même œil. “Ce procès n'est pas celui de l'assassinat de Lounès Matoub. Jugez Malik Medjnoune et Chennoui Abdelhakim si vous voulez, mais ne citez pas l'affaire Matoub”, dira encore Malika Matoub. Une décision qu'elle avait d'ailleurs maintenue tout le long du procès des deux accusés, qui, faut-il le préciser, s'est ouvert vers 14h30. Dans un communiqué du comité de soutien à Malik Medjnoune publié la veille, on pouvait lire : “L'assassinat de Lounès Matoub n'ayant pas livré tous ses secrets, il risque de déborder le jour du procès, avec des conséquences imprévisibles égales, sinon supérieures au mystère qui continue de cerner un assassinat aux connotations politiques, qui ne pourra être indéfiniment caché avec un tamis.” C'était prévisible que le procès allait se dérouler sous haute tension. Nadia Matoub, femme du chanteur assassiné, était aussi présente au procès, appelée comme victime selon son avocat qui dira que “nous sommes pour la tenue du procès, même factice. Nous ne sommes pas en mesure de dire que les deux accusés sont responsables où ont participé à l'assassinat. On ne peut pas demander leur condamnation où leur libération, c'est d'ailleurs le point de divergence entre les deux parties civiles” Dans l'après-midi, Nadia Matoub, par le biais de son avocat, a également annoncé sont retrait comme partie civile dans cette affaire. Malik Medjnoune, appelé à la barre, dira : “Je ne sais pas pourquoi je suis ici et mon rôle dans cet assassinat ?” Chennoui Abdelmalek, pour sa part, avait reconnu son intégration à un groupe terroriste pour une durée de cinq années, mais il réfuta son implication dans l'assassinat de Lounès Matoub. Le procès s'est poursuivi jusqu'en fin de journée.