Au troisième jour de leur grève, les profs initient une pétition afin de sensibiliser l'opinion publique. Déterminés à poursuivre leur mouvement de contestation jusqu'à l'aboutissement de leurs revendications, les grévistes lancent une campagne nationale d'information suivie d'une pétition, et ce, afin de sensibiliser la société civile et informer l'opinion publique quant aux conditions socioprofessionnelles du professeur. La liste des enseignants suspendus qui ne cesse de s'allonger et les mises en demeure envoyées aux grévistes pour qu'ils reprennent les cours dans les plus brefs délais n'ont fait que renforcer le mouvement. Surtout après l'arrêt punitif de plus de 300 professeurs par les directions. “Le ministère de l'éducation use de tous ses moyens pour nous intimider et nous éloigner de notre objectif qui est l'amélioration des conditions socioprofessionnelles de l'enseignant”, affirme un enseignant. Et d'ajouter : “Ils peuvent nous suspendre, nous traduire en justice, nous matraquer, mais ils ne pourront jamais faire taire notre contestation, car nous sommes unis et nous activons pour l'amélioration de l'école publique.” En effet, le ministère de l'éducation nationale a mis en application ses menaces, puisque plusieurs professeurs, dont le secrétaire général du conseil des lycées d'Alger (CLA), ont été poursuivis en justice. à la wilaya d'Oran, on signale quatre enseignants grévistes, représentants du Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest), suspendus. L'avocat des quatre professeurs, Me Gouadni, nous a déclaré qu'il y avait un élément important à signaler, c'est le fait que le président de la cour d'Oran se déclare incompétent dans cette affaire. Le juge a implicitement reconnu que les mesures de suspension ayant touché ces quatre professeurs n'avaient aucune valeur aux yeux de la loi. Par ailleurs, dans la plaidoirie, le défenseur des professeurs n'a pas omis de dénoncer le fait que l'administration a utilisé comme argument les troubles à l'ordre public, à savoir que, par le débrayage, des élèves se sont retrouvés dans la rue ! “C'est scandaleux de considérer l'éducation comme une sorte de garderie ! C'est une vision étriquée de l'éducation que l'on se doit de dénoncer”, a ajouté Maître Gouadni. Les délégués du conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest) pensent que cette décision est destinée à déstabiliser le mouvement de grève en ciblant les meneurs. Signalons que plusieurs actions de solidarité ont été enregistrées, hier, à Mascara, plus précisément dans la commune de Tighenif où des enseignants des lycées Ben-Badis et Ferhaoui ainsi que ceux des technicums ont observé un arrêt de travail de deux jours, les dimanche et lundi, afin de soutenir leurs collègues. Le mot d'ordre a été suivi par 95% du corps enseignant. Selon les grévistes, leurs revendications sont les mêmes que celles de l'ensemble du corps : la reconsidération de leur profession. Par ailleurs, un groupe de parents d'élèves du lycée Bouâmama (ex-Descartes) est venu à notre rédaction afin d'exprimer son soutien au mouvement de protestation des enseignants du secondaire. “Nos enseignants, qui ne demandaient que dignité, n'ont reçu comme réponse que mépris et indifférence du ministère de l'éducation nationale. Nous sommes tous coupables de n'avoir pas soutenu à temps ces enseignants dans ce combat qui est un peu le nôtre, car ils plaident la cause de nos enfants”, déclare un parent d'élève qui ajoute : “Lorsque nous voyons leur niveau de vie, nous ne souhaitons pas que nos enfants deviennent un jour des professeurs.” N. A./F. S./ Correspondants Le procès de OSMANE reporté Le procès de M. Redouane Osmane, le secrétaire général du conseil des lycées d'Alger (CLA), convoqué à comparaître, hier, devant le juge d'instruction du tribunal d'Alger, a été reporté pour mercredi prochain sous la demande de la partie civile qui n'a pas eu le temps de rassembler les éléments du dossier de l'accusation. Signalons également que, pour le procès des quatre enseignants de la wilaya d'Oran, le juge des référés s'est déclaré incompétent. N. A. Béjaïa 45 PES poursuivis en justice Le reste des professeurs grévistes ont été destinataires, hier, de mises en demeure. Le mouvement de grève des PES dans la wilaya de Béjaïa, initié par le Cnapest, commence à s'enliser davantage par les mesures répressives prises à leur encontre par leur tutelle. En effet, la quasi-majorité des établissements du secondaire de la région était toujours, hier, paralysé par le mouvement de protestation des enseignants, malgré les mesures coercitives prises par l'académie à l'encontre des PES grévistes. Au niveau du lycée mixte d'El-Kseur, l'ensemble des enseignants grévistes ont été, selon Amoura Amar, PES syndicaliste du Cnapest, poursuivis en justice par la direction de l'éducation de Béjaïa. “Nous sommes convoqués individuellement pour aujourd'hui (hier Ndlr) à 11h par le juge d'instruction près le tribunal de Béjaïa. On a pris la décision de ne pas répondre à la convocation”, nous a déclaré en substance notre interlocuteur. Le reste des PES grévistes, apprend-on encore, ont été destinataires depuis, hier, des mises en demeure individuelles de la part de l'académie, les sommant de rejoindre leur poste de travail. “Nous sommes déterminés à poursuivre notre mouvement de grève quelles que soient les conséquences”, nous a déclaré un PES gréviste au lycée de Sidi-Aïch. L'ensemble des enseignants grévistes du secondaire dans la région que nous avons abordé ont réaffirmé leur détermination à ne pas reculer. L. OUBIRA Ils Réagissent SATEF “Le pouvoir est responsable du pourrissement de la situation” Dans une conférence de presse animée, hier, à Tizi Ouzou, le Satef a plaidé pour la constitution d'une fédération des syndicats autonomes de l'éducation. “Aucun syndicat, à lui seul, ne peut faire reculer le pouvoir omnipotent en place”, a déclaré M. Sadali, coordinateur régional du Satef. Selon lui, la situation actuelle que vivent les travailleurs du secteur incombe à ce même pouvoir qui tente de briser toute initiative allant dans le sens de fédérer les forces syndicales. Pour M. Sadali, “il est temps d'unifier les rangs et d'établir une plate-forme de revendications et un plan d'actions commun”. Parlant de la grève des PES, il a estimé que ce moyen de lutte n'est pas la seule solution pour revendiquer l'amélioration des conditions socioprofessionnelles des travailleurs, “la grève illimitée risque de dilapider les forces syndicales”, conclut M. Sadali. A. T. PT “Il faut que cesse la répression” “(...) Le secrétariat provisoire, tout en appelant les enseignants grévistes à réaliser l'unité des rangs avec l'ensemble des travailleurs de l'éducation, seule à même de faire aboutir les revendications légitimes, considère que le gouvernement doit mettre fin à cette situation qui tourne au drame, plongeant les lycées dans le marasme. Le secrétariat provisoire réaffirme que la revendication salariale est légitime et doit être prise en compte pour ramener la sérénité et permettre aux enfants de reprendre leurs cours, le gouvernement peut le faire, il en a les moyens. La répression à l'encontre des enseignants est une décision très grave, elle doit cesser immédiatement. Le secrétariat provisoire réaffirme qu'en répondant positivement aux cris de détresse des enseignants, le gouvernement rétablira les liens positifs entre les citoyens qui renoueront avec l'espoir en des lendemains meilleurs et l'Etat. C'est une question d'avenir et de cohésion nationale”. MCB “Nous condamnons cette injustice” Dans une déclaration rendue publique, hier, le MCB condamne la suspension des PES grévistes par le ministère de l'Education nationale. “Encore une fois, la caste dirigeante décide de sévir de la manière la plus abjecte en intervenant sur les salaires, privant ainsi des familles entières du minimum vital”, lit-on dans la motion de soutien du MCB signée par son porte-parole, le Dr Mouloud Lounaouci. Tout en condamnant cette “énième injustice commise par les institutions de l'Etat”, le MCB “assure de toute sa sympathie et solidarité tous les éducateurs progressistes et les encourage à poursuivre leur légitime lutte”. Enfin, le MCB tire la sonnette d'alarme quant à la gravité de la situation. “L'irresponsabilité de nos dirigeants entraînera inévitablement un pourrissement qui aura pour effet une perturbation scolaire dans un système éducatif déjà médiocre”. A. T.