Platon, le philosophe, n'aurait jamais pu fonder son Academica, s'il n'avait été racheté et libéré par un Libyen, quand il a été fait prisonnier et vendu comme esclave (Rossi, p. 119). 4iéme partie Après des frictions, ou même de courtes guerres dues au fait que des colons hellènes sont venus s'installer sur les côtes lityques, face à la Grèce, au IXe siècle av. J.C., il semble bien qu'un modus vivendi ait été assez vite trouvé entre les nouveaux venus et leurs hôtes berbères, dans l'ensemble des cinq cités, les fameuses Pentapolis, appelées à prospérer sur la rive sud de la Méditerranée pendant plus de quinze siècles, du IXe siècle av. J.C., jusqu'au VIe siècle de l'ère chrétienne. Ecoutons le grand poète grec Callimaque (315-240 av. J.C.) chanter le bonheur de vivre dans la principale de ces cités, Cyrène (Kurênê), au IIIe siècle av. J.C. : grande fut la joie au cœur de Phoibos, quand venu le temps des fêtes carnaiennes, les hommes d 'Enyo, les porte-ceinturons, firent un chœur de danse parmi les blondes libyennes. Jamais Apollon ne vit chœur plus vraiment divin ! Jamais le dieu n'accorda tant à nulle cité qu'il fit à Cyrène ! (Callimaque, p. 228). Et c'est ainsi que nous apprenons, au passage, que les anciens Berbères étaient plutôt blonds, ceux du moins qui cohabitaient avec les Grecs de Cyrénaïque, au troisième siècle avant J.C. Mais ce qu'il y a de vraiment étonnant, et de paradoxal en apparence, c'est que les Grecs nourrissaient à l'égard des Berbères une profonde vénération. L'historien Hérodote (484-425 av. J.C.) les considérait comme le peuple du monde qui jouit du meilleur état de santé, surclassant en ce domaine les Egyptiens et les Grecs eux-mêmes (Hérodote, L. II parag. 77 p. 199). Le costume et l'égide qu'on voit en Grèce aux statues d'Athéna, ajoute-t-il, sont inspirés des vêtements des Libyennes. Atteler quatre chevaux est encore un usage passé des Libyens à la Grèce (Hérobote, L. IV, parag. 189, p. 444). L'écrivain latin, Pline l'Ancien (23 - 79) nous signale que les Grecs attribuaient la fondation de Tanger (Tingi) au géant de leur mythologie Antaios (Antée) (Pline, L. V, parag. 2, p. 45), et que Grecs et Libyens de Cyrène allaient ensemble en pèlerinage au temple d'Aïnoun à Siwa (Pline, L.V, parag. 31, p.60 et commentaire p. 351). Athena la vierge, Athena la déesse guerrière protectrice d'Athènes, Athena la déesse de l'intelligence, est elle-même née en Libye au bord du lac Triton (Rossi, p. 82). Les Berbères Garamantes étaient des descendants du dieu Apollon lui-même, aux yeux des Hellènes (Gaffmt, p. 703). Platon, le philosophe, n'aurait jamais pu fonder son Academica, s'il n'avait été racheté et libéré par un Libyen, quand il a été fait prisonnier et vendu comme esclave (Rossi, p. 119). I1 est de notoriété historique, enfin, qu'Alexandre le Grand a dû parcourir 600 km de désert, avec toute son armée et sa suite, pour se faire sacrer roi d'Egypte par les prêtres d'Amon, en son temple de Siwa. Les habitants de Siwa continuent jusqu'au jour d'aujourd'hui à parler tamazight. Il y a lieu de penser, à partir de ces données, que les Grecs savaient pertinemment que leur civilisation était la fille de celle de l'Egypte et de la Libye. Les historiens français Jean Servier et Piene Rossi ont développé ce sujet, le premier en ce qui concerne les Berbères, et le second en ce qui a trait à l'influence de l'Egypte sur la Grèce. (À suivre) M. C. NDLR : Titres et intertitres sont de la rédaction