En plus de la production de viande nationale fraîche et/ou congelée, l'Etat a recouru aux importations pour assurer une meilleure disponibilité synonyme, en principe, de baisse des prix. Le gouvernement s'est attelé de longs mois durant pour faire de la viande rouge un produit alimentaire à la portée des petites bourses. Pendant l'année en cours, notamment en prévision de son mois sacré, l'Exécutif a usé de l'intégralité de ses atouts afin de garantir une viande bovine et ovine à des prix accessibles aux consommateurs, leur permettant de goûter aux bienfaits de cet aliment. Les viandes rouge et blanche sont devenues, au fil des années et au gré des spéculateurs, un luxe que seule une certaine catégorie de citoyens s'offre : les plus riches. Outre la production nationale, fraîche et/ou congelée, le gouvernement a recouru aux importations pour assurer une meilleure disponibilité à même de faire baisser les prix qui s'enflamment en ce mois d'août des grandes chaleurs… L'objectif est d'assurer, en fait, des quantités qui avoisinent les 400 000 tonnes. Cette offre que fournit aisément le secteur agricole devrait, en principe, atteindre les 11 kilogrammes que consomme chaque Algérien tous les ans. Pourtant, cette moyenne est loin des standards mondiaux où des pays comme les Etats-Unis en consomment jusqu'à 70 kg/habitant/an. Entre janvier et juin 2011, il a été importé quelque 25 000 tonnes de viandes. L'opération a été réalisée par la Société de transformation et de conditionnement des viandes (Sotracov) et près de 30 importateurs privés. Ils ont importé essentiellement de la viande bovine, d'autant plus que l'ovin est interdit depuis quelques années à l'import. La marchandise provient de plusieurs pays qui ont obtenu l'autorisation d'exportation de la part des autorités algériennes. Le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay, l'Allemagne, la France sont entre autres les pays d'origine de ce produit. La majorité des opérateurs optent, toutefois, pour l'Inde. Le choix des importateurs est motivé par les prix acceptables pratiqués et la disponibilité sur place des quantités commandées sur le marché indien. Ce sont des équipes, des missions et professionnels qui se déplacent dans ce pays pour s'enquérir de la qualité de ses viandes et du processus de leur production. Un kilogramme de viande à moins de 500 DA La viande est de bonne qualité puisque contrôlée et les bêtes sont égorgées selon le rite musulman. Il s'agit d'une viande d'importation surgelée à bon marché, qui sera cédée à un prix qui se situerait entre 450 DA et 500 DA. Mieux, les responsables chargés de cette activité insistent pour que le prix de cette viande ne dépasse pas cette fourchette. Ce qui, normalement va permettre aux bourses moyennes et aux familles au faible pouvoir d'achat de s'offrir quelques kilogrammes de viande au mois de Ramadhan. L'introduction de la viande indienne sur le marché national, faut-il le rappeler, a défrayé la chronique le mois de Ramadhan dernier. Les Algériens appréhendaient l'origine de ce produit, surtout la façon avec laquelle les bêtes sont abattues. Pour la consommer, ils exigeaient que l'animal soit égorgé selon le rite musulman, de sorte à ce qu'ils puissent consommer la viande halal. Cette exigence, n'a, cependant, pas été exprimée pour les autres pays tels que le Brésil, l'Uruguay, l'Europe… La garantie est venue de la part du premier représentant de ce pays en Algérie, en l'occurrence, l'ambassadeur, Kuldeep S. Bharadwaj. “La viande congelée en provenance de l'Inde est à 100% halal”, a-t-il affirmé. L'ambassadeur de l'Inde rassure les Algériens et se porte garant quant à la bonne qualité de la viande produite dans son pays. Il affirme que l'abattage des bêtes se fait selon le rite musulman. M. Kuldeep S. Bharadwaj confirme l'existence d'une dizaine d'abattoirs, propriété de musulmans en Inde, qui sont certifiés ISO et contrôlés régulièrement. L'implantation de ces structures privées dans ce pays n'est pas fortuite, d'autant plus que la communauté musulmane est estimée à quelque 140 millions de personnes. Mieux, l'islam est la deuxième religion en Inde. “Nous sommes donc mieux placés pour parler de ce rite musulman…”, confie l'ambassadeur. Outre le label halal, l'Inde garantit, en effet, une disponibilité du produit à longueur de l'année. Ce pays dispose d'un cheptel de 1,4 milliard de têtes, soit 13 % de la totalité des bétails dans le monde. L'Inde produit plus de 1,5 million de tonnes/an de viande rouge soit 2,5 % du marché mondial dont 500 000 tonnes sont destinées à l'exportation vers plus de 60 pays dans le monde. Notre pays a importé depuis juin dernier plus de 30 000 tonnes de viande indienne. Des pays musulmans tels que la Malaisie, l'Egypte, le Koweit, l'Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, la Jordanie, les Philippines, l'Angola, l'Iran, Oman, le Qatar… importent eux-aussi de la viande rouge de l'Inde depuis quelques années déjà. “L'Inde est classé troisième producteur de viandes rouges au monde, et premier selon le rite musulman”, déclare l'ambassadeur. L'autre raison qui a encouragé les responsables algériens en charge de ces importations, est le prix compétitif proposé. La tonne est cédée à environ 3 000 dollars. Une fois sur le marché, le kilogramme serait affiché à environ 400 DA. L'Inde, premier producteur mondial selon le rite musulman Pareil prix arrêtera la flambée, baissera à coup sûr la tension pendant le mois de Ramadhan et permettra, par conséquent, aux consommateurs algériens d'ajouter de la viande en quantité suffisante dans leurs menus. Il est à noter que les contacts entre l'Algérie et l'Inde autour de ce partenariat ont débuté par l'envoi de vétérinaires spécialisés algériens vers l'Inde. Ces équipes ont visité sur place les abattoirs et les laboratoires en activité. Ces spécialistes ont reconnu les bonnes conditions sanitaires dans lesquelles est produite la viande rouge et la qualité de celle-ci. M. Kuldeep S. Bharadwaj en veut pour preuve le fait qu'aucune plainte dénonçant la qualité de cette viande n'a été déposée. Il s'agit de la viande rouge congelée sans os de Buffalo. Le cheptel de Buffalo est composé de plus de 178 millions de têtes en Inde. Cet animal est réputé pour la qualité de sa viande et les grandes quantités de lait qu'il produit. M. Kuldeep S. Bhardwaj souligne également qu'en Inde plus de 50 000 vétérinaires exercent leur métier dans quelque 10 000 cliniques alors que 30 000 laboratoires sont opérationnels.Il est également recensé 25 000 usines de fabrication de vaccins. Un système de contrôle de la qualité de la viande est de ce fait mis en œuvre. “Avant d'être expédié, chaque container est contrôlé et certifié par une équipe de vétérinaires”, indique l'ambassadeur. Les négociations, entre les deux pays, à ce propos, ont été entamées en 2001. Après neuf années de discussions, l'Inde a réussi à obtenir la certification pour l'exportation de sa viande vers l'Algérie. Ce pays a répondu, selon les responsables concernés, à toutes les exigences sanitaires. Par ailleurs, la certification d'un produit n'est pas limitée dans la durée mais peut être suspendue en cas d'évolution “négative” de la situation sanitaire du pays exportateur. Le ministère de l'Agriculture a, dans ce cadre, délivré des autorisations d'exporter à 10 sociétés indiennes. Sotracov a mis 10 000 tonnes de viandes sur le marché La Sotracov s'est tracé comme but de contribuer à l'équilibre du marché national. Elle vient de mettre pour le Ramadhan 2011, 10 000 tonnes de viandes dont 6 000 tonnes bovines d'importation et 4 000 tonnes ovines locales congelées. Outre son réseau de distribution composé de 300 points de vente à travers 40 wilayas, cette société a chargé ses trois pôles d'Alger, de Skikda et d'Oran de convaincre un maximum de franchisés entre grossistes, demi-grossistes et détaillants pour commercialiser ses produits. Pour cela, ces adhérents n'ont qu'à formuler une demande de franchise pour vendre les viandes de la Sotracov. Ils doivent cependant, s'engager à respecter un cahier des charges déjà établi et les prix à la consommation préalablement fixés par l'entreprise. La Sotracov escompte attirer plus de 200 adhérents dans cette opération. Ces derniers doivent commercialiser les viandes à des prix intéressants, soit 460 DA le kilogramme de viande bovine et 650 DA le kg de l'ovin. Ce sont là, les prix qui seront pratiqués par l'entreprise durant le mois sacré. Il faut préciser que l'offre nationale en viandes est estimée à 360 000 tonnes/an. Ce qui amène à une consommation moyenne mensuelle de 30 000 tonnes. “Injecter plus de 10 000 tonnes, soit le tiers de la consommation sur le marché, c'est déjà beaucoup. Ce qui rendra les prix intéressants et garantira l'équilibre du marché ", souligne M. Zefzef, PDG de la Sotracov. Plus de 14 000 taurillons de boucherie ont été importés, soit un apport de quelque 3 000 tonnes de viande fraîche. Le poulet congelé, produit localement, sera vendu, quant à lui, à 250 DA le kilo dans les 286 points de vente répartis sur les 48 wilayas du pays. Le but recherché à travers cet approvisionnement n'est pas de casser les prix, mais de réguler le marché. Des mesures pour éviter le détournement vers l'informel Il faut savoir que des mesures ont été prises pour que cette viande importée ne soit pas détournée vers des marchés spéculatifs où elle est commercialisée en tant que produit frais (viande fraîche) par certains commerçants indélicats. La société importatrice Proda a agréé, pour cela, ses représentants, en plus de ses points de vente à travers le territoire national. Pour un meilleur contrôle, le ministère du Commerce recrutera 2 500 agents en 2011, qui s'ajouteront au millier déjà en activité depuis 2010. Ils seront globalement plus de 7 000 fonctionnaires recrutés à l'horizon 2014. Avec les 3 000 agents contrôleurs qui activent actuellement, le ratio est évalué à une brigade pour près de 900 commerçants. Ce qui est très faible, estiment des observateurs très au fait du secteur du commerce. Il faut rappeler ici, qu'au mois d'avril dernier, le ministre de l'Agriculture, Dr Rachid Benaïssa, avait indiqué que les opérateurs publics et privés ont déjà commencé à stoker les viandes bovines importées d'Inde et du Brésil pour répondre aux besoins du marché au mois du Ramadhan. Il a également indiqué que des opérateurs privés ont importé 11 000 têtes ovines à engraisser pour répondre à la forte demande en viande rouge durant le mois sacré. De par la cherté qui la caractérise en Algérie, on se demande quel goût aura cette viande une fois dans la bouche de son consommateur ?