À Tizi Ouzou, comme dans le reste du pays, ce sont les carences des hôpitaux publics qui poussent les citoyens vers les cliniques privées dont les prestations, à quelques rares exceptions, sont souvent inversement proportionnelles aux tarifs pratiqués. Ce n'est pas une tendance générale, mais les carences et le manque de moyens et spécialistes enregistrés dans le secteur public obligent les malades à se diriger vers le secteur privé. De plus en plus de cliniques privées voient le jour à Tizi Ouzou. Elles ne sont pas plus performantes que les hôpitaux, puisque beaucoup de médecins employés dans ces structures travaillent également dans les hôpitaux publics, où le cadre est plus satisfaisant. Un complément de ressources pour ces praticiens qui retrouvent dans cette option un salaire motivant, un travail moins chargé et des gardes de nuit payées à plus de 1 000 DA. À Tizi Ouzou, après une virée dans une clinique privée, à première vue, dans le hall de la bâtisse, il y a plus d'objets de décoration que de choses qui renseignent que nous sommes dans une structure sanitaire. Aucun bruit, aucun mouvement d'infirmier, de médecin où même de malades. Dans la salle d'attente, une enseigne écrite en rouge et jaune, comme dans un fast-food, nous renseigne sur le nombre de spécialités et d'interventions assurées par cette clinique. En tout, 13 pathologies chirurgicales sont inscrites, avec plus de 40 types d'interventions possibles dans l'ensemble des pathologies : tumeur du cerveau, arthrose lombaire, goitre, prothèse du genou… À chaque ensemble d'interventions dans une spécialité, la clinique mentionne en bas de liste “etc.” ! La préposée à l'accueil nous dira que “le responsable de la clinique n'est pas là, il partira demain en France, donc la clinique sera fermée durant tout le mois. Nous avons juste quelques urgences à liquider, mais dès demain on ferme !” nous dira-t-elle. Mais en cas de complications chez le patient, on se demande si la clinique prend des dispositions de suivi nécessaires ou le malade va être contraint d'aller voir une autre clinique. Parmi les soins les plus assurés dans ces établissements, l'on retrouve la gynéco obstétrique. Ces cliniques sont choisies, outre les bons soins, pour leurs bonnes conditions d'accueil et d'hygiène. Selon un médecin interrogé à ce sujet, “les accouchements dans les cliniques privées sont devenus à la mode. Dans ces établissements, les patients sont avant tout accueillis comme des clients. Un accouchement normal fait entre 20 000 et 220 000 DA, alors qu'un accouchement par césarienne est évalué entre 50 000 et 70 000 DA”. Notre source ajoute : “certes, le cadre est plus agréable dans ces cliniques privées, pourtant, les conditions se sont nettement améliorées dans le secteur public. cependant, le manque de gynécologues dans certains hôpitaux et l'absence d'un chirurgien de garde à certaines heures de la nuit obligent les patients à recourir au secteur privé.” L'absence de gynécologues, comme c'est le cas d'ailleurs à l'hôpital de Tigzirt, comme en témoigne un autre médecin, renseigne bien sur cette carence. “À l'hôpital de Tigzirt, il n'y a que les sages-femmes pour prendre en charge les parturientes. Beaucoup de femmes, celles qui sont conscientes du danger que peut représenter l'absence d'un spécialiste sur place, vont accoucher dans des cliniques privées et cela, malgré le prix à payer.” Pour notre interlocuteur, “la clinique Sbihi-Tassadit, un établissement étatique spécialisé sise au chef-lieu de wilaya, connaît un afflux important en la matière, jusqu'à 8 000 naissances par an. Il arrive que plusieurs femmes accouchent au même moment. Si les conditions se sont nettement améliorées ces derniers temps dans cet établissement, autrefois sévèrement critiqué et pointé du doigt, les gens continuent pourtant d'éviter les lieux, vu que cette clinique n'arrive pas à supporter et à contenir le nombre de femmes transférées des autres hôpitaux de la wilaya”. Le calvaire de Sabrina en dit long. Lors de son premier accouchement, cette jeune maman s'est retrouvée couchée juste après l'enfantement, qui a eu lieu vers 2h du matin, à côté d'une autre femme, sur un même lit. Plus d'une année après, elle reste encore traumatisée après cinq jours passés dans cet établissement dans des conditions pénibles, dira-t-elle.