Les dépenses de consommation n'ont pas progressé en 12 ans. Les premiers résultats de son enquête sur les dépenses des ménages de l'Office national des statistiques (ONS), réalisée entre mars 2000 et avril 2001, confirment, nous dit-on, que les dépenses de consommation des ménages n'ont guère progressé en 12 ans. Rappelons que la dernière enquête de ce type date de 1988. La dépense globale a certes augmenté de manière apparemment spectaculaire, puisqu'on est passé d'une dépense de 207 milliards de DA à 1 500 milliards de DA, soit un rapport de 1 à 7, en prix courants. Cependant, la part réelle de cette augmentation est avant tout imputable à l'accroissement démographique (+ 30% sur la période 1988-2000). Ramené à la dépense par tête, le rapport n'est en effet plus que de 1 à 5,6, ce qui signifie que l'accroissement de la dépense par tête (ou par ménage) en prix courants a été annulée par l'augmentation parallèle de l'indice des prix qui est passé de 100 à 580 sur la même période. En 2000, la dépense moyenne annuelle s'élève à environ 50 000 DA par tête et à 330 000 DA par ménage comprenant en moyenne 6,5 personnes. Le chiffre de 330 000 DA de dépenses par ménage peut paraître relativement élevé, mais il doit être rapporté au niveau des prix, en particulier des denrées alimentaires qui, en Algérie, restent également assez élevés. Même si les statistiques révèlent que les inégalités se sont légèrement réduites, ces dernières restent fortes, en particulier en milieu urbain. Les 10% des ménages les plus favorisés y concentrent, en effet, le tiers des dépenses. Environ 500 000 ménages consomment ainsi pour plus de 850 000 DA par an. En milieu urbain, plus de 1,7 million de personnes ont une dépense par tête équivalente à 140 000 DA. Par ailleurs, les 50% des ménages les moins favorisés ne comptent que pour 25% des dépenses de consommation et 50% de la population dépense moins de 37 000 DA par an. La structure des dépenses consacre la part prédominante de la consommation alimentaire dans les dépenses totales (45,1 % en milieu urbain, 43,7% en milieu rural). Parmi les ménages urbains, les 30% les plus aisés concentrent plus de 55% des dépenses alimentaires, qui comptent encore pour 40 à 45 % de leur budget. Le deuxième poste est le logement (entre 13 et 14%). L'habillement ne figure qu'en 4e position, devant la santé et l'éducation. Conséquence mécanique des fortes inégalités signalées plus haut, les 10% des ménages les plus favorisés réalisent près de 38 % des dépenses d'éducation et de loisirs, 54 % des dépenses de transport et de télécommunications, 26 % des dépenses de santé et 38 % des dépenses de mobilier et équipement du foyer. Les dépenses des ménages restent, toutes couches sociales confondues, très contraintes par le poids de la facture alimentaire et les dépenses liées au logement. Ceci est également vrai des couches les plus favorisées qui continuent à consacrer presque 60% de leurs dépenses à ces deux postes, même si elles parviennent également à affecter une partie de leurs revenus aux achats de biens durables (automobiles, équipements du foyer). “Ce phénomène peut s'expliquer par la pénurie de logements, qui contribue à renchérir les prix des loyers ou des acquisitions, et le manque de modernisation des circuits de distribution de produits alimentaires qui a pour effet de maintenir des prix proportionnellement très élevés dans ce secteur au regard du pouvoir d'achat des ménages algériens”, estiment certains spécialistes. Le ramadan et les fêtes constituent sans doute les principales périodes de dépenses pour les ménages. Ces dépenses se concentrent principalement sur l'alimentation et l'habillement. Parmi les ménages à revenu moyen supérieur, la dépense alimentaire augmente d'environ 75% durant cette période. Les approvisionnements sont plutôt d'ordre quotidien. M. R. Grande et moyenne distribution Un secteur quasiment vierge En Algérie, le secteur de la grande et la moyenne distributions est quasi vierge. Le marché se caractérise aujourd'hui par la prolifération de petits commerces de détail et l'absence de réseaux de distribution modernes organisés autour d'enseignes et de centrales d'achat. On assiste cependant au développement de “supérettes” qui se différencient par un assortiment plus large de produits que les épiceries de quartier, comportant une grande partie d'articles importés. Les prix pratiqués sont très élevés et les circuits de distribution qui approvisionnent ces points de vente restent traditionnels (grossistes importateurs, demi-grossistes), voire informels. Le caractère artisanal de la plupart des structures de commerce de détail est manifeste dans la mesure où elles sont détenues à 75% par des personnes physiques. La démonopolisation du commerce extérieur ne s'est pas traduite par une véritable modernisation des circuits de distribution. Cependant, à côté des produits importés, certains producteurs nationaux qui ont su faire un effort de qualité, de packaging, de marketing et aussi de régularité dans la distribution, n'ont eu aucun mal à devenir très rapidement leaders sur le marché. C'est le cas des huiles et margarines Cevital, de la bière Tango, des détergents Isis ou Le Chat, fabriqués et distribués par le joint- venture créé entre Henkel et l'entreprise publique Enad. M . R.