RESUME : Le temps de quelques minutes, Krimo avait cru reconnaître Ferroudja. Il se demandait ce qu'elle était devenue, si elle était mariée, si elle avait des enfants. Il pensait encore à elle et voulait avoir de ses nouvelles. Il espérait encore. Mais il ne ferait rien pour nuire à son bonheur. Jamais il ne voudrait la peiner… 6eme partie En France et en Allemagne, il avait mené une vie de misère. De nombreuses Allemandes et Turques avaient tenté de l'accrocher, mais Krimo n'avait accepté que les relations et liaisons sans lendemain. Il aurait pu se marier avec l'une d'elles, mais jamais il n'avait eu la force morale d'accepter l'idée même qu'une autre que Ferroudja puisse devenir sa femme officiellement. Son image était toujours présente en lui. Elle ne s'était pas effacée avec le temps. Il avait fallu ce profil aperçu à la terrasse d'un salon de thé pour que surgissent en foule d'anciens souvenirs. Krimo porta la main en respirant profondément sur la douleur aiguë localisée entre les côtes. Qu'était-elle devenue ? Mariée sans doute, avec trois, quatre enfants… Il eut un sourire amer. Il ne devait plus être, dans son souvenir, qu'un personnage, un incapable, un rêveur. Il secoua la tête, comme pour chasser cette image. Il appela le serveur, régla ses consommations bien qu'il n'eut pas touché au gâteau et s'en alla. En tête, il avait une idée pour retrouver Ferroudja. Il n'aurait pu en trouver de meilleure… - Ah !... la voici… Krimo l'avait soupiré. Depuis quatre heures déjà qu'il fouillait dans ses cahiers et livres d'étudiant qu'il avait abandonnés et que sa défunte mère avait conservés comme des biens précieux. Il avait eu beaucoup de difficultés pour retrouver l'adresse d'un ancien camarade de classe. Il y avait aussi deux numéros de téléphone. Il sortit et entra dans un taxiphone. Il dut attendre un peu, les trois téléphones étaient retenus par une jeune fille et deux vieux qui devaient être durs d'oreille, puisqu'ils criaient la plupart du temps. Comme la jeune fille ne pouvait plus entendre son correspondant, elle raccrocha en envoyant un regard courroucé aux deux vieux avant d'aller régler sa communication. Krimo va s'enfermer dans la cabine. Le doux parfum de la jeune fille était encore présent. Il composa le premier numéro, il était erroné. Avec le deuxième, il ne fut pas déçu. On décrocha et la voix d'une vieille femme lui parvint. - Allô ? Bonjour… - Bonjour, fit-elle, attendant la suite, elle devait être habituée à répondre et à appeler celui ou celle qu'on demandait au téléphone. - Voilà, je suis un ami de Rachid… Est-ce qu'il est là ? - Qui le demande ? - Krimo G…, je reviens d'un voyage, dit-il avant de mentir. Je lui apporté les ouvrages qu'il m'a demandé… - Vous n'avez qu'à l'appeler à son cabinet, répliqua-t-elle. Il se boucha une oreille. Le vieux d'à côté criait un peu plus fort, visiblement en colère. - J'ai perdu mon carnet… Vous seriez aimable de m'aider… A l'autre bout de la ligne, la vieille femme se mit à parler avec quelqu'un d'autre. Il y eut un petit bruit puis la voix très grave de Rachid résonna à son oreille. - Krimo ? C'est bien toi… Je rentrais quand tu as appelé… Tu vas bien ? - Oui et toi ? - Hamdoullah… Et si je te disais que je te croyais mort ?, lâcha Rachid très surpris, après tout ce temps et ce silence… - Il y a eu aussi des jours où je le croyais aussi, répliqua-t-il. - Tu as eu des aventures ?, voulut savoir Rachid. - Rien qui vaille la peine, soupira Krimo qui dut répéter, les vieux d'à côté ne se gênant pas. La misère comme on n'en imagine pas dans le tiers monde ! La solitude… - Tu as fait fortune au moins ? (À suivre) A. K.