À l'issue d'une réunion ministérielle hier au Caire, la Ligue arabe a annoncé la suspension du régime d'Al-Assad et a surtout évoqué la possibilité de prendre contre lui des sanctions “économiques et politiques”, si jamais Damas persiste à ignorer le plan de paix arabe. On ne badine plus avec les principes du côté de la Ligue arabe, qui a pris la décision hier de suspendre la Syrie en raison de son refus de mettre en œuvre le plan de sortie de crise élaboré par l'institution panarabe avec l'accord du régime de Damas. C'est le chef de la diplomatie du Qatar, Hamad ben Jassem al-Thani, en sa qualité de président de la Commission ministérielle de la Ligue arabe chargée de suivre le dossier syrien, qui a lu à l'issue d'une réunion ministérielle un communiqué annonçant que l'instance panarabe a décidé de “suspendre la participation des délégations syriennes aux travaux” de l'organisation. Cette mesure, qui prendra effet à partir de mercredi, selon la même source, prévoit aussi le retrait des ambassadeurs arabes de Damas, tout en précisant que la décision finale relevait de la souveraineté de chaque Etat membre. Ce qui retient également l'attention, c'est la possibilité d'appliquer des “sanctions politiques et économiques” contre le régime de Bachar al-Assad s'il continue à ignorer le plan de règlement arabe, bien qu'aucune précision sur la nature de ces mesures n'ait été donnée. Un appel a été lancé en direction de l'armée syrienne afin qu'elle cesse de tuer les manifestants. Pour rappel, la suspension de l'adhésion de la Syrie à la Ligue arabe était l'une des revendications principales de l'opposition syrienne dont les différents courants se sont rendus au siège de l'organisation ces derniers jours pour consultations. Concernant le vote, 18 des 22 membres de la ligue ont également voté en faveur d'un appel à tous les courants de l'opposition à “se mettre d'accord sur un projet unique pour la gestion de la transition prochaine en Syrie”, soit une quasi-unanimité. Le ministre des Affaires étrangères qatari a indiqué que la Ligue arabe souhaitait rencontrer à ce sujet tous les courants de l'opposition syrienne sous trois jours au Caire. Il a justifié cette décision, estimant qu'“on nous a reproché d'attendre longtemps, mais c'était par inquiétude pour la Syrie”. Et d'ajouter : “Il nous fallait une majorité pour approuver ces décisions.” Réagissant à cette annonce, par la voix de son ambassadeur syrien auprès de la Ligue arabe, Youssef Ahmad, la Syrie a qualifié la décision d'“illégale et contraire au traité” de l'Organisation panarabe. Il affirmera que “c'est une décision qui met fin à l'action arabe commune et prouve que l'administration de la ligue suit un programme édicté par les Américains et les Occidentaux”. C'est la seconde fois que la Ligue arabe suspend un de ses membres après en avoir fait de même avec la Libye, également touchée par la vague des révoltes du Printemps arabe, et qui avait été suspendue le 22 février des travaux de la ligue. Ceci étant, le régime d'al-Assad, qui ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation, affirme lutter contre des “gangs terroristes” qu'il accuse de chercher à semer le chaos en Syrie. Sur le terrain, la répression de la révolte populaire sans précédent, qui a fait, selon l'ONU, plus de 3 500 morts depuis la mi-mars, n'a pas baissé d'intensité, faisant notamment plus de 120 morts en dix jours dans la seule région de Homs. Merzak Tigrine