Le ministre de la Communication, Nacer Mehal, qui présentait hier devant l'hémicycle le projet de loi sur l'information, devrait, sans doute, revoir sa copie. Des députés mais également des professionnels sont loin d'être agréés par le nouveau texte que d'aucuns qualifient déjà de “code pénal bis”. Dans une lettre adressée aux parlementaires la veille de la plénière, le Syndicat national des journalistes (SNJ) a relevé de nombreuses carences dans le texte. Histoire sans doute d'apporter sa pierre à l'édifice, le SNJ a également formulé des suggestions à même de traduire les aspirations de la corporation. Ainsi, il demande d'abord la reformation de l'article 2 qui impose des contraintes à l'exercice du métier. “Cet article nécessite une modification dans le sens de plus de souplesse pour n'en garder que les interdictions raisonnables et universellement admises”, suggère le SNJ. Outre la révision à la hausse du nombre d'années exigées pour être éligible au poste de directeur de la publication, fixé à cinq ans dans le texte, le syndicat observe l'absence dans la mouture de Mehal de la protection des sources. “Les sources doivent être protégées pour permettre un exercice sain de la profession de journaliste et, notamment, éviter le recours au réflexe de l'autocensure, ce qui est en soi une atteinte grave à la liberté de la presse”, note le syndicat. Dans le même contexte, il demande la “modification de façon significative” de l'article 80 qui limite et conditionne l'accès à l'information. Autre article appelé à être modifié, celui inhérent à la vie privée des personnalités. Selon le SNJ, “cet article doit subir une modification substantielle pour ne pas constituer un prétexte à toute personne se considérant personnalité, pour traîner le journaliste devant la justice”. Prévue déjà dans la loi 90, mais jamais mise en place, la création d'une autorité de régulation doit être l'émanation exclusive des journalistes, contrairement à ce qui est stipulé par le nouveau texte où des représentants des pouvoirs publics pourraient y siéger. Réduction du nombre d'articles relatifs au “droit de réponse et droit de rectification”, modification des articles portant recours à la justice pour ester le journaliste, réduction de l'amende infligée au journaliste en cas de diffamation, association du directeur de publication à son paiement —dans le texte, elle incombe exclusivement au journaliste, ce qui encourage l'autocensure —, clarification des pouvoirs de l'autorité de régulation, présence impérative d'un représentant du syndicat au sein de l'autorité de régulation, levée du monopole sur la publicité, assouplissement des conditions d'octroi d'agréments, possibilité pour les journalistes d'avoir des actions dans les journaux, enrichissement du statut du journaliste, consécration du droit à la création de syndicats au sein des entreprises de presse, prescription de sanctions à l'encontre d'éditeurs ne respectant pas la législation du travail, attribution de la carte nationale de journaliste par l'autorité de régulation sont autant d'autres propositions formulées par le SNJ pour enrichir le texte. Au chapitre consacré à l'audiovisuel, le syndicat relève quelque “fuite en avant”. “Tout est relégué au chapitre de projets à venir. Il est pour le moins insensé que d'éluder cette question si sensible d'une loi organique de surcroît, appelée à régir le secteur de la presse, des médias, de la communication et de l'information en entier”, note la lettre. Enfin, le syndicat demande la proscription de l'apologie du terrorisme et revendique le droit des familles des journalistes assassinées et la protection et la préservation de la mémoire de nos confrères assassinés. K. K.