La journée de demain marquera le 50e anniversaire de la mort de Frantz Omar Fanon. Né le 20 juillet 1925, à Fort-de-France (Martinique), le psychiatre, également militant anticolonialiste et ancien représentant du gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), est, en effet, décédé le 6 décembre 1961, à la suite d'une leucémie, à l'âge de 36 ans, à la veille de l'Indépendance de son pays d'adoption : l'Algérie. Celui dont les écrits étaient saisis par la police coloniale a laissé derrière lui une œuvre qui place la libération de l'homme au cœur de ses préoccupations. Cinquante ans après la disparition de Fanon, est-il juste de dire que le colonialisme et le racisme, qu'il a combattus avec force de son vivant, appartiennent à une époque révolue ? Face à la persistance des violences, aux violations du droit international et aux atteintes progressives contre le principe de souveraineté territoriale, la pensée de Frantz Fanon dérange encore. Par ailleurs, elle constitue un précieux éclairage sur la problématique d'humanisation, mais aussi un repère, sinon un baromètre, susceptible de soulever des interrogations sur les combats actuels des peuples colonisés et sur les dynamiques de résistance face aux forces réactionnaires et ultralibérales, dans le monde en général et en Afrique en particulier. Le moment n'est-il pas venu de revisiter plus profondément l'œuvre et l'action de l'inlassable avocat des damnés de la terre, à la lumière des nouveaux accoutrements coloniaux ? Comme l'ont révélé des observateurs et commentateurs, la pensée du défenseur des colonisés et des victimes du racisme est d'une “actualité brûlante”, un demi-siècle après sa mort. D'aucuns pensent même que les écrits de Fanon sur l'esprit colonial sont susceptibles de nous édifier sur la relation Algérie-France, surtout sur le “retour des conflits de mémoire”. En tout cas, il n'est jamais trop tard pour chercher à comprendre. Dans cette optique, il faut applaudir l'initiative prise récemment par le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) : celui-ci organise, demain et après-demain, des journées d'étude sur Frantz Fanon, à la Bibliothèque nationale d'El-Hamma (Alger), et ce, à l'occasion du cinquantenaire de la disparition du psychiatre algérien. Outre les témoignages et les hommages qui seront rendus à ce dernier, l'approche des “dimensions théoriques” et celle des “dimensions socioculturelles” de l'œuvre de Fanon, de même que “l'actualité” de sa pensée sont au programme. Les interventions et les débats porteront notamment sur l'“Algérie de Frantz Fanon”, “la décolonisation du savoir”, la psychiatrie en relation avec la “libération sociopolitique”, l'“inhumanité de l'entreprise coloniale” et les “mésaventures de la conscience humaine”, sans oublier ces “aliénations d'hier et d'aujourd'hui en Algérie”. Hafida Ameyar