Le 6 décembre 1961, Frantz Fanon mourait à l'hôpital de Bethesda dans le Maryland, aux Etats-Unis. Né à la Martinique en 1925, psychiatre et philosophe devenu militant anticolonialiste, Fanon meurt terrassé par la leucémie quelques mois avant l'indépendance de l'Algérie et quelques jours après la publication de son œuvre Les Damnés de la Terre. L'analyse des pathologies sociales et politiques comme le racisme et le colonialisme de Frantz Fanon a dépassé le contexte dans lequel elle a été élaborée pour être d'actualité au vu de la pensée et de l'action de ce grand homme. Sa vie, brève mais riche, Fanon l'a consacrée à la réflexion, l'engagement et l'action pour nous interpeller encore aujourd'hui, comme il l'a fait de son vivant, sur la réalité des rapports que continue de véhiculer l'«Empire» sous d'autres formes et par d'autres voies. La Bibliothèque nationale d'El-Hamma (Alger) abrite, depuis hier, deux journées d'étude sur Frantz Fanon à l'initiative du Centre de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH) à l'occasion du cinquantenaire de sa disparition pour lire le présent à travers Fanon et vis-versa. Il sera question de «dimensions théoriques et des dimensions socioculturelles» dans l'œuvre de Fanon, de «l'actualité» de sa pensée à travers des interventions sur «l'Algérie de Frantz Fanon», «La décolonisation du savoir», «La libération sociopolitique», «L'inhumanité de l'entreprise coloniale», «Les mésaventures de la conscience humaine» et «Les aliénations d'hier et d'aujourd‘hui en Algérie». Pour celui qui n'a cessé de penser et d'agir pour l'humanité toute entière, la destinée de l'homme debout est d'être libre. Fanon, en embrassant la lutte des peuples contre le racisme et la colonisation, a été cet intellectuel qui a consacré sa vie aux opprimés et aux peuples sous domination coloniale ou raciale, ce qui lui a valu d'être par son œuvre au cœur des luttes d'hommes et de femmes, loin de lui à des milliers de kilomètres, à l'exemple du mouvement noir-américain contre le système raciste mis en place par le capitalisme américain. Fanon a écrit à son ami T. Roger peu avant sa mort : «Roger, ce que je veux vous dire, c'est que la mort est toujours avec nous et l'important n'est pas de savoir si l'on peut l'éviter, mais si l'on fait pour les idées qui sont les siennes le maximum.» Et de poursuivre : «Ce qui me choque ici dans ce lit, au moment où je sens mes forces s'en aller, ce n'est pas de mourir, mais de mourir à Washington de leucémie aiguë, alors que j'aurais pu mourir, il y a trois mois, face à l'ennemi, puisque je savais que j'avais cette maladie.» «Nous ne sommes rien sur cette terre si nous ne sommes d'abord les esclaves d'une cause, de la cause des peuples, la cause de la justice et de la liberté.»