Le président Bouteflika, lors de l'inauguration de l'année judiciaire, avouait, non sans une certaine fausse candeur dans le propos, que l'Algérie n'a connu depuis son indépendance que des élections à la Naegelen. D'une certaine façon, il n'a fait qu'enfoncer une porte ouverte, pour la simple raison que ces élections, signe de mépris souverain de la volonté populaire, sont une marque de fabrique du régime algérien depuis sa création par Ben Bella en 1962, avec sa fameuse Constitution adoptée à la salle de cinéma Majestic dans des conditions rocambolesques. Avec l'instauration du pluralisme politique, on est passé du stade du bourrage des urnes avec des scores à la Brejnev à un procédé plus sophistiqué : les quotas, que les Services affectent aux partis en fonction du rôle qui leur est préalablement imparti. Ce qui a donné en gros la scène politique actuelle avec ses apparences de cirque où chacun joue son numéro pour amuser la galerie. Mais le fait que le président Bouteflika, chose tout à fait inédite, ait fait un tel aveu est une manière de prendre ses distances, de dénoncer ce type de pratiques. Du moins, avons-nous la faiblesse de le croire. Cet aveu, même tardif, de la part du chef de l'Etat a aussi et surtout valeur d'engagement de sa part. Engagement pour que les prochaines législatives puissent se dérouler à la régulière. Les plus sceptiques et les plus échaudés des Algériens diront que des engagements, il y en a eu toujours à la veille de chaque rendez-vous électoral. Avec toujours les mêmes résultats que l'on sait. Sauf que cette fois-ci, le contexte politique régional dans lequel vont avoir lieu ces législatives n'est plus le même. Les révolutions arabes sont passées par là et il sera, dès lors, difficile pour ceux qui ont chez nous l'habitude de tripatouiller les résultats de rééditer leurs exploits, sachant qu'en Tunisie, au Maroc puis en Egypte, trois pays qui n'ont jusque-là jamais connu de scrutin libre, le verdict des urnes est respecté. Le monde entier sera braqué sur l'Algérie dont l'expérience, c'est-à-dire les prochaines législatives, sera suivie et observée de très près. Ce qui rend, a priori, la fraude difficile. Mais a priori seulement car chez nous tout est possible. O. O.