Alors que le bilan de ces attaques sanglantes qui se sont produites dans les villes de Damaturu et Potiskum, situées dans l'Etat de Yobe, et à Maiduguri, capitale de l'Etat voisin de Borno, pourrait atteindre une centaine de morts, quinze personnes ont été tuées hier dans une explosion d'origine indéterminée survenue dans une église près de la capitale nigériane Abuja. C'est dire que le Nigeria est plongé dans une violence sans pareille. Celle-ci est attribuée à la secte islamiste Boko Haram, qui a revendiqué une série d'attaques dans le nord-est du Nigeria jeudi et vendredi derniers. Des analystes estiment qu'elle veut imposer un Etat islamique. Bien que son implication dans l'explosion meurtrière d'hier ne soit pas prouvée Boko Haram est pointée du doigt. Se réclamant des talibans afghans, ce mouvement islamiste est également soupçonné de liens avec la branche maghrébine d'Al-Qaïda (Aqmi). Jusqu'à la répression de 2009, les combattants islamistes étaient actifs dans leur fief de Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno (nord-est), près des frontières du Cameroun, du Niger et du Tchad. Depuis, on ignore où est située leur base. Pour rappel, Boko Haram avait lancé en 2009 une insurrection sous l'autorité de leur ex-dirigeant Mohammed Yusuf à Maiduguri. L'armée avait brutalement réprimé le soulèvement et environ 800 personnes avaient été tuées. La mosquée ayant servi de quartier général au mouvement avait été rasée, leur chef tué. Mais, le groupe continue de lancer des raids meurtriers visant policiers, militaires, hommes politiques ainsi que responsables communautaires ou religieux opposés à leur idéologie. Les bars où de l'alcool est consommé sont également leur cible. On constate que depuis mi-2010, la secte a élargi son champ d'action. Active essentiellement dans le nord, majoritairement musulman, du pays le plus peuplé d'Afrique avec plus de 160 millions d'habitants, elle s'étend désormais dans d'autres régions, notamment Abuja, où elle a attaqué le quartier général de la police (deux morts en juin) et le bureau des agences des Nations unies (24 morts en août). Boko Haram, dont le nom signifie en langue haoussa “l'éducation occidentale est un péché”, veut un Etat islamique dans le nord du pays, avec une stricte application de la charia. Le nord est à majorité musulmane avec quelques enclaves chrétiennes, alors que le sud est à dominante chrétienne. Les liens de la secte semblent dépasser les frontières du Nigeria. Le 15 juin, le mouvement a affirmé dans un communiqué que certains de ses membres avaient reçu une formation militaire en Somalie, en partie contrôlée par les Shebab, combattants islamistes liés à Al-Qaïda. “Très bientôt, nous lancerons le jihad (guerre sainte)... Nous voulons faire savoir que des jihadistes sont arrivés au Nigeria en provenance de Somalie, où ils ont reçu une formation militaire de la part de nos frères qui ont rendu ce pays ingouvernable”, annonçait alors Boko Haram dans un communiqué. À ses débuts en 2004, le groupe était essentiellement composé de diplômés de l'université et de personnes ayant rompu avec leur milieu social d'origine, classe aisée ou classe moyenne. M. T./Agences