Ils sont trois artistes-peintres. Une discipline plastique les réunit : la calligraphie. Certes, l'approche et l'application sont aux antipodes, mais le terreau est identique. Il est composé de l'amour et de la volonté qu'ils vouent à cet art. Depuis le 26 décembre 2011, Taleb Mahmoud, Laddi Farah et Kour Noureddine exposent leurs œuvres au Musée national de l'enluminure, de la miniature et de la calligraphie, palais Mustapha Pacha. Chacun d'eux occupe une pièce au premier étage de cette belle demeure qui date de l'époque ottomane. Dans le travail présenté, chacun des exposants œuvre pour la sauvegarde de la mémoire. L'approche et les techniques différentes. On n'est plus dans le traditionnel, des touches “contemporaines” sont très visibles. Avec deux collections, Farah Laddi subjugue de par sa technique de peinture sur et sous verre (ou sur verre inversé). Cette diplômée de l'Institut des sciences de la mer et de l'aménagement du littoral en écologie marine est autodidacte. Elle expose vingt-cinq tableaux en verre issus de deux collections – Ô verre marine et Enchantemain – où elle raconte deux histoires. La première est relative à la ville d'Alger et ses différents sites et monuments architecturaux. C'est également le lien entre ses vestiges et leur relation avec la grande bleue qui est mis en avant, ainsi que la dynamique et la beauté de la cité algéroise. Des couleurs chatoyantes, qui coulent sur toute la surface de l'œuvre, entrelacées ou superposées. Généreuses, elles forment dans leur course les courants marins. Quant à la seconde histoire, c'est celle des prénoms féminins algériens et algérois anciens (plus de 120) qui ne sont plus de mise mais qui “hantent” notre imaginaire. Ils sont calligraphiés en relief, autour de la main de Fatma, symbole de protection et de création. Le reste de l'œuvre, décors et ornements, est peint sous le verre. La différence entre les deux techniques est que la peinture sous verre inverse les étapes du travail. De son côté, Taleb Mahmoud (d'Oran) demeure fidèle à son style : un mix de trois techniques, la peinture, la sculpture et la calligraphie qui n'est qu'un outil d'ornement de l'œuvre. Car l'on remarque que l'artiste accorde une importance certaine à la composition de son tableau, cherchant à mettre en valeur les petits détails. Une fois la création achevée, le plasticien met à l'épreuve son génie et commence à calligraphier une succession de mots qui s'incrustent telles des pierres, conférant à l'œuvre une originalité artistique, devenant la marque de fabrique de Taleb Mahmoud : un style inspiré de “l'expressionnisme abstrait”. Outre la technique, la couleur occupe une place prépondérante chez l'artiste. Une palette harmonieuse inspirée de la terre. Le rouge est prédominant, symbolisant la passion et la flamme. Quant à la collection de Kour Noureddine, elle est totalement dédiée à l'art de la calligraphie et de l'arabesque (utilisé comme un élément de décoration). Dans chaque tableau, il développe une lettre, un détail, lui donnant une forme identique, soit le point (dans l'écriture arabe), soit le début ou la fin d'une lettre (Alif ou ra). Le fond est sombre pour contraster avec l'éclat du motif aux couleurs riches et chaudes, avec une dégradation (du sombre au clair). Utilisant le style “toult”, l'artiste, qui vient également de la capitale de l'Ouest, donne libre cours à son inspiration. Quand le regard se pose sur une œuvre, l'impression première est celle de l'assemblage, entrelacement des lettres, symbolisant l'unicité du peuple algérien (c'est son message). Son sujet principal ce sont les noms sacrés de Dieu et les versets coraniques. Jusqu'au 26 janvier 2012, ces œuvres sont visibles au Musée national de l'enluminure, de la miniature et de la calligraphie. Une balade plastique pour le bien-être de la fibre artistique qui sommeille en chacun de nous. A.I.