Incroyable est cette expérience vécue par le jeune couple algérien rescapé du naufrage du “Concordia”, un paquebot de croisière, le 13 janvier dernier près de l'île italienne du Giglio. Marié le 6 du même mois, le nouveau couple Bencherchali, dont le mari, Mohamed âgé de 36 ans, n'est autre que le fils de l'ancien P-DG d'Air-Algérie, parti en voyage de noces en Europe, a embarqué dans le bateau, exactement le 9 janvier à partir du port de Barcelone, pour une croisière d'une semaine, du 9 au 16 janvier. Mais le sort en avait décidé autrement, puisque leur croisière allait finalement prendre fin seulement quatre jours après leur embarquement, un certain vendredi 13... Mohamed Bencherchali est l'un des premiers passagers à quitter, avec sa femme, le bateau, quelque deux heures après le naufrage, et prendre la première chaloupe de sauvetage à destination de l'île de Giglio, immergée à quelques brasses du “Concordia” en difficulté. Comment avaient-ils vécu ce moment d'exception ? “Avec beaucoup de peur et de panique, mais aussi avec un sang-froid exemplaire”, répond le rescapé. “Tout a commencé vers 21 heures, c'était au moment du dîner, lorsque le déséquilibre du bateau était ressenti à bord. C'était alors la panique générale. Tout de même, on ne réalisait pas encore ce qui allait se passer ; des membres de l'équipage tentaient de nous rassurer en avançant que ce n'était qu'une petite panne et le bateau ne devrait pas tarder à reprendre sa stabilité. Mais, c'était peine perdue, puisque l'annonce du naufrage n'allait pas tarder à se faire, au mégaphone, par le commandement de bord. Et ce fut le brouhaha général à bord ; c'est tout le monde qui y effectuait des va-et-vient. Dans le même temps, plusieurs passagers, les femmes surtout, ont fait des crises d'hystérie”, raconte Mohamed, heureux d'avoir gardé son sang-froid et consoler sa jeune femme, avant de se sauver des eaux de la Méditerranée où a coulé le “Concordia”. “Fort heureusement, j'ai miraculeusement gardé mon sang-froid pour consoler ma femme en tentant de la convaincre que tout allait bien se passer, et que ce n'était qu'une panne technique. Mais, en même temps, j'ai eu le réflexe d'aller chercher les gilets de sauvetage dans la chambre. Je ne vous cache pas que dans un premier temps j'ai pensé à sauter du bateau avec ma femme, mais je n'ai pas trouvé d'issue. Des membres d'équipage continuaient alors de nous calmer. Devant le refus de l'équipage de nous délivrer, même après une instruction reçue du commandant de bord du bateau de dépannage qui pointait quelques temps après l'alerte, nous étions contraints de patienter à l'intérieur du bateau. Pendant ce temps précis, moi et ma femme, nous nous sommes contentés de nous lancer des petites phrases, essentiellement des déclarations d'amour pour le jeune couple que nous sommes. Mon sens de l'humour y était pour beaucoup dans le pénible exercice de tenter de consoler ma femme en ce moment pénible. Il nous a fallu supporter cette situation près de 3 heures durant, pour qu'on soit enfin autorisés à quitter le bateau pour embarquer, vers minuit, dans les chaloupes de sauvetage. Nous avons eu la chance d'être les premiers à y être embarqués, du fait que nous étions les plus près des parapets de la terrasse du bateau. La traversée, en chaloupe, du Concordia à l'île de Giglio a duré à peine 10 minutes”. Une fois sur l'île, les rescapés vont encore galérer quelques heures, avant d'embarquer, vers 3 heures du matin, le samedi 14 janvier, dans un ferry pour enfin retrouver le sol d'une ville italienne et être ensuite acheminés vers l'aéroport international de Rome. Grâce à l'assistance de l'ambassade algérienne à Rome, Mohamed Bencherchali et sa femme prendront le vol à destination d'Alger, programmé à 13 heures dans la même journée. La fausse note dont se souvient encore Mohamed, reste le “laisser-aller” prémédité des membres d'équipage, dont le capitaine accusé d'avoir “abandonné” son navire au moment du naufrage. “Oui, j'atteste que les membres d'équipage, au nombre de 1 000, nous ont abandonnés au moment de la grande panique. Mieux encore, il y avait parmi eux ceux qui ont quitté le bateau avant même d'évacuer les passagers”, témoigne le rescapé. F A