Le guide suprême iranien, Ali Khameneï, a menacé, lundi soir, de recourir à la “force du peuple” en cas de blocage institutionnel entre les trois pouvoirs exécutif, judiciaire et législatif, selon la télévision d'Etat. “Le jour où les trois pouvoirs ne pourront ou ne voudront pas régler les grands problèmes, le guide suprême, s'il en ressent le besoin, fera intervenir la force du peuple”, a dit l'ayatollah Khameneï, sans préciser ce qu'il entendait par là. Intervenant au moment où la condamnation à mort de l'intellectuel Hachem Aghajari pour blasphème suscite une protestation considérable, il a, par ailleurs, demandé à la justice de “faire attention” aux jugements qu'elle rend afin de ne “pas donner de prétexte (...) pour (la) remettre en cause”, selon la télévision. Destinataire de nombreux appels à la clémence en faveur de l'intellectuel, le Guide a “conseillé” à la justice de “faire attention au comportement général de l'appareil judiciaire, notamment dans l'application des peines et la gestion des tribunaux, afin de ne pas donner à ses amis (qui la) critiquent, ni à ses ennemis, de prétexte pour la remettre en cause”. M. Khameneï a également “conseillé” à l'exécutif du président réformateur, Mohammad Khatami, de “pallier les insuffisances” de sa politique. Quant au pouvoir législatif, il lui a recommandé de “prendre en compte les vrais besoins de la population”, s'adressant ainsi clairement au Parlement. Ce dernier, dominé par les réformateurs, a exprimé très vivement, dimanche, son émotion devant la condamnation de M. Aghajari, mais a aussi adopté coup sur coup deux projets de loi contestant l'emprise des conservateurs sur le pouvoir. Bastion des conservateurs, la justice est en butte à une contestation nationale et internationale toujours grandissante pour avoir condamné à mort M. Aghajari, mais est aussi visée par l'un de ces projets de loi, qui permet au président d'intervenir directement dans ses affaires. Le bras de fer entre les réformateurs et les conservateurs n'a cessé de se tendre au cours des dernières semaines.