Les anciens ministres palestinien, Yasser Abd Rabbo, et israélien, Yossei Beilin, à l'origine de ce plan de paix émanant pour la première fois de personnalités des deux camps, semblent avoir bien avancé dans ce projet en mesure d'aplanir beaucoup de différends qui paraissaient jusque-là insurmontables. Ariel Sharon s'y oppose farouchement. Ce qui n'était au départ qu'une timide tentative de rapprocher les points de vues palestinien et israélien dans la perspective d'un plan de paix global est devenu, en fin de compte, un sérieux projet qui sera lancé officiellement à Genève le 1er décembre prochain, grâce au concours appréciable sur le plan logistique de la confédération helvétique. On annonce même la présence à cette cérémonie de personnalités mondiales, tels les anciens présidents américains Jimmy Carter et Bill Clinton, en guise de soutien à l'initiative. Dans ce cadre, l'administration Bush n'a rien laissé filtrer sur le sujet, la lettre d'encouragement adressée par le secrétaire d'Etat US aux affaires étrangères aux promoteurs du projet est un signe qui ne trompe pas sur l'intérêt qu'accorde Washington à l'opération. Celle-ci est d'autant plus intéressante car elle rapproche sensiblement Israéliens et Palestiniens sur certaines questions qui constituaient de sérieux obstacles sur le chemin de la paix. Ainsi, sur le statut de Jérusalem, que chaque partie revendique comme sa capitale, les initiateurs du projet de Genève envisagent la solution d'un partage de souveraineté sur cette ville. Quant à l'épineux point du droit au retour pour les réfugiés palestiniens, il est question d'un compromis acceptable pour les deux parties. Ce sont là deux exemples montrant que des progrès non négligeables ont été accomplis dans la voie de la paix par les promoteurs de ce plan. Ces derniers n'ont rien élagué dans leurs discussions ; au contraire, tous les problèmes ont été passés en revue, notamment ceux des colonies juives et des frontières du futur Etat palestinien sur lesquels butaient toutes les précédentes négociations de paix. Si le président de l'autorité palestinienne accorde implicitement son soutien au projet, le chef du gouvernement israélien y voit un grand danger pour Israël. Il n'a pas hésité un seul instant à le condamner fermement. Pour le contrecarrer, il se dit disposé à reprendre langue avec les officiels palestiniens pour reprendre les négociations entrant dans le cadre de la feuille de route du quartette international, qu'il n'avait cessé de bloquer auparavant. Ainsi, une rencontre est prévue entre lui et le nouveau premier ministre palestinien dans les prochains jours. Sharon ne cesse d'appeler et de multiplier les actions pour empêcher l'adoption de l'initiative de Genève. Ira-t-il jusqu'à faire des concessions aux Palestiniens sur certaines questions qu'il considérait comme non négociables, pour faire avorter le projet de Yasser Abd Rabbo et Yossei Beilin ? Le fait qu'il ait accepté de rencontrer Ahmed Qoreï, alors qu'il avait écarté cette éventualité tant que la gestion des affaires de la sécurité palestinienne demeurait entre les mains de Yasser Arafat, et c'est toujours le cas, laisse supposer qu'il est disposé à discuter sérieusement. Mais comme l'homme est un farouche opposant à la naissance d'un Etat palestinien conformément au contenu de la feuille de route, il ne serait guère surprenant de le voir faire un volte-face, si jamais il parvenait entre-temps à faire échouer l'initiative de Genève. Il faut s'attendre à tout de cet anti-palestinien primaire, et les Palestiniens savent à quoi s'en tenir avec lui. K. A.