On assiste à une remontée spectaculaire de la monnaie nationale. Fait presque inédit, estime positif par la communauté d'affaires nationale le dinar algérien vient de gagner de précieux points face au dollar et à l'euro, principales monnaies dont sont libellées nos importations. Sans effet d'annonce, la cotation des monnaies émanant de la Banque d'Algérie affiche depuis plus d'une semaine des taux de change de 1 euro contre 86 DA et de 1 dollar pour 74 DA. Il faut savoir qu'a la dernière cotation, il fallait 92 DA pour se payer un euro. Entre les deux monnaies reines, l'euro et le dollar, la danse ou plutôt le sursaut du dinar se mesure à environ 7% de gain en valeur. S'agit-il d'un simple résultat naturel découlant des mécanismes de change et qui auraient opté pour un autre rééquilibrage du dinar ? Sommes-nous face à une opération politique ouvrant la manœuvre à une influence extra-monétaire “bien administrée” pour conforter le dinar et l'envelopper d'une valeur que le marché ne lui reconnaîtrait pas ? En clair où se situe la vraie valeur, voire l'authentique cours de la monnaie nationale et quelle serait sa marge de fluctuation tolérée ? Il faut rappeler ici que depuis l'avènement de l'euro en janvier 2002 coté au départ autour de 68 DA, la monnaie nationale a connu un glissement effréné tout au long de ces mois pour atteindre des pics de dépréciation jusqu'à osciller autour de 1 euro pour 96 da. Le dinar aura ainsi perdu plus de 25% de sa valeur moins de 24 mois. Et ce, en entraînant inéluctablement un renchérissement brutal de nos importations mettant à mal bon nombre de filières d'activités domestiques tels, notamment les concessionnaires automobile qui s'étaient vu contraints de rajuster à la hausse les prix des véhicules. D'aucuns s'étaient alors manifestés pour dénoncer ce qu'ils considéraient comme une dévaluation déguisée. Pourtant fait marquant à cette même période les égarements de change sur les places internationales pouvaient quelque part justifier la donne. L'euro détrompait le dollar et annonçait une reconfiguration à l'européenne de l'architecture monétaire. Or, aujourd'hui en Algérie la tendance est en train de se renverser, tout comme les débats d'ailleurs. Ceux qui s'inquiétaient, hier, d'une supposée dévaluation soupçonnent aujourd'hui l'effet inverse, c'est-à-dire une réévaluation maquillée du dinar. À moins d'être un simple fait conjoncturel, le rebond du dinar peut être considéré comme un événement monétaire à l'heure où l'euro touche une flambée historique sur la place internationale. En tout cas cette nouvelle donne met fin à une chute vertigineuse qui aura trop duré et surtout trop coûte au pouvoir d'achat, au demeurant fortement dépendant de la facture à l'import. Avec un gain de 7% à l'actif de la monnaie nationale au premier rang de la communauté d'affaires algérienne les importateurs peuvent afficher un optimisme certain et d'égale valeur. Et pour cause, un dinar fort signifie une économie considérable sur la facture d'importation. À cela s'ajoutent par effets d'entraînement des allégements sur les charges et droits de douane ainsi que les taxes fiscales. À titre illustratif, la plus modeste des importations, qui se chiffre à 20 000 euros, permet avec un cours de 1 euro pour 86 dinars d'économiser ou de gagner – c'est selon – un minimum de 100 000 DA. Pour une importation moyenne, l'importateur peut espérer tirer profit de cette embellie à hauteur de 1 million de dinars et c'est en fait autant de soulagement pour le pouvoir d'achat. “Avec cette situation de baisse de l'euro face au dinar et à condition cependant qu'elle s'inscrive dans la durée, je pense que c'est une bonne chose pour tout le monde”, observe un opérateur privé qui explique, “concurrence oblige, les prix intérieurs pourraient baisser car les producteurs et autres commerçants ont intérêt à le faire et de toute façon leurs ventes augmenteront. Ajoutons à cela que le pouvoir d'achat est appelé à se conforter, et c'est tant mieux pour la consommation. La machine ne pourra que redémarrer”. Notre interlocuteur, parlant en connaissance de cause, souhaite que le gain du dinar parvienne à 10% et se stabilise dans le temps afin d'envisager une répercussion tous azimuts sur les prix. Lui qui a déjà “perdu près de 6 milliards de centimes à cause de la fameuse flambée de l'euro à l'heure des hostilités dans le Golfe”, table sur une reprise de la consommation puisque selon son appréciation les dividendes ne pourraient qu'être assurés. En tout cas en l'absence des mécanismes d'endiguements contre les risques de change à travers notamment la possibilité d'achat des devises à terme afin de prémunir les opérateurs contre les ravages des yoyos, il faut espérer d'ores et déjà que le panier de monnaies qui a servi à cette nouvelle parité du dinar servira aussi à la richesse d'un tout autre panier. Celui de la ménagère. Enfin, il n'est point exclu, avertit-on. À moins qu'une manœuvre purement électoraliste n'ait été entreprise pour doper le dinar et tenter de révéler sa nouvelle valeur comme le reflet d'une performance économique. A. W.