La Kabylie vit au rythme des dissenssions Le dialogue, option minoritaire Les partisans du dialogue, en prenant le risque d'éclater le mouvement des archs, optent pour un isolement suicidaire. La scission au sein du mouvement citoyen est visiblement consommée. Pour preuve, la tenue du conclave de l'Interwilayas dans la nuit d'hier à l'Intht de Tizi Ouzou, sans consensus aucun et en l'absence de plusieurs coordinations parmi les “grosses cylindrées”, reconnues pour être des plus représentatives. Alors que la Coordination des archs, daïras et communes de Tizi Ouzou (CADC) est, depuis quelques semaines déjà, divisée en deux ailes au moins, la Coordination des archs de Béjaïa n'est pas épargnée par ce phénomène. Le conclave de la CICB, tenu ce week-end au TRB, a pratiquement consacré la rupture entre les coordinations locales cataloguées maintenant en “dialoguistes” et “antidialoguistes”. Quatorze coordinations membres de l'Intercommunale ont opté pour la participation à la rencontre de l'Interwilayas. Et ce, loin du sacro-saint consensus, pourtant base de fonctionnement du mouvement citoyen. “Pour notre part, la décision de participer à l'Interwilayas de Tizi Ouzou est irréversible et advienne que pourra”. Cette déclaration faite par le président du conclave sur un ton provocateur et au mépris de la plénière renseigne sur au moins une chose : la plénière du TRB était un simple faire-valoir puisque les décisions ont été prises ailleurs. Et pas forcément par des délégués. Pourtant, les délégués d'El-Kseur, d'Akbou, de Tinebdar, Souk El-Tenine et d'AIt R'zine ont pesé de tout leur poids pour éviter à la CICB de prendre fait et cause pour le groupe d'Abrika. “On ne peut pas tenir une Interwilayas tant que la CADC est divisée”, rappelle un délégué pour qui le conclave de l'Interwilayas est une “dérive”. À Bouira également, l'option du dialogue est minoritaire. Le conclave de Bechloul, qui devait arrêter, jeudi dernier, la décision du boycott de l'Interwilayas, n'a pas eu lieu et la manœuvre a été orchestrée par les comités de Raffour, Aït Laâziz et M'chedellah essentiellement. Pourtant, le document de mise en œuvre de la plate-forme d'El-Kseur n'est pas adopté par la plénière de la Coordination des comités citoyens de la wilaya de Bouira (Cccwb). Par contre, la CADC de la wilaya de Boumerdès a carrément opté pour le rejet de la rencontre de l'Intht de Tizi Ouzou. À Tizi Ouzou, les déclarations de démarcation de l'aile d'Imzizou de la CADC se multiplient. Outre l'aile de Mechtras de la CADC, en conclave ouvert depuis un certain temps, les coordinations de Tigzirt, Makouda, Boudjima, Ath Jennad et Larbaâ Nath Irathen considèrent cette Interwilayas comme “nulle et non avenue”. Pour ces coordinations, le document de mise en œuvre de la plate-forme d'El-Kseur est “une arnaque politique, juridique et historique”. Et l'empressement pour son adoption est “le résultat de tractations et de grenouillages secrets visant l'asservissement, sans aucun doute, de la Kabylie par l'argent sale”. Les coordinations de Ath Zmenzer et des Ouacifs se sont démarquées, elles aussi, de ce conclave qui soulève beaucoup de controverses. Les partisans de ce conclave sont catalogués comme étant des “dialoguistes”. Ils veulent aller vite en besogne, en organisant un conclave de l'Interwilayas hors de tout consensus et en un jour. Cela veut dire qu'il y a “des pressions venues d'en haut”. Sinon, pourquoi prendre le risque de faire imploser le mouvement ? Et puis, il y a les préalables posés par les archs qui risquent d'être renvoyés aux calendes grecques. La non-prise en charge de ces préalables par les pouvoirs publics implique que le dialogue auquel a appelé le président de la République constitue une manœuvre sournoise, surtout que ce “dialogue de pacotille”, si bien sûr dialogue il y a, intervient dans un contexte préélectoral. Les partisans de cette option — le dialogue — sont de plus en plus minoritaires. Alors, pourquoi tient-on à ce point à aller au dialogue plus vite que la musique ? Cette fuite en avant ne réglera pas bien entendu la crise de Kabylie. Pour nombre de délégués, l'isolement suicidaire des partisans du dialogue sera consacré par le conclave de l'Intht qui prend les formes du congrès de Tripoli, toutes proportions gardées. Y. A. Dernière minute Le pouvoir a sept jours pour répondre aux préalables L'ultimatum des archs Les délégués de l'Interwilayas ont lancé, hier, à Tizi Ouzou, un ultimatum de sept jours au pouvoir afin de répondre aux six préalables posés par le mouvement citoyen avant la mise en œuvre de la plate-forme d'El-Kseur. À défaut d'une réponse dans ces délais, les délégués mettront un terme définitif au processus du dialogue. Le conclave se poursuivait hier, encore, tard dans la soirée.