Les villes d'Afghanistan ont vécu hier, après la prière du vendredi, de nouvelles scènes de manifestations, pour la quatrième journée de suite, contre la présence des soldats américains, qui se sont rendus coupables mardi dernier d'incinération d'exemplaires du Coran. Comme attendu par les observateurs, des centaines d'Afghans ont à nouveau manifesté hier, à Kaboul et dans au moins cinq autres provinces du pays, pour protester contre l'incinération d'exemplaires du Coran, mardi, dans une base militaire américaine. Selon les agences de presse, cinq arrondissements de la ville de Kaboul ont connu des rassemblements, alors que des marches ont eu également lieu dans les provinces de Baghlan et Kunduz (nord), Bamyan et Ghazni (centre) et Nangarhar (est). Dans la capitale, l'armée a tiré en l'air pour éloigner la foule. Plusieurs centaines de protestataires se sont alors enfuis. Seule une cinquantaine d'entre eux tentent de marcher vers le centre-ville, qui leur est barré par la police. Ces marches ont débuté après la prière du vendredi, durant laquelle au moins un imam à Kaboul a poussé les fidèles à prendre la rue pour protester contre la destruction du livre saint de l'Islam. La veille, le président Barack Obama a présenté ses excuses au “peuple afghan” pour l'incinération d'exemplaires du Coran sur ordre d'un officier américain, au troisième jour d'émeutes au cours desquelles deux soldats américains ont été tués par un militaire afghan, ainsi que douze manifestants. “Je vous présente, ainsi qu'au peuple afghan, mes excuses les plus sincères”, a écrit Obama à son homologue afghan Hamid Karzaï, invoquant une “erreur (...) commise par inadvertance”, selon Kaboul. L' “erreur” est le fait d'un “officier américain” qui, “par ignorance”, a ordonné l'incinération du livre sacré de l'Islam, selon un communiqué des services de M. Karzaï. Le “responsable” devra “rendre des comptes”, a ajouté Obama, cité dans ce texte. Alors que le président Karzaï avait “appelé au calme” mercredi soir, de nouvelles émeutes se sont produites dans plusieurs provinces, des milliers de personnes marchant aux cris de “Mort à l'Amérique”. “Nous voulons que les coupables soient jugés. Les excuses, ce n'est pas assez”, scandaient notamment les protestataires dans la province de Kunar. Dans celle de Nangarhar (est), deux soldats américains ont été tués lors d'une manifestation par un soldat afghan, qui a retourné son arme contre eux. Le sentiment antiaméricain n'a jamais été aussi fort dans la population en 10 ans de conflit, au diapason des bavures de l'Otan qui tue relativement fréquemment des civils et de diverses affaires récentes de profanation ou autres actes jugés blasphématoires à l'égard de l'Islam. C'est d'ailleurs sans doute pour tenter d'étouffer cette nouvelle flambée de violences qu'en amont du président Obama de hauts responsables américains, à Washington comme à Kaboul, se sont confondus en excuses auprès du “peuple afghan”, en plaidant l' “ignorance” et l' “erreur” quelques heures après que des employés de la base de Bagram eurent découvert l'incinération. Pour rappel, dans la nuit de lundi à mardi, des exemplaires du Coran, confisqués à des détenus de la prison de la base américaine de Bagram, à 60 km au nord-est de Kaboul, ont été incinérés parce que, selon des responsables à Washington, ils servaient à faire passer des messages entre prisonniers. Quant aux talibans, ils paraissent hésitants. M. T./Agences